Salman Rushdie sous assistance respiratoire après avoir été poignardé sur scène aux Etats-Unis
Vers 11h00, un homme a couru sur la scène et a attaqué Salman Rushdie, ainsi que la personne qui l'interviewait. Salman Rushdie souffrait d'apparentes blessures au cou et à l'abdomen après avoir été poignardé et a été héliporté dans un hôpital de la région, a indiqué la police de l'Etat de New York.
La police de l'Etat de New York a identifié l'agresseur comme étant un homme 24 ans, qui a été arrêté. Son compte facebook, qui contenait des images des dirigeants iraniens, a été désactivé dans les heures qui ont suivi l'attaque. Une source proche de l'enquête a déclaré à la chaîne NBC News qu'il est "un sympathisant de l'extrémisme chiite".
Grièvement blessé
Salman Rushdie a été placé sous assistance respiratoire, a déclaré vendredi son agent, précisant que l'écrivain avait été grièvement blessé.
"Les nouvelles ne sont pas bonnes. Salman devrait vraisemblablement perdre un oeil, les nerfs de son bras ont été sectionnés, et il a été poignardé dans le foie, qui a été endommagé", a annoncé Andrew Wylie dans un communiqué adressé au New York Times.
Salman Rushdie, né en 1947 à Bombay en Inde, deux mois avant son indépendance de l'Empire britannique, essaie de ne pas être réduit au scandale provoqué par la publication des "Versets sataniques", qui avait embrasé le monde musulman et conduit en 1989 à une "fatwa" demandant son assassinat. Les fondamentalistes jugent son ouvrage "Les versets sataniques" blasphématoire à l'égard du Coran et de Mahomet.
Symbole de la lutte contre l'obscurantisme
"Mon problème, c'est que les gens continuent de me percevoir sous l'unique prisme de la 'fatwa'", avait-il dit il y a quelques années, refusant de s'ériger en symbole.
Mais l'actualité - la montée en puissance de l'islam radical - n'a cessé de le ramener à ce qu'il a toujours été aux yeux de l'Occident: le symbole de la lutte contre l'obscurantisme religieux et pour la liberté d'expression. Déjà en 2005, il considérait que cette "fatwa" avait constitué un prélude aux attentats du 11 septembre 2001.
Beaucoup des traducteurs de son livre ont été blessés par des attaques, voire tués, comme le Japonais Hitoshi Igarashi, victime de plusieurs coups de poignard en 1991.
Son livre, a-t-il par ailleurs expliqué depuis, a été "grandement incompris". "Il s'agissait en réalité d'un roman qui parlait des immigrés d'Asie du sud à Londres et leur religion n'était qu'un aspect de cette histoire-là", a-t-il dit.
Une vie de clandestinité
Contraint dès lors de vivre dans la clandestinité et sous protection policière, allant de cache en cache, il se fait appeler Joseph Anton, en hommage à ses auteurs favoris, Joseph Conrad et Anton Tchekhov. Il doit affronter une immense solitude, accrue encore par la rupture avec sa femme, la romancière américaine Marianne Wiggins, à qui "Les versets..." sont dédiés.
Mais, à partir de 1993, fatigué d'être "un homme invisible", il multiplie les voyages et les apparitions publiques, tout en restant sous surveillance du gouvernement britannique.
Installé à New York depuis quelques années, Salman Rushdie - sourcils arqués, paupières lourdes, crâne dégarni, lunettes et barbe - avait repris une vie à peu près normale tout en continuant de défendre, dans ses livres, la satire et l'irrévérence.
ats/cab/vajo
Anobli en 2007 par la reine
Anobli en 2007 par la reine d'Angleterre, au grand dam des extrémistes musulmans, ce maître du réalisme magique, homme d'une immense culture qui se dit apolitique, a écrit en anglais une quinzaine de romans, récits pour la jeunesse, nouvelles et essais.
Salman Rushdie, dont la langue maternelle est l'ourdou, est né le 19 juin 1947 en Inde, à Bombay (ou Mumbai) au sein d'une famille d'intellectuels musulmans non pratiquants, riche, progressiste et cultivée.
A 13 ans, il part suivre ses études en Angleterre. Après être passé par l'université de Cambridge, il travaille au Pakistan, comme producteur à la télévision. En butte à une censure permanente, il revient à Londres, gagnant sa vie dans la publicité.
Son premier roman célèbre est "Les enfants de minuit", qui obtient le Booker Prize en 1981. Suivent "La honte" (prix 1985 du meilleur livre étranger en France), "Le dernier sourire du Maure", "La terre sous les pieds", "Shalimar le clown" ou "L'enchanteresse de Florence".
Des fictions où cet amateur d'odyssées fantastiques parle souvent de l'Inde et de ses relations avec l'Occident et dénonce le manque de repères qui, selon lui, déstabilise le monde depuis des années.