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Polémique autour des messages d'alerte du site Booking.com pour les zones à risque

Booking, Hotels.com... comment ces plateformes font-elles pour nous faire croire qu'il n'y a pas d'alternative à leur utilisation? [Keystone - Gaetan Bally]
Quand les plateformes de réservation s’aventurent sur les terrains politiquement sensibles / Tout un monde / 5 min. / le 21 octobre 2022
En réservant un logement de vacances sur le site Booking.com, un petit message d'alerte pourrait apparaître, expliquant que la destination choisie est considérée comme une zone à risque. Booking.com a décidé d’inclure ces notifications pour 30 zones du monde, dont la Cisjordanie, une décision polémique.

La question de la définition d'une zone à risque est en effet politiquement sensible. Le contenu du message d'alerte pour les réservations en Cisjordanie a d'ailleurs mis le feu aux poudres. En septembre, le gouvernement israélien apprend que Booking.com souhaite y intégrer la notion de "droits de l’Homme" et le mot "occupé".

Le ministre du Tourisme du pays a immédiatement réagi: Yoel Razvozov nie la dangerosité de la région, écrit à Booking.com et menace la plateforme d’une "guerre diplomatique" en raison de cette décision jugée "politique" compte tenu de la controverse sur les territoires palestiniens.

La plateforme néerlandaise a en partie rétropédalé. La bannière a été mise en ligne début octobre mais elle ne contient ni la mention "droits de l’Homme" ni "occupé". Ce revirement rappelle la situation vécue en 2018 par un autre géant du voyage en ligne: AirBnb. Le site de location d’appartement annonçait qu’il retirait ses offres de logements se trouvant en Cisjordanie, avant de faire marche arrière.

Contacté par l'émission Tout un monde, Booking.com n’a pas souhaité expliquer les raisons de son rétropédalage. L'entreprise a toutefois indiqué avoir introduit ces messages d’alerte "en l’absence de toute influence ou motivation politique, puisqu’elle ne prend position dans aucun des conflits".

Critiques d'Amnesty International

En 2019, Amnesty International déplorait déjà cette absence de position. Dans son rapport Destination Occupation, l’organisation appelait les géants du voyage en ligne à cesser de fournir des logements dans les territoires occupés. Aujourd’hui, le constat est toujours le même.

Interrogé dans l'émission Forum de la RTS, Danièle Gosteli Hauser, responsable économie et droits humains pour la section suisse d’Amnesty International, explique qu'il "s’agit d’évaluer pour une entreprise quel impact elles peuvent avoir en matière de droits humains là où elles investissent. (...) Même une évaluation élémentaire qui aurait été réalisée par ces entreprises aurait révélé que leurs activités commerciales (...) contribuaient inévitablement à faire perdurer cette situation illégale et un régime qui est discriminatoire et abusif à l’égard des droits des Palestiniens".

Pour lui, Booking.com ne prend pas ses responsabilités. "Cette responsabilité est donné par un cadre international adopté à l’ONU en 2011. Il s’agit des principes directeurs de l’ONU sur les entreprises et les droits humains. Il y est établi que les entreprises doivent respecter le droit international humanitaire et relatif aux droits humains (...). Donc si ces entreprises ne retirent pas leur offre dans les territoire palestiniens occupés, elles violent (...) les normes internationales qui sont relatives aux droits humains".

Le Premier ministre israélien Yair Lapid s’est quant à lui félicité du rétropédalage de Booking. L’ambassade israélienne en Suisse a néanmoins refusé d'accorder une interview à la RTS. Elle a simplement transmis la déclaration officielle du gouvernement israélien, qui se dit heureux qu'un "dialogue productif avec la société Booking.com ait abouti au résultat souhaité par les deux parties."

Incohérences chez Booking.com?

Lorsqu'il est demandé à Booking.com comment la décision d'opérer dans une zone ou non est prise, l'entreprise renvoie vers les documents de Booking Holdings, le groupe auquel il appartient. On y trouve le code de conduite de l’entreprise, dans lequel elle s’engage à "respecter et à promouvoir les droits de l’Homme où qu’ils soient en activité".

A l’intérieur de ces documents se trouve aussi une liste des activités que Booking Holdings considère comme des violations des droits humains. Parmi elles, "le déni du droit à la propriété et l'accaparement des terres". Finalement, pour les sites situés dans des territoires contestés ou occupés, la plateforme s’engage à mener "une diligence raisonnable renforcée" pour les offres proposées.

Selon Amnesty, le site néerlandais ne respecte ni les principes directeurs de l’ONU, ni son code de conduite interne. Malgré cette polémique, la plateforme de voyage en ligne confirme: elle continuera d’ajouter ces messages dans d’autres zones du monde ces prochains mois.

Sujet radio: Mathilde Salamin

Adaptation web: Julien Furrer

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