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Meloni, Salvini, Berlusconi, Conte, Letta, une course à cinq pour les législatives italiennes

L’extrême droite de Giorgia Meloni est la grande favorite des élections en Italie. Le didactique de Laurent Burkhalter
L’extrême droite de Giorgia Meloni est la grande favorite des élections en Italie. Le didactique de Laurent Burkhalter / 19h30 / 1 min. / le 25 août 2022
Si les sondages se confirment, l'Italie se dotera à l'issue des législatives de dimanche de son gouvernement le plus à droite depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et sera gouvernée pour la première fois par une femme. Mais qui est Giorgia Meloni et qui sont ses principaux adversaires ou alliés?

Placés sous perfusion financière par leurs partenaires européens après une pandémie dévastatrice, les Italiens devraient remettre leur destin entre les mains de Giorgia Meloni, cheffe de Fratelli d'Italia (FdI  / "Frères d'Italie"), formation ultra-conservatrice, identitaire et nationaliste.

Giorgia Meloni est désormais aux portes du Palais Chigi alors que son parti postfasciste avait récolté à peine 4% des voix en 2018, bien loin des 25% dont elle est créditée par les instituts d'opinion.

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Coalition de droite

"La Meloni", comme on l'appelle en Italie, 45 ans, s'est coalisée avec Forza Italia (FI, droite) du magnat octogénaire Silvio Berlusconi, et la Ligue de Matteo Salvini, ancien ministre de l'Intérieur.

Ensemble, ils pourraient obtenir la majorité absolue des sièges à la Chambre des députés et au Sénat avec une avance confortable sur le Parti démocrate (PD) d'Enrico Letta, qui a échoué à faire l'unité au centre et à gauche.

Les sondages étant interdits dans les deux semaines précédant le scrutin, les dernières enquêtes publiées font foi. FDI est crédité de 24 à 25% des intentions de vote, devant le PD entre 21 et 22%. Suivent le Mouvement 5 Etoiles (ex-antisystème) de 13 à 15%, la Ligue à 12%, FI à 8%.

La coalition droite/extrême droite pourrait rafler entre 45% et 55% des sièges au Parlement.

Des facteurs d'incertitudes

Facteur clé de ce scrutin, le taux de participation devrait descendre à un niveau historiquement bas, en deçà des 70%.

Une autre source d'incertitudes réside dans les conséquences de la réforme électorale qui a réduit le nombre de députés de 630 à 400 et celui des sénateurs de 315 à 200.

Les bureaux de vote ouvriront dimanche à 7h00 et fermeront à 23h00. Les résultats complets ne sont pas attendus avant lundi matin.

- LES PRINCIPALES FORCES EN PRESENCE -

Fratelli d'ItaliaGiorgia Meloni

Favorite pour devenir la première femme chef de gouvernement de l'histoire de l'Italie, Giorgia Meloni, présidente du parti Fratelli d'Italia (FDI), incarne un mouvement à l'ADN post-fasciste qu'elle s'efforce de "dédiaboliser" pour accéder enfin au pouvoir.

Nommée ministre pour la Jeunesse dans le gouvernement de Silvio Berlusconi en 2008, à 31 ans, elle fonde en 2012 son propre parti, Fratelli d'Italia.

Cette Romaine de 45 ans est parvenue depuis à catalyser sur son nom les mécontentements et frustrations des nombreux Italiens se disant excédés par les "diktat" de Bruxelles, la vie chère et l'avenir précaire de leurs enfants. Concernant la guerre en Ukraine, elle affiche depuis le début un soutien sans faille à Kiev.

Sa devise? "Dieu, patrie, famille". Ses priorités? Fermer les frontières pour protéger l'Italie de "l'islamisation", renégocier les traités européens pour que Rome reprenne le contrôle de son destin, lutter contre les "lobbys LGBT" et "l'hiver démographique" du pays, dont la moyenne d'âge est la plus élevée du monde industrialisé juste derrière le Japon.

Giorgia Meloni et son parti sont les héritiers du Mouvement social italien (MSI), parti néofasciste créé après la Seconde Guerre mondiale.

A 19 ans, elle affirme à la chaîne française France 3 que le dictateur Benito Mussolini était "un bon politicien". Elle reconnaît encore aujourd'hui à Mussolini d'avoir "beaucoup accompli", sans l'exonérer de ses "erreurs": les lois antijuives, l'entrée en guerre, l'autoritarisme. Et de clarifier: dans ses rangs, "il n'y a pas de place pour les nostalgiques du fascisme, ni pour le racisme et l'antisémitisme".

>> Revoir le portrait de Giorgia Meloni dans le 19h30 :

Italie: Giorgia Meloni, icône de la droite conservatrice, veut devenir la première femme présidente du Conseil italien
Italie: Giorgia Meloni, icône de la droite conservatrice, veut devenir la première femme présidente du Conseil italien / 19h30 / 2 min. / le 11 août 2022

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Forza Italia Silvio Berlusconi

A presque 86 ans, l'ancien chef du gouvernement (1994-95, 2001-06, 2008-11) Silvio Berlusconi fait activement campagne. Son parti Forza Italia n'est crédité que de 8% des intentions de vote, mais il n'en a cure: "Je suis le numéro un depuis toujours", proclame-t-il en souriant sur TikTok, le réseau social des jeunes générations.

Celui qui se présente comme un garant de modération pro-européen et atlantiste est cette fois-ci candidat pour un siège au Sénat, dont il avait été chassé en 2013 après une condamnation pour fraude fiscale.

Parmi les promesses de la coalition de droite, figure une réforme judiciaire, notamment pour "mettre fin aux procès médiatiques", une préoccupation de longue date de Silvio Berlusconi.

>> Revoir le reportage du 19h30 sur le retour politique de Silvio Berlusconi :

Silvio Berlusconi joue son retour politique aux prochaines législatives italiennes
Silvio Berlusconi joue son retour politique aux prochaines législatives italiennes / 19h30 / 2 min. / le 21 septembre 2022

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Lega Matteo Salvini

Populiste assumé, Matteo Salvini, est crédité d'avoir fait de la Ligue un parti de gouvernement. Il a été ministre de l'Intérieur du gouvernement Conte (2018-2019).

Celui qui jouait les faiseurs de roi n'est plus aujourd'hui qu'une force d'appoint au sein de la coalition de la droite et de l'extrême droite dominée par le parti d'Italia de Giorgia Meloni.

Une chute vertigineuse par rapport au dernier scrutin de 2018 pour la Ligue, dont l'électorat a préféré se tourner vers Giorgia Meloni, qui a fait le pari gagnant d'être le seul parti à refuser de soutenir le gouvernement sortant d'unité nationale de Mario Draghi.

Tout comme Meloni, Salvini défend pourtant une plateforme nationaliste, eurosceptique et anti-migrants. Parmi les priorités affichées : endiguer la flambée des prix de l'énergie et développer le nucléaire civil, ou réduire et de simplifier les impôts,

Mais ses participations aux divers gouvernements qui se sont succédé depuis 2018 ont déçu nombre de ses partisans. Après s'être allié aux populistes du Mouvement 5 Étoiles, il les a lâchés en plein été un an plus tard, avant d'accepter en 2021 de soutenir le gouvernement Draghi.

Matteo Salvini s'est aussi retrouvé en difficulté pour ses prises de position passées en faveur de la Russie de Vladimir Poutine. Les photos le montrant avec un T-shirt à l'effigie du président russe ou ses récentes critiques contre les sanctions adoptées après l'invasion en Ukraine, jugées inefficaces, ont déplu.

Movimento 5 StelleGiuseppe Conte

Giuseppe Conte, leader du Mouvement 5 Etoiles (ex-antisystème) et ancien chef du gouvernement (en deux actes de 2018 à 2021) qui se présentait comme "avocat du peuple", est devenu depuis le tombeur de Mario Draghi.

Il avait le premier retiré en juillet une pierre à l'édifice du gouvernement d'unité nationale construit par Mario Draghi en refusant de lui voter la confiance. Arrivé au pouvoir en février 2021, l'ancien gouverneur de la Banque centrale européenne a démissionné en juillet.

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Le Parti démocrate (PD, centre-gauche), son partenaire dans le gouvernement Conte II, a refusé une alliance électorale avec le M5S, coupable d'avoir précipité la chute du gouvernement Draghi que le PD soutenait fortement.

Giuseppe Conte a arpenté la péninsule pour défendre le programme du M5S: arrêt des envois d'armes à l'Ukraine, lutte contre la corruption et le changement climatique, augmentation de la dette du pays pour affronter l'inflation qui touche ménages et entreprises. Il s'engage à préserver le système de protection sociale en faveur des moins aisés.

Le M5S est crédité de seulement 13% des intentions de vote contre plus de 32% lors du scrutin précédent de 2018.

Partito DemocraticoEnrico Letta

Europhile fervent issu de la démocratie chrétienne, l'ancien chef de gouvernement italien (2013-2014) Enrico Letta, du Parti démocrate (PD, centre gauche), fait tout pour barrer la route à l'extrême droite lors de ces législatives.

Enrico Letta se présente en garant d'une Italie plus que jamais ancrée en Europe, un argument de poids après l'octroi par l'UE de près de 200 milliards d'euros d'aide à l'Italie pour relancer son économie après la pandémie.

Ce juriste est toutefois donné perdant par les sondages. Comme allié, le PD n'emmène qu'un modeste parti de la gauche écologiste. Le parti a refusé une alliance électorale avec le M5S, coupable d'avoir précipité la chute du gouvernement Draghi que le PD soutenait fortement.

Il compte sur les 20% d'indécis: "Si nous arrivons à mobiliser 10% d'entre eux, nous gagnerons les élections", assurait Enrico Letta dans un entretien à l'afp fin août.

Le Parti démocrate s'efforce de présenter Giorgia Meloni comme l'héritière du néofascisme et de mettre en cause sa proximité avec le Premier ministre hongrois Viktor Orban.

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cab avec les agences

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