Des défis colossaux pour la nouvelle Première ministre britannique Liz Truss

Avis de tempête sur les îles britanniques. Après l'été du mécontentement, "préparez-vous à l'hiver de l'enfer" titrait récemment le quotidien Evening Standard.

"Liz Truss aura le travail le plus compliqué du monde politique d'après-guerre au Royaume-Uni", estime Anne-Elisabeth Moutet, journaliste au Daily Telegraph, mardi dans La Matinale.

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L'INFLATION - Les prix flambent

L'inflation a atteint en juillet 10,1%, la pire des pays du G7, avec des prévisions allant jusqu'à 22% pour l'an prochain, si le prix de l'énergie continue à flamber. "Les syndicats et les particuliers sont terrorisés par les factures de chauffage et d'électricité", indique Anne-Elisabeth Moutet.

Liz Truss a promis un premier train de mesures d'ici une semaine. Elle s'y refusait en début de campagne, mais envisagerait désormais selon plusieurs médias un gel des prix de l'énergie, comme le réclamait l'opposition travailliste, alors qu'une hausse de 80% des factures d'énergie est prévue pour les ménages en octobre et que de nombreuses petites entreprises étranglées par ces factures redoutent d'avoir à fermer.

"Ce n'est pas la première fois que le Royaume-Uni connaît une crise économique difficile, souligne Anne-Elisabeth Moutet. (...) Le pays prend les crises en premier par rapport au reste de l'Europe, c'est un classique. Et il sort aussi beaucoup plus vite des crises."

>> L'interview complète d'Anne-Elisabeth Moutet dans La Matinale :

LES GRÈVES - La colère de la rue

Dans un pays menacé de récession, les grèves pour obtenir des revalorisations salariales, face à un pouvoir d'achat qui dégringole, ont notamment touché ces derniers mois les trains, le métro, les dockers, les éboueurs et même les avocats commis d'office.

D'autres sont prévues en septembre. Elles nourrissent parfois la comparaison avec l'arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher en 1979, une Dame de fer avec laquelle Liz Truss soigne la ressemblance.

Liz Truss a fait des baisses d'impôts une priorité, voulant ainsi relancer la croissance. Face aux inquiétudes et mises en garde, son ministre des Finances pressenti Kwasi Kwarteng a assuré lundi que son gouvernement agirait de manière "fiscalement responsable".

LES RELATIONS INTERNATIONALES - Le Brexit et l'Ukraine

Liz Truss trouvera aussi dans sa corbeille les problèmes du Brexit inachevé, notamment la question épineuse du protocole nord-irlandais. Les traversées illégales de la Manche battent aussi des records, à plus de 27'000 déjà cette année, et le système de santé publique britannique souffre de difficultés chroniques.

La question ukrainienne sera également évidemment au centre de l'attention. Six mois après l'invasion russe, le président Volodymyr Zelensky espère aussi tisser avec elle des "relations solides" qui "préserveront l'héritage de Boris". Liz Truss pourrait se rendre à Kiev rapidement. De son côté, la Russie ne "s'attend pas à des changements" vers le mieux dans ses relations avec Londres, a assuré le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov.

LE PARTI CONSERVATEUR - Les divisions à l'interne

Liz Truss, qui était depuis un an ministre des Affaires étrangères, n'était pas la favorite des députés conservateurs qui lui auraient préféré son rival, l'ancien ministre des Finances Rishi Sunak, jugé plus compétent pour gérer la crise.

Soulignant en creux ce risque, le Premier ministre sortant Boris Johnson a appelé les conservateurs à se rassembler et à la soutenir "de tout leur coeur". Selon un récent sondage, 52% des Britanniques estiment qu'elle sera une piètre, voire très mauvaise Première ministre.

"Elle a donné tous les gages pour faire plaisir aux membres du Parti conservateur, explique Anne-Elisabeth Moutet. Car les électeurs du parti sont assez différents des 150'000 adhérents, plus jeunes, plus divers. Il faut qu'elle rassemble." Le temps de Liz Truss est compté jusqu'aux prochaines législatives prévues au plus tard en janvier 2025. Tous les sondages montrent à ce stade que l'opposition travailliste l'emporterait largement.

Succéder à Boris Johnson, qui reste très populaire chez certains conservateurs regrettant sa démission forcée en juillet, ne sera pas non plus facile. Il est toujours député et n'a rien dit de ses projets. Liz Truss affrontera aussi mercredi sa première session de questions hebdomadaires à la Chambre.

Anne-Elisabeth Moutet décrit Liz Truss comme une "travailleuse, l'inverse de Boris Johnson". Elle ne sera "pas une Première ministre flamboyante".

>> Ecouter aussi les explications de Catherine Ilic, correspondante de la RTS à Londres, en direct depuis le 10th Downing Street :

AFP - PAUL FAITH

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Propos recueillis par David Berger/vajo avec afp