Prévue pour l'exploitation d'un énorme gisement à Echassières, dans l'Allier, au centre de la France, Emili doit devenir l'une des plus grandes mines européennes de lithium. Le gisement, estimé à un million de tonnes d'oxyde de lithium, permettra l'extraction de 34'000 tonnes de ce métal, sous forme d'hydroxyde, pendant 25 ans.
Ce métal alcalin est essentiel à l'industrie des batteries et est appelé à jouer un rôle central dans la transition des voitures thermiques aux véhicules électriques.
La production anticipée de cette mine est loin d'être négligeable: au niveau mondial, la production actuelle de carbonate ou hydroxyde de lithium, les deux éléments utilisés dans les batteries, ne dépasse pas les 450'000 tonnes, selon Imerys.
D'ici 2040, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) prévoit qu'elle soit multipliée par 40.
Le soutien du gouvernement
D'après le groupe français Imerys, cette mine aidera l'Europe à se défaire de sa dépendance quasi complète à l'égard de la Chine pour le lithium nécessaire aux batteries des voitures électriques, censées être les seuls véhicules neufs à pouvoir être vendus dans l'Union européenne à partir de 2035. "Nous allons aider l'Europe à se décarboner", a déclaré son directeur général Alessandro Dazza.
Selon Imerys, la production pourrait permettre d'équiper "l'équivalent de 700'000 véhicules électriques en batteries lithium-ion" par an.
Le projet sera soutenu par le gouvernement français. Il promet de créer, à terme, un millier d'emplois directs et indirects en Auvergne-Rhône-Alpes, sur deux sites.
Un coût environnemental sous-estimé?
Cependant, le projet est d'ores et déjà critiqué par des organisations écologistes. Imerys a annoncé que la mine adopterait un standard international IRMA, en cours d'élaboration, qui vise à réduire les rejets toxiques et minimiser la consommation d'eau. Le transport des roches devrait notamment se faire par canalisation et voie ferrée pour éviter les camions.
Insuffisant, toutefois, pour faire taire les critiques. "Il faut arrêter avec le mythe de la mine propre", s'insurge France nature environnement. "On ne sait pas extraire de la matière du sous-sol de façon propre, car une mine ça implique toujours à côté une grosse usine chimique de transformation."
L'organisation dénonce notamment l'absence de consultations publiques préalable à la mise en place de ce projet.
Sur la dizaine de projets européens d'exploitation de lithium, celui d'Imerys est le deuxième plus important, depuis l'abandon en janvier du projet de Rio Tinto en Serbie. Le projet le plus important est celui de la start-up Vulcan, en Allemagne.
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afp/jop
L'Europe face à ses désirs d'indépendance
Pour Robert Moritz, professeur au Département des sciences de la Terre de l'Université de Genève (UNIGE), cette nouvelle mine ne va pas fondamentalement changer les équilibres dans la course mondiale au lithium. "Il s'agit d'une découverte parmi tant d'autres", a-t-il estimé mardi dans La Matinale.
Les sous-sols européens regorgent de grandes réserves de ce métal. Mais les découvertes sur le continent sont relativement récentes: "L'Europe a longtemps délaissé l'exploration de ses sous-sols et s'est reposée sur l'importation venant de Chine, d'Australie et d'Amérique du Sud", a expliqué le professeur, ajoutant que les Etats européens se rendent désormais compte de la nécessité d'indépendance en matière d'approvisionnement en ressources minérales.
La Suisse ne s'est jusqu'à présent pas montrée active dans le domaine du lithium. Selon Robert Moritz, il existe toutefois un "potentiel à étudier" dans les sources thermales ou les roches dures.