Sandrine Rousseau: "Ce n'est pas parce qu'on aime sa voiture, qu'on peut négocier avec le climat"
La députée EELV (Europe Ecologie - Les Verts) Sandrine Rousseau est, sans doute, la personnalité qui marque le plus la rentrée politique française. Cet été, elle a, par exemple, estimé qu'il fallait "changer de mentalité pour que manger une entrecôte cuite sur un barbecue ne soit plus un symbole de virilité", déclenchant la polémique sur les réseaux sociaux.
Face à l'urgence climatique, elle considère qu'il n'est plus possible d'utiliser "les mots et la manière de faire d'avant". "Il nous faut trouver des voies et des moyens pour faire bouger cette société qui a très peur du changement climatique", déclare-t-elle, mercredi dans La Matinale de la RTS.
Elle assume donc une forme de radicalité dans ses propos. "La radicalité que je porte vient de milieux militants, de la recherche. Elle est fondée. Ce n'est pas une radicalité pour le jeu ou le plaisir."
La radicalité que je porte vient de milieux militants, de la recherche. Elle est fondée. Ce n'est pas une radicalité pour le jeu ou le plaisir
Et d'ajouter: "Cet été, les catastrophes naturelles se sont succédé en France. On ne peut plus faire comme si cela n'existait pas. On doit agir rapidement." Sandrine Rousseau explique vouloir mettre en avant, dans le débat politique, "des choses qui ne sont pas dites, pas pensées et pas conscientisées".
Appel à un changement de culture
Contrairement à l'Allemagne, les écologistes français ne sont pas au pouvoir. Cela s'explique, selon Sandrine Rousseau, par le fait que l'écologie française "a essayé de se conformer au système, d'être plus policée".
"La ligne allemande a été suivie par Yannick Jadot lors de la dernière élection présidentelle. Cela n'a pas donné de résultats flagrants et importants (il a obtenu 4,63% des suffrages, n.d.l.r.). Aujourd'hui, nous n'avons plus le choix. Nous devons gagner. Et pour gagner, nous devons faire en sorte que la société s'interroge sur ses propres fondamentaux", analyse-t-elle.
La députée EELV appelle donc à un changement de culture: "Ce n'est pas parce qu'on aime sa voiture, qu'on peut négocier avec le climat. (...) Peu de civilisations ont dû faire des choix aussi cruciaux en temps de paix."
"Ce n'est pas la faute des féministes"
La rentrée politique française a aussi été marquée par deux affaires de violences à l'égard des femmes de la part de deux responsables politiques à gauche.
La députée et finaliste de la primaire écologiste Sandrine Rousseau a rapporté, lundi sur France 5, avoir reçu chez elle une femme accusant le secrétaire national d'EELV Julien Bayou de "comportements de nature à briser la santé morale des femmes". Mardi soir, après des heures d'hésitation, le bureau du groupe écologiste à l'Assemblée nationale a décidé de suspendre Julien Bayou de ses fonctions de coprésident.
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"Dans la politique française, il manque des cellules qui mènent des enquêtes indépendantes, autonomes, objectives et sérieuses, estime-t-elle. Je salue les partis de gauche qui font un effort très conséquent pour que les comportements vis-à-vis des femmes soient étudiés de près et que des mesures soient prises."
Sandrine Rousseau réfute fermement l'idée de profiter de la situation. "C'est scandaleux! déclare-elle. Julien Bayou en avait, lui-même, parlé dans Le Figaro en juillet. C'est toujours quand les féministes parlent des violences que cela devient un problème. Ce n'est jamais la faute des féministes, c'est la faute des violents, d'un système qui les protège et d'une impunité des personnes qui exercent des violences sur les femmes."
"Des années et des années d'impunité"
Elle rappelle que le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin est accusé de viol par deux femmes - une plainte est toujours en cours - et que l'ex-ministre Damien Abad a aussi été accusé de viol par plusieurs femmes. "On a eu des années et des années d'impunité des hommes politiques, lorsqu'ils avaient des comportements déplacés envers les femmes."
On a eu des années et des années d'impunité des hommes politiques, lorsqu'ils avaient des comportements déplacés envers les femmes
Elle donne l'exemple d'un député, lors de la précédente législature, qui avait un bracelet anti-rapprochement. "Nous n'avons jamais réussi à lever son immunité de sorte qu'il soit jugé. Ce n'est pas possible! Il ne peut pas représenter les hommes et les femmes."
La députée EELV observe que "quelque chose de très puissant est en train de se lever" parmi les féministes et les jeunes "pour que le système soit changé en profondeur". Mais elle s'inquiète de la séparation entre un monde militant "extrêmement vivace, fort et radical" et un monde politique qui "rechigne" à porter ce sujet dans l'hémicycle.
Propos recueillis par Frédéric Mamaïs/vajo