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Le Vanuatu ne produira plus que de l'électricité renouvelable en 2030

L'archipel du Vanuatu est particulièrement exposé aux événements naturels violents. [AP/Keystone - Nick Perry]
Face au changement climatique, un archipel dans l'Océan Pacifique lance un signal fort / Tout un monde / 5 min. / le 18 août 2022
L'archipel du Vanuatu, dans le Pacifique, vient de lancer l'un des plus ambitieux plans climatiques au monde. Ce petit pays menacé par la montée des eaux s'est engagé à ne produire plus que de l'énergie électrique renouvelable d'ici 2030.

Face à la montée du niveau des océans, les archipels et atolls du Pacifique et de l'Atlantique se sont engagés dans une course contre-la-montre même s'ils ne sont responsables que de moins de 1% des émissions globales de carbone. Et si le plan lancé par le Vanuatu, archipel situé au nord-est de la Nouvelle-Calédonie, ne freinera pas la montée des océans, il donne un signal fort.

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En première ligne du réchauffement, ces îles sont particulièrement actives depuis une trentaine d'années. "Même avant le changement climatique, l'archipel du Vanuatu a souvent été exposé aux désastres", rappelle Wesley Morgan, chercheur au Climate Council en Australie, dans l'émission Tout un monde.

"Le changement climatique exacerbe l'impact des événements"

Dégâts après le passage du cyclone Pam sur le Vanuatu en 2015. [AFP - Jeremy Piper]
Dégâts après le passage du cyclone Pam sur le Vanuatu en 2015. [AFP - Jeremy Piper]

"Il y a des volcans, il a connu des tremblements de terre, les îles sont au milieu d'un océan tropical, et donc traversées par de nombreux cyclones", poursuit ce spécialiste. "Mais le changement climatique exacerbe l'impact de ces événements et les 300'000 habitants du Vanuatu, qui ne sont pour quasi rien dans le réchauffement global, sont les premiers à en subir les effets directs".

C'est donc avant tout pour donner l'exemple que la République de Vanuatu a lancé son plan. Ce petit pays absorbe du reste déjà plus de carbone qu'il n'en rejette. Et son objectif d'atteindre 100% d'énergie renouvelable d'ici 2030 va lui demander des efforts considérables.

"Ce sont des archipels assez isolés, pour faire venir du matériel, mettre des panneaux solaires, ce n'est pas forcément toujours simple", rappelle Hélène Jacot Des Combes, conseillère pour l'adaptation au changement climatique des îles Marshall. "Mais on voit depuis plusieurs années de gros efforts, notamment sur l'énergie solaire".

Un risque toujours plus grand d'inondations

Les coûts de ces objectifs, qui comprennent aussi la préservation et la sauvegarde des îles, s'élèvent à plus d'un milliard de dollars. Mais Hélène Jacot Des Combes ne se fait pas d'illusions: ce plan ne va pas freiner la montée des océans. "Les îles Marshall, tout comme Tuvalu ou les Maldives dans l'océan Indien, sont constitués uniquement d'atolls avec une hauteur moyenne de deux mètres au-dessus du niveau de la mer", relève-t-elle.

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Et s'il n'est pas encore l'heure de parler d'une possible submersion, il y a un risque toujours plus important d'inondations lors des grandes marées et des tempêtes.

"Ce sont des pays qui n'ont plus leur destin entre les mains"

Maison détruite par une tempête dans les îles Marshall en mars 2014. [AFP - Giff Johnson]
Maison détruite par une tempête dans les îles Marshall en mars 2014. [AFP - Giff Johnson]

"Cela va modifier le sol en le rendant plus salé, en mettant aussi du sel dans les réserves souterraines", explique Hélène Jacot Des Combes. "Cela va rendre ces îles inhabitables, et on parle d'un terme qui n'est pas aussi éloigné qu'une submersion. Ce sont des pays qui n'ont plus leur destin entre les mains".

Des décisions douloureuses vont donc devoir être prises, avec peut-être à la clé l'idée de renoncer à sauver certaines îles. "Cela demande des investissements énormes, une réflexion et une planification très importantes, avec des décisions difficiles à prendre", poursuit cette spécialiste. "On ne va pas pouvoir protéger et surélever les 24 atolls habités des îles Marshall".

Appel à un système international de compensations

Depuis une trentaine d'années, le Vanuatu et les autres archipels du Pacifique sont en pointe pour créer un système international de compensation des dommages infligés aux communautés vulnérables.

"Ce système inspiré du principe du pollueur payeur permettrait d'allouer des fonds à des populations démunies afin de les aider à affronter les effets de ces impacts climatiques inévitables", souligne Wesley Morgan.

Mais il n'existe pas encore et surtout, il n'enthousiasme pas les premiers visés: les plus gros pollueurs de la planète.

Le mauvais exemple donné par l'Australie

"L'Australie se rapproche des objectifs fixés par la Conférence de Paris et s'est fixé des normes plus strictes de réduction des gaz à effet de serre", illustre le chercheur du Climate Council. "Mais elle reste l'un des principaux exportateurs d'énergies fossiles et elle ne paie certainement pas de compensations financières afin d'aider les pays les plus pauvres à affronter les effets du réchauffement".

Wesley Morgan espère que l'on abordera la question délicate du financement des compensations lors de la prochaine Conférence sur le climat (COP) en novembre prochain au Caire. Mais il sait que la mesure la plus efficace pour éviter un désastre serait que tous les pays diminuent de moitié leur émissions de CO2 d'ici la fin de la décennie.

Le Vanuatu, lui, a déjà inspiré de nombreux autres archipels et atolls comme les îles Marshall à 2500 km de là, qui ont adopté un plan similaire pour 2050.

Francesca Argiroffo/oang

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