Joe Biden a assuré que cet investissement dans ces pièces au coeur de l'électronique moderne aiderait son pays à gagner "la compétition économique au XXIe siècle". Le texte, adopté fin juillet par le Congrès, prévoit aussi des dizaines de milliards de dollars pour la recherche et le développement.
La loi "amplifie nos efforts pour fabriquer des semi-conducteurs ici, en Amérique", a déclaré Joe Biden, louant les entrepreneurs, qui sont "la raison pour laquelle je suis optimiste concernant le futur de notre pays".
La demande pour les semi-conducteurs a explosé pendant la pandémie, causant des pénuries mondiales encore exacerbées par la fermeture d'usines chinoises face aux résurgences du Covid-19.
Les Etats-Unis, dont la part dans la production mondiale a fortement reculé ces dernières années au profit de l'Asie, ont souffert de ces pénuries. Cela a notamment ralenti la production de voitures neuves l'an dernier, faisant flamber les prix dans l'automobile.
Quasi-monopole de Taïwan
Les producteurs américains, sud-coréens et japonais sont aux avant-postes avec des semi-conducteurs de 5 à 7 nanomètres (lire encadré). Le sud-coréen Samsung a même récemment commencé à produire des puces hautement techniques de 3 nanomètres seulement, soit 20'000 fois plus fines qu'un cheveu. Un exploit que devrait dépasser la société taïwanaise TSMC qui projette de fabriquer des plaquettes de 2 nanomètres d'ici 2025. Une prouesse d'une extrême complexité technique.
TSMC est d'ailleurs un acteur clé du secteur: joyau de l'industrie taïwanaise, l'entreprise produisait en 2021 90% des puces de dernière génération au niveau mondial. Une situation quasi-monopolistique avantageuse face à la Chine, qui est très en retard dans le domaine.
Cinq à dix ans de retard
Les fabricants chinois sont actifs dans les segments moins complexes. Globalement, la Chine compte un retard estimé entre cinq et dix ans sur ses concurrents. C'est gigantesque dans ce secteur hautement compétitif, et les centaines de milliards de francs engloutis par le gouvernement chinois ces dernières années ont débouché sur des résultats décevants.
Outre les défis liés à un savoir-faire complexe, la Chine souffre des restrictions imposées par les alliés américains, japonais, sud-coréens et taïwanais qui lui restreignent l'accès à leur technologie.
Les Etats-Unis s'apprêtent donc à donner une sérieuse impulsion à la recherche et à l'innovation, via le plan industriel de Joe Biden.
"Un gratte-ciel bâti sur du sable"
Si la Chine ne parvient pas à rattraper son retard, elle pourrait ne jamais atteindre son rêve de grande puissance technologique autonome - elle qui ambitionne de passer d'une économie manufacturière à une économie de l'innovation indépendante de ses rivaux.
Si elle est déjà à la pointe dans différents secteurs comme la reconnaissance faciale, les semi-conducteurs sont un dangereux talon d'Achille. Pony Ma, fondateur du géant technologique chinois Tencent, le reconnaissait en 2019: la tech chinoise, c'est un "gratte-ciel bâti sur du sable".
Michael Peuker/vajo avec agences
Qu'est-ce qu'un semi-conducteur?
Les semi-conducteurs sont à l'électronique ce que le pétrole est à l'industrie. Sans eux, rien ne fonctionne. Des téléphones portables aux ordinateurs en passant par les aspirateurs, ils sont partout.
Il s'agit de petits carrés de silicium de quelques nanomètres d'épaisseur équipés de circuits gravés et de relais qui permettent d'amplifier, de guider des signaux électriques en fonction de la tâche à accomplir.
En résumé, plus que le cœur, c'est en quelques sortes le cerveau des appareils électroniques. Des cerveaux plus ou moins complexes en fonction des produits auxquels ils sont destinés.
A noter que plus un semi-conducteur est petit, plus il est puissant et efficient. Et plus il est difficile à produire. Un processus d'une complexité exponentielle en fonction du degré de miniaturisation des puces et qui requiert la collaboration avec des acteurs ultraspécialisés.