Ces travailleurs venus du Népal, du Bangladesh et plus récemment d’Afrique sont logés dans des "labor camps" loués par leurs employeurs: des camps surpeuplés, situés dans des zones à l’extérieur de Doha.
Les ouvriers sont sous étroite surveillance, cernés de hauts murs, de grillages, de vigiles et de caméras. La plupart touchent un salaire qui tourne autour de 260 francs par mois.
A 16 dans 50 m2
Mise au Point a pu entrer dans deux camps. Dans le premier, seize travailleurs africains se partagent un appartement d’une cinquantaine de mètres carrés. Les coupures d’électricité et d’eau sont fréquentes et le logement est infesté de cafards et de punaises de lit. "Cet endroit est comme une prison", affirme Issa, un travailleur africain employé comme agent de sécurité dans un hôtel de Doha.
Le second camp, celui d’Abu Nakhla, est situé au sud de la ville de Doha. Dans des chambres de 9 mètres carrés, les travailleurs sont logés par groupe de six. "Il m’arrive de bosser plusieurs mois sans avoir un seul jour de congé. Quand je rentre ici, je ne peux même pas dormir à cause du bruit et de l’agitation incessante. On doit même cuisiner dans la chambre", témoigne un autre travailleur, un Kényan.
50 morts pour la seule année 2020
En 2021, le quotidien britannique the Guardian publiait une enquête intitulée "6500 ouvriers sont morts au Qatar depuis l’attribution de la Coupe du monde". Ces chiffres sont contestés par les autorités qataries, qui reconnaissent 40 décès entre 2014 et 2020.
Selon Max Tunon, directeur du bureau de l'Organisation internationale du travail (OIT) à Doha interrogé par Mise au Point, il y a eu 50 morts, 500 blessés graves et 37'000 blessés légers en lien avec le travail des ouvriers pour la seule année 2020.
Si l’on extrapole ces chiffres sur dix ans, il y aurait donc eu environ 500 morts sur les chantiers de la Coupe du monde. Le directeur de l’OIT refuse toutefois de confirmer ou d’extrapoler ces chiffres. L'OIT n’a en effet pas eu accès à des données précises concernant les années qui précèdent 2020.
Des progrès, mais encore des abus
Selon l’OIT, le Qatar a réalisé d’importants progrès en matière de droit du travail depuis 2010. Max Tunon cite notamment la mise en place d’un salaire minimum (1000 riyals, soit environ 260 francs par mois) mais aussi la suppression partielle du système dit de la Kafala. Ce système instaurait un quasi-droit d’esclavage de l’employeur avec entre autres confiscation du passeport et interdiction pour le travailleur de rentrer au pays.
Malgré ces réformes législatives, les abus continuent au Qatar: 24'000 plaintes de travailleurs ont été enregistrées en 2020 par l'OIT, révèle Max Tunon. Les plaintes concernent des salaires impayés, des logements insalubres et des restrictions à la liberté de mouvement.
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Jérôme Galichet, David Nicole/boi
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