Les attaques possibles
Pour James Cameron, du Oslo Nuclear Project, il est "très peu probable que Vladimir Poutine utilise l'arsenal russe d'armes nucléaires stratégiques, capables de frapper les Etats-Unis, au risque de déclencher une guerre nucléaire apocalyptique".
Mais la Russie, première puissance nucléaire au monde avec un stock de près de 4500 têtes nucléaires, selon les estimations de l'institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI), dispose d'armes nucléaires dites "tactiques", d'une puissance inférieure à la bombe d'Hiroshima.
Conformément à la doctrine nucléaire russe d'"escalade et désescalade", qui consisterait à faire usage en premier lieu d'une arme nucléaire de faible puissance pour reprendre l'avantage en cas de conflit conventionnel avec les Occidentaux, le président russe pourrait décider de faire exploser une de ces "petites" armes nucléaires dans l'espace aérien ukrainien ou en mer Noire.
Il pourrait aussi viser une zone peu peuplée de l'Ukraine ou une installation militaire ukrainienne, dans l'espoir de terroriser la population et inciter l'Ukraine à capituler, voire inciter les Occidentaux à convaincre l'Ukraine de capituler, explique cet expert dans les colonnes du Washington Post.
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Les causes possibles
Le maître du Kremlin a indiqué qu'il pourrait recourir à l'arme nucléaire si l'intégrité territoriale de la Russie était menacée. Il n'a pas précisé si cela comprenait la Crimée, que la Russie a annexée en 2014, ou les quatre territoires ukrainiens en partie contrôlés par l'armée russe depuis son invasion, où des référendums sont organisés en hâte en vue d'un rattachement à la Russie.
Pour Mark Cancian, un ancien spécialiste de stratégie nucléaire au sein de la marine américaine, cette ambiguïté signifie que cela ne couvre pas le Donbass et la Crimée. "Cela ne sert à rien de lancer une menace aussi vague, si les gens ne sont pas sûrs si vous les menacez vraiment ou pas", explique Mark Cancian, aujourd'hui expert au Center for Strategic and International Studies (CSIS).
Jusqu'ici, le gouvernement américain n'a observé aucun mouvement d'armes nucléaires qui puisse suggérer qu'une telle frappe est en préparation. "Nous n'avons rien vu susceptible de modifier notre posture", a indiqué jeudi le porte-parole du Pentagone, le général Pat Ryder.
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Les réponses possibles
Le gouvernement américain s'efforce depuis le début du conflit en Ukraine d'éviter toute escalade: les forces de l'Otan ne combattent pas en Ukraine et les armements fournis par les alliés de Kiev aux forces ukrainiennes sont calibrés pour éviter qu'une bombe occidentale ne frappe une cible en territoire russe.
Dans le même esprit, le gouvernement américain a envoyé plusieurs messages privés aux dirigeants russes ces derniers mois pour les dissuader de faire usage de l'arme nucléaire, selon le Washington Post. Mais Washington doit faire preuve de fermeté, même si Moscou choisit une frappe limitée en Ukraine, qui n'est pas membre de l'Otan.
Ne pas répondre suffisamment fermement risquerait de diviser les alliés, mais pourrait surtout, selon Matthew Kroenig, du Scowcroft Center for Strategy and Security, inciter d'autres pays, comme la Chine, à "penser que l'arme nucléaire peut les aider à atteindre leurs objectifs sans répercussions graves".
Matthew Kroenig, ancien conseiller stratégique du Pentagone et de la CIA sous plusieurs administrations, a suggéré que les Etats-Unis répliquent par une frappe conventionnelle sur les forces ou la base militaire russe à l'origine de la frappe nucléaire et par une aide militaire renforcée à l'Ukraine, avec, par exemple, des systèmes d'artillerie à longue portée que Washington s'est jusqu'ici abstenu de fournir à Kiev.
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jfe avec agences