L'ex-cheffe de l'Etat (de 2007 à 2015) Cristina Kirchner, 69 ans, était jugée dans ce procès en distanciel - et en son absence - pour association illicite et administration frauduleuse aggravées, une affaire d'attribution de marchés publics dans son fief de la province de Santa Cruz, en Patagonie (sud), durant ses deux mandats présidentiels.
Vice-présidente et présidente du Sénat depuis 2019, elle bénéficie à ce stade d'une immunité parlementaire que seule la Cour suprême pourrait lever si elle venait à confirmer une éventuelle condamnation. Faute de quoi, elle pourrait se présenter aux élections législatives et présidentielle de fin 2023, même si elle n'a à ce jour pas laissé filtrer ses intentions.
Jugement vers fin 2022
Après les réquisitions viendront début septembre les plaidoiries de la défense, dans cette procédure ouverte en 2019, mais qui avait été suspendue par la pandémie de Covid-19. Elles devraient s'étirer sur plusieurs mois et le jugement ne devrait être rendu que vers la fin 2022.
Mais, signe de l'impact de Cristina Kirchner, aussi populaire à gauche que clivante, des rassemblements spontanés de plusieurs centaines d'opposants et de partisans de la responsable politique se sont produits lundi soir aux abords de son domicile à Buenos Aires, produisant des bousculades et poussant un épais cordon policier à faire usage de sprays lacrymogènes, a constaté l'AFP.
"Un authentique système de corruption institutionnel"
Dans son réquisitoire, le procureur Diego Luciani a dénoncé "un authentique système de corruption institutionnel", "probablement la plus grande opération de corruption qu'ait connue le pays".
L'autre représentant du ministère public, Sergio Mola, a évoqué "des irrégularités systématiques dans 51 appels d'offres sur 12 ans".
Des peines de deux à douze ans de prison ont été requises contre les 12 co-accusés, notamment 12 ans contre un entrepreneur du bâtiment, Lorenzo Baez, déjà condamné l'an dernier à 12 ans de prison dans une affaire distincte d'évasion de capitaux vers des paradis fiscaux.
L'accusation a estimé les pertes causées à l'Etat à 5,2 milliards de pesos (38 millions de dollars au change officiel).
Persécution politique dénoncée
A maintes reprises, Cristina Kirchner, qui nie les faits reprochés, a dénoncé une persécution politique par une justice selon elle instrumentalisée par l'opposition de droite. Opposition et gouvernement en Argentine se renvoient régulièrement l'accusation de "guerre judiciaire" et d'instrumentalisation de la justice.
Le président Alberto Fernandez (centre-gauche) a dans un communiqué condamné la "persécution juridique et médiatique contre la vice-présidente", et estimé "qu'aucun des actes imputés (...) n'a été prouvé".
afp/ebz
Une dizaine de procédures distinctes ces dernières années
Icône de la gauche péroniste, populiste pour ses détracteurs, Cristina Kirchner a été mise en cause ces dernières années dans une dizaine de procédures distinctes, entre pots-de-vin, blanchiment de fonds, préjudice spéculatif occasionné à l'Etat ou entrave à la justice. Elle a bénéficié de non-lieux, deux encore fin 2021, mais cinq procédures restent en cours.