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Nago Humbert, fondateur de Médecins du monde Suisse: "Il faut démystifier l'humanitaire"

Nago Humbert. [RTS - Jean-Marc Nyffeler]
Faut-il décoloniser l'aide humanitaire? Interview de Nago Humbert / Forum / 6 min. / le 17 septembre 2022
Le fondateur de Médecins du monde Suisse Nago Humbert était invité samedi dans Forum pour s'exprimer sur les enjeux de la décolonisation de l'aide humanitaire. Pour lui, les perceptions dans ce domaine doivent changer.

Alors que les critiques envers l'humanitaire ont toujours existé, la notion de décolonisation est discutée depuis quelques années concernant l'aide humanitaire. Mais cette volonté de décoloniser -ou "désoccidentaliser" comme Nago Humbert préfère l'appeler - les pratiques n'est pas toujours bien perçue.

"Nous sommes dans un domaine où l'autocritique n'est pas très forte et la critique difficilement acceptée, parce que tout est basé sur le bien. Et on ne peut pas critiquer le bien", constate le directeur de l'Observatoire Ethique et Santé Humanitaire, et fondateur de Médecins du monde Suisse, samedi dans Forum.

Il appelle à démystifier l'aide humanitaire: "Pour moi, l'humanitaire n'existe pas. Ce sont simplement des hommes et des femmes qui ont des expertises et qui essaient de les transmettre de temps en temps."

Modifier les perspectives

Des réflexions sur la décolonisation des pratiques humanitaires sont en cours dans le milieu, selon Nago Humbert. Mais il existe encore "peu de relations entre les organismes humanitaires et les universités", regrette-t-il.

Pour le directeur, il est essentiel de changer les perspectives. Cela passe notamment par les visuels utilisés dans les campagnes des organismes.

"La perception de l'image est extrêmement importante dans le domaine humanitaire", souligne-t-il. "La victimisation de ceux qui doivent recevoir de l'aide est pénible pour ces derniers", car dans ce type d'imagerie, la victime est dépeinte comme dépendante.

Nago Humbert assure également que les contre-témoignages doivent être développés et davantage partagés. "Il faut donner la parole à ceux qui ont subi ou reçu une aide", estime-t-il, afin de questionner les actions humanitaires, qui n'ont pas toujours des conséquences positives.

Propos recueillis par Tania Sazpinar/iar

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