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Le rôle de la Biélorussie dans la guerre d'Ukraine

Le journaliste indépendant biélorusse Andreï Vaitovich. [Creative Commons Wikipedia - Andreï Vaitovich]
Le rôle de la Biélorussie dans la guerre d'Ukraine: interview d'Andreï Vaitovich / Tout un monde / 8 min. / le 17 octobre 2022
Alexandre Loukachenko, proche allié de Vladimir Poutine, a annoncé la semaine dernière le déploiement d'une force militaire conjointe russe et biélorusse en raison de l'aggravation des tensions sur sa frontière occidentale. Retour sur le rôle de la Biélorussie dans ce conflit.

Depuis le début de l'invasion en Ukraine, la Biélorussie a régulièrement servi de base arrière pour les troupes russes. Les deux pays veulent désormais créer un "groupe d'armées commun régional" pour faire face, disent-ils, à la menace d'une attaque ukrainienne contre la Russie.

Si un tel groupe régional existe en fait depuis la fin des années 90, il n'était pas très connu, selon le journaliste franco-biélorusse Andreï Vaitovich. "Le groupement régional est dirigé et contrôlé par les militaires biélorusses. Il y a 10'000 militaires qui seront mobilisé du côté biélorusse et 9000 Russes sont attendus en Biélorussie. Ils seront donc basés et entraînés en Biélorussie", détaille-t-il.

Pour le journaliste, le rôle de la Biélorussie dépendra du choix de scénario que fera le régime d'Alexandre Loukachenko. Le président pourrait, par exemple, décider de faire entrer les militaires en Ukraine par le sud du pays ou encore d'entraîner uniquement les militaires qui seront ensuite envoyés par la Russie dans le Donbass.

"Alexandre Loukachenko n'a pas d'autre choix que de suivre"

"Des activistes sur place nous préviennent des mouvements des troupes russes. Ils ont déjà annoncé que la composante aérienne du groupement régional est arrivée sur place", précise Andreï Vaitovich.

Selon lui, bien que la Biélorussie organise des exercices militaires du groupe régional tous les ans, son armée ne serait pas capable de joindre l'offensive en Ukraine sans l'aide russe.

De son côté, la Russie semble souffrir et manquer de moyens. "Depuis plusieurs jours, la Biélorussie envoie du matériel militaire, notamment de vieux chars T72, des camions ruraux ou encore des masques. C'est du matériel ancien mais la Russie le demande et Alexandre Loukachenko n'a pas d'autre choix que de suivre", souligne le journaliste.

Risque de mobilisation

Toutefois, une mobilisation en Biélorussie, qu'elle soit générale ou partielle, ne semble pas être prévue pour l'instant. "La population biélorusse dans sa majorité ne soutient pas la guerre. Même les personnes proches du régime sont inquiètes", explique-t-il.

Avant d'ajouter qu'un média biélorusse en exil aurait révélé "qu'il y aura une mobilisation secrète. Les autorités vont annoncer des préparations et des tests au combat en commençant par de petites villes pour éviter un soulèvement de la population. On parle de 70'000 militaires, ce qui est beaucoup pour un pays où 300'000 personnes sont mobilisables".

Si ces annonces sont suivies avec attention, Andreï Vaitovich reste positif. Il ne pense pas que la population biélorusse qui se bat depuis deux ans contre son gouvernement va se porter volontaire.

Une telle mobilisation déstabiliserait d'autant plus le gouvernement d'Alexandre Loukachenko qui n'est pas reconnu par l'Union européenne et qui est sanctionné plus fortement que la Russie depuis deux ans.

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Propos recueillis par Eric Guevara-Frey
Adaptation web: Andreia Portinha Saraiva

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