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Reportages au cœur de la contre-offensive de l'Ukraine au sud du pays

Des soldats ukrainiens patrouillent sur la ligne de front dans la région de Mykolaïv, après un bombardement russe. [AFP - Celestino Arce / NurPhoto]
Des soldats ukrainiens patrouillent sur la ligne de front dans la région de Mykolaïv, après un bombardement russe. - [AFP - Celestino Arce / NurPhoto]
En Ukraine, Kiev a lancé une contre-offensive sur le front sud du pays. Mais face au verrouillage de l'information et à la propagande des belligérants, il est difficile de connaître la réalité de la situation. La RTS s'est rendue sur place pour recueillir des témoignages et rencontrer des parties prenantes au conflit. Reportages.

Alors que les lignes ne bougeaient presque plus depuis plusieurs mois, l'Ukraine a annoncé la semaine dernière le lancement d'une contre-offensive "dans plusieurs directions" dans le sud du pays. Ces déclarations étaient attendues depuis ce printemps, en particulier par la population ukrainienne.

L'opération a notamment pour but de reprendre la ville de Kherson des mains des Russes. Celle-ci avait été le premier bastion ukrainien important pris par Moscou depuis son invasion en février dernier. "C'est le début de la fin de l'occupation de la région", s'est réjoui un responsable de Kherson, soulagé, au moment de l'annonce.

>> Lire aussi : La contre-offensive ukrainienne sur la ville de Kherson pourrait marquer un tournant dans la guerre

L'objectif est également de repousser les troupes russes de l'autre côté du fleuve Dniepr. Mais la tâche est colossale. "Nos actions ont affaibli l'ennemi, mais celui-ci est toujours très puissant", a prévenu la porte-parole des forces du front sud.

Cette contre-offensive est l'aboutissement de plusieurs semaines d'opérations dans le sud de l'Ukraine pour fragiliser l'armée russe, visant ses défenses anti-aériennes, ses dépôts de munitions ou encore des lignes de communication et des ponts stratégiques. Elle intervient alors que Moscou cherche à consolider son emprise sur Kherson, notamment via un référendum d'annexion, et que la région connaît un regain de tensions autour de la centrale nucléaire de Zaporijjia.

>> Les précisions dans Tout un monde de Maurine Mercier, correspondante en Ukraine, sur le lancement de cette contre-offensive :

Pourquoi Kherson est-elle stratégique et quel est l'objectif des deux camps? [AFP - Bulent Kilic]AFP - Bulent Kilic
Kiev annonce une contre-offensive dans le sud de l'Ukraine / Tout un monde / 6 min. / le 30 août 2022

MYKOLAIV – Une ville stratégique pour les Russes

A ce stade, il y a très peu d'informations sur les avancées des troupes ukrainiennes depuis une semaine dans le sud du pays. Le gouverneur de la région, Vitaly Kim, que la correspondante de la RTS en Ukraine Maurine Mercier a pu rencontrer, est resté vague. Il a indiqué que les nouvelles étaient "bonnes" jour après jour. Jeudi, les troupes ukrainiennes ont affirmé avoir "profondément" percé, jusqu'à "plusieurs dizaines de kilomètres", les lignes russes, et avoir "libéré plusieurs localités" dans cette région.

Vitaly Kim, gouverneur régional de Mykolaïv. [RTS - Maurine Mercier]
Vitaly Kim, gouverneur régional de Mykolaïv. [RTS - Maurine Mercier]

Sur place, tout est verrouillé. Les journalistes n'ont pas accès à la ligne de front et ne peuvent donc pas vérifier ce qui s'y déroule. Les forces de Kiev estiment que cela serait trop dangereux: certaines images pourraient aider l'armée russe et mettre ainsi en péril la contre-offensive ukrainienne.

Dans l'immédiat, la stratégie n'est pas de gagner du terrain, mais de continuer à affaiblir les Russes. "Les occupants russes ont énormément d'hommes, ainsi que des stocks de munitions très importants. Notre armée utilise beaucoup le renseignement et tente de piéger l'adversaire. Nous ne voulons pas que nos soldats meurent, donc nous tentons d'utiliser nos têtes pour l'emporter", a admis Vitaly Kim, expliquant qu'il faudra sans doute beaucoup de temps pour que cette offensive porte ses fruits.

>> Les déclarations de Vitaly Kim dans La Matinale :

La ville ukrainienne de Mykolaïev continue d'être bombardée par les forces russes [RTS - Maurine Mercier]RTS - Maurine Mercier
Cela fait désormais une semaine que l'armée ukrainienne a lancé sa contre-offensive / Reportage à Mykolaïev / La Matinale / 1 min. / le 7 septembre 2022

Des attaques quotidiennes

A Mykolaïv, située à 30 kilomètres de la ligne du front sud, l'armée russe poursuit ses bombardements quotidiens. Dimanche, deux roquettes sont tombées sur une usine et une école sans élèves, probablement occupée par les troupes ukrainiennes. Les alertes aériennes sont incessantes dans la ville.

Des roquettes russes ont visé une école de la ville de Mykolaïv, en Ukraine, dimanche 4 septembre, et ont détruit des maisons situés en face de l'établissement. [RTS - Maurine Mercier]
Des roquettes russes ont visé une école de la ville de Mykolaïv, en Ukraine, dimanche 4 septembre, et ont détruit des maisons situés en face de l'établissement. [RTS - Maurine Mercier]

Malgré les attaques et la fuite de la moitié des habitants, des dizaines de familles se sont réfugiées dans des garages de la ville, abandonnant leurs villages alentours, désormais près de la ligne de front.

"On ne se sent pas en sécurité ici", raconte, Igor, père de famille qui a trouvé refuge dans un garage insalubre de Mykolaïv avec sa femme et ses trois enfants. Pour combattre l'humidité qui ronge les murs de la pièce, l'homme a installé un petit poêle. La famille tente de se préparer pour l'hiver dans ces quelques mètres carrés où des couchettes de fortune ont été installées au mur.

Igor et son fils dans un garage de Mykolaïv, en Ukraine. Ils s'y sont réfugiés avec leur famille après avoir fui leur village, désormais sur la ligne de front sud. [RTS - Maurine Mercier]
Igor et son fils dans un garage de Mykolaïv, en Ukraine. Ils s'y sont réfugiés avec leur famille après avoir fui leur village, désormais sur la ligne de front sud. [RTS - Maurine Mercier]

Comme pour tous les réfugiés, les difficultés économiques les rattrapent désormais. "Nous n'avons presque plus de revenus. Maintenant, nous tentons de vendre des produits", sans grand succès, relate Igor.

Il sait que malgré la contre-offensive ukrainienne, sa famille et lui ne retrouveront jamais leur village. "Il faudra dans le meilleur des cas des années pour que la situation se stabilise. Pas le choix, il nous faut rebondir ici."

>> Le reportage du 12h30 dans la maison de fortune d'Igor, à Mykolaïv :

Le garage dans lequel Igor et sa famille se sont réfugiés à Mykolaïv. [RTS - Maurine Mercier]RTS - Maurine Mercier
Reportage en Ukraine parmi les familles réfugiées dans des garages / Le 12h30 / 2 min. / le 7 septembre 2022

Persistance d'un sentiment prorusse

La défense de cette ville bombardée est rendue complexe par le fait qu'une partie de la population est prorusse. Avec la chute de l'Union soviétique, beaucoup d'habitants de Mykolaïv ont perdu leur travail et n'en ont jamais retrouvé. La perspective de "redevenir" russe apparaît ainsi comme un nouveau souffle, économiquement parlant. Certaines personnes collaborent avec les forces russes et leur donnent des indications qui permettent les bombardements dans la ville.

>> Le point de situation :

Au coeur de la contre-offensive ukrainienne
Au coeur de la contre-offensive ukrainienne / Forum / 2 min. / le 6 septembre 2022

ZAPORIJJIA – Une contre-offensive qui renforce l'instabilité

Pour la première fois, une centrale nucléaire se retrouve au milieu d'un conflit armé majeur. Alors que le site de Zaporijjia a été bombardé à nouveau mercredi soir, selon l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), la Russie et l'Ukraine continuent de s'accuser mutuellement de ces attaques, sans que l'on arrive à déterminer clairement les responsables.

Des consignes sur l'utilisation des pastilles d'iode sont partagées aux habitants de Zaporijjia, qui se préparent à l'éventualité d'un accident nucléaire. [RTS - Maurine Mercier]
Des consignes sur l'utilisation des pastilles d'iode sont partagées aux habitants de Zaporijjia, qui se préparent à l'éventualité d'un accident nucléaire. [RTS - Maurine Mercier]

Dans un rapport rendu cette semaine décrivant une situation intenable sur le site, des experts de l'AIEA qui se sont rendus sur place appellent à l'arrêt des bombardements près de la centrale, ainsi qu'à la création immédiate d'une "zone de sécurité" pour prévenir tout accident nucléaire.

La Russie a demandé des explications à la suite de la publication du texte. Moscou estime que l'Ukraine est coupable des attaques sur la centrale et souhaite le voir écrit. Kiev se félicite quant à elle que le rapport mentionne la présence de troupes russes sur le site. Elle se désole en revanche que le rapport n'ait pas fait avancer la situation.

Des bombardements constants

Les experts de l'AIEA ont obtenu des parties en conflit de rester sur le site. Mais leur présence ne calme en rien les esprits. A Energhodar, ville où se trouve la centrale, "il y a des explosions tous les jours", témoigne Lida, une habitante dont le mari travaille sur le site nucléaire. Elle espérait qu'avec l'arrivée de inspecteurs de l'agence internationale, les bombardements diminueraient. Or, c'est tout l'inverse.

Son mari, comme environ 8000 autres Ukrainiens exerçant dans la centrale de Zaporijjia, doit désormais travailler sous la pression des occupants russes, qui les empêchent de fuir. Il décrit à Lida un site en ruines, où toutes les vitres ont été soufflées par des explosions et où traînent partout des débris, des roquettes et des obus.

>> Le témoignage de Lida dans La Matinale :

Les bombardements près de la centrale de Zaporijjia ont causé des dommages. [Keystone - EPA/Yuri Kochetkov]Keystone - EPA/Yuri Kochetkov
Témoignage de la femme de l'un des employés de la centrale nucléaire de Zaporijjia, en Ukraine / La Matinale / 2 min. / le 5 septembre 2022

Préparation au pire

Dans ce contexte de grande instabilité, le département sanitaire de la région de Zaporijjia se prépare à un plan d’action qui permettra, en cas d'accident nucléaire, de protéger tant bien que mal la centaine de milliers d’habitants de cette zone. Celles et ceux vivant dans un périmètre de 50 kilomètres et ayant moins de 40 ans devront prendre une pilule d’iode. Au-delà de cet âge, la pastille pourrait avoir des effets contre-productifs, selon les spécialistes.

Les autorités se veulent rassurantes: il y aura de l'iode pour toutes les personnes qui en auront besoin. Mais la réalité n’est pas aussi évidente et le doute est présent jusque dans les pharmacies. Certaines affirment qu'elles n’ont plus d’iode depuis trois mois.

Une femme vient chercher des pilules d'iode pour elle et ses enfants dans un centre de distribution de Zaporijjia. [RTS - Maurine Mercier]
Une femme vient chercher des pilules d'iode pour ses enfants et elle dans un centre de distribution de Zaporijjia. [RTS - Maurine Mercier]

A Zaporijjia, la question de la responsabilité des bombardements est également sensible. Personne ne souhaite y répondre au micro. A l'heure actuelle, il est difficile de trancher clairement, car l’accès aux deux camps à Energhodar, là où se trouve la centrale nucléaire, est impossible. La population de la région ne sait elle-même pas où donner de la tête. Elle a appris à se méfier du pouvoir en place, tout en restant sur la réserve, car les nombreux morts la retiennent de douter publiquement des propos des autorités.

Beaucoup de personnes estiment aussi que la propagande ukrainienne est trop présente, bien qu'elles comprennent son utilité pour lutter contre la propagande russe. Mais devoir s’inquiéter d’un accident nucléaire en doutant des autorités, tout en devant se contenir, ajoute une incertitude à l'angoisse.

>> Le reportage de Tout un monde à Zaporijjia :

La centrale nucléaire de Zaporijia. [Keystone/EPA - Yuri Kochetkov]Keystone/EPA - Yuri Kochetkov
Zaporijia se prépare au pire / Tout un monde / 8 min. / le 8 septembre 2022

Sujets radio: Maurine Mercier

Sujet TV: Tristan Dessert

Adaptation web: Isabel Ares

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Odessa, un havre du sud de l'Ukraine épargné par les combats

Alors que les combats font rage dans la région de Kherson, sur le front sud en Ukraine, la grande ville d'Odessa, située au bord de la mer Noire, vit presque dans l'insouciance. Mais la réalité de la guerre n’est jamais loin.

Les habitants du sud de la ville profitent des derniers jours de l'été à la plage, malgré l'interdiction d'accès imposée en raison du risque de dérive des mines sous-marines. "Je sais qu'il y a un petit danger, mais on espère que tout cela sera bientôt fini et que l'Ukraine vaincra", se rassure un habitant, mercredi dans le 19h30.

Des hôtels au bord de mer accueillent des familles qui ont fui les zones de combats. "Quand on est parti, on voyait et on entendait les tirs de missiles. On est arrivé à Odessa et les gens se promenaient comme si de rien n'était", témoigne Irina, qui a fui Kherson avec son mari et ses enfants. "Mais on reste très tendu. Nous avons peur", ajoute-t-elle.

>> Le reportage du 19h30 à Odessa :

En Ukraine, la ville d'Odessa au bord de la Mer Noire vit presque dans l'insouciance, mais la guerre n'est jamais loin.
En Ukraine, la ville d'Odessa au bord de la Mer Noire vit presque dans l'insouciance, mais la guerre n'est jamais loin. / 19h30 / 2 min. / le 7 septembre 2022

Envoyé spécial de la RTS en Ukraine, le journaliste Tristan Dessert décrit un espoir "très prudent" au sein de la population ukrainienne vis-à-vis de la contre-offensive lancée par Kiev. "La communication de l'armée est très limitée, voire inexistante", souligne-t-il.

Les forces ukrainiennes progressent néanmoins bel et bien dans les régions de Mykolaïv et de Kherson. Mais ces avancées sont difficiles. La contre-offensive a un coût important et fait de nombreux blessés, rapporte encore le journaliste.

>> Les précisions de Tristan Dessert dans le 19h30 :

Tristan Dessert, envoyé spécial en Ukraine, décrit la situation sur place, notamment la contre-offensive de l'armée ukrainienne.
Tristan Dessert, envoyé spécial en Ukraine, décrit la situation sur place, notamment la contre-offensive de l'armée ukrainienne. / 19h30 / 1 min. / le 7 septembre 2022