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En Ukraine, "la contre-attaque militaire n'est pas un choix, elle est désormais existentielle"

Interview d'Emine Dzhaparova, vice-ministre ukrainienne des Affaires étrangères
Interview d'Emine Dzhaparova, vice-ministre ukrainienne des Affaires étrangères / 19h30 / 3 min. / le 27 octobre 2022
Alors que l'Ukraine gagne du terrain face à l'invasion russe, Vladimir Poutine accuse l'Occident "d'attiser les flammes de la guerre" en soutenant Kiev. Mais pour la vice-ministre ukrainienne des Affaires étrangères, cette contre-offensive militaire est la seule solution pour éviter que la guerre ne se répande en Europe.

D'après Vladimir Poutine, l'Occident joue un "jeu dangereux et sanglant" en Ukraine, mais devra tôt ou tard entamer des discussions avec la Russie face aux différentes crises systémiques provoquées par le conflit. "La Russie ne défie pas l'Occident, la Russie défend juste son droit à exister", a-t-il ajouté.

>> Le suivi des événements jeudi : Vladimir Poutine accuse l'Occident d'attiser les "flammes de la guerre" en Ukraine

Mais pour la vice-ministre ukrainienne des Affaires étrangères Emine Dzhaparova, l'heure n'est plus à la négociation. Invitée jeudi sur le plateau du 19h30, elle l'affirme: la contre-attaque militaire n'est pas un choix, cette guerre est désormais "existentielle" pour l'Ukraine.

"Soit on se bat et on survit, soit on meurt. Vivre sous la menace du chantage de la Russie, ce n'est pas une option. On ne peut pas se permettre de fatiguer, et la communauté internationale non plus", explique-t-elle.

Les leçons de la Crimée

Ancienne journaliste originaire de Crimée, Emine Dzhaparova a dû quitter sa région lors de son annexion par la Russie en 2014. Elle rappelle que la guerre a démarré à ce moment-là. "Ce 24 février, ce n'était qu'une escalade de l'agression. Je pense qu'on peut en tirer une leçon: tant qu'une agression n'est pas stoppée, elle devient plus grande. C'est la leçon de la Crimée."

Pour elle, il n'y a donc pas de doute: il ne faut plus rien céder à la Russie. "Si la guerre en Ukraine n'est pas contenue, elle se répandra en Europe!"

Vladimir Poutine nous a menti à tous, et nous nous sommes menti à nous-mêmes en pensant que nous pouvions négocier avec lui

Emine Dzhaparova

Interrogée sur les accusations du Kremlin qui prétend que Kiev prépare une "bombe sale", la vice-ministre botte d'abord en touche, rappelant le climat de mensonge que Vladimir Poutine fait régner depuis des années. "Il nous a menti à tous, et nous nous sommes menti à nous-mêmes en pensant que nous pouvions négocier avec lui."

"Donc aujourd'hui, nous pensons qu'il n'est plus nécessaire de répondre aux mensonges russes, parce qu'ils sont absurdes. C'est absurde de penser que l'Ukraine prépare une bombe sale", dit-elle. "Et je pense que la majorité des pays du monde ne croient pas à ces mensonges."

>> Lire à ce sujet : La "bombe sale", un engin qui dissémine poussières radioactives et peur

Se battre pour le retour de la population

Elle rappelle encore que l'Ukraine n'a "jamais voulu la guerre". "Mon pays est dédié à la paix, nous n'avons jamais agressé personne. Nous voulions seulement vivre en indépendance, dans la prospérité de l'Europe et pas dans l'héritage soviétique. Et c'est pour ça que la Russie nous a attaqué."

Nous voulions vivre dans la prospérité de l'Europe et pas dans l'héritage soviétique. C'est pour ça que la Russie nous a attaqué.

Emine Dzhaparova

Elle dénonce encore l'attitude "barbare et cynique" de la Russie, qui fait régner la panique en ciblant les infrastructures énergétiques. "Le but de la Russie avec ces attaques, c'est d'empêcher les Ukrainiens de revenir dans leur pays et d'y vivre", estime-t-elle, rappelant toutefois le message de son président aux millions d'Ukrainiennes et d'Ukrainiens réfugiés dans le monde: "Vous pourrez revenir, nous nous battons pour ça!"

"Nous ne nous battons pas seulement pour notre intégrité territoriale, mais aussi pour permettre à notre peuple de revenir et vivre en tant qu'êtres humains dans un pays où la liberté et les droits humains sont respectés", plaide-t-elle encore.

>> La version intégrale de l'interview:

Propos recueillis par Hannah Schlaepfer
Adaptation web: Pierrik Jordan

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