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Le Brésil retient son souffle en attendant de savoir qui sera son président

Les Brésiliens choisissent leur président au terme d'une campagne ultra-polarisée entre les partisans de Bolsonaro et Lula
Les Brésiliens choisissent leur président au terme d'une campagne ultra-polarisée entre les partisans de Bolsonaro et Lula / 19h30 / 1 min. / le 30 octobre 2022
Plus de 156 millions de Brésiliens et de Brésiliennes étaient appelés aux urnes dimanche pour élire leur président lors d'un scrutin à l'issue très incertaine, après une campagne particulièrement tendue. Depuis la fermeture des bureaux de vote à 21h00 heure suisse, le pays est rivé aux résultats, attendus cette nuit.

Le Brésil était plus que jamais coupé en deux, à l'occasion du deuxième tour de l'élection présidentielle. Les réseaux sociaux ont charrié des torrents de désinformation et les candidats se sont insultés copieusement devant des dizaines de millions de téléspectateurs.

Des Brésiliens et Brésiliennes souvent pressés "qu'on en finisse" se sont rendus aux urnes dès 08h00 locales (12h00 en Suisse) dans ce pays aux dimensions continentales.

Les bureaux de vote ont fermé à 17h00 (21h00 heure suisse) et le Brésil retient depuis son souffle dans l'attente du nom du vainqueur, entre le président sortant d'extrême droite Jair Bolsonaro et l'ex-président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva, le favori.

>> Le compte-rendu d'Anne Vigna dans Forum :

Plus de 156 millions de Brésiliens et de Brésiliennes sont appelés à élire leur président. [AFP - Evaristo Sa]AFP - Evaristo Sa
Le Brésil élit son nouveau président, le point à quelques heures de la fermeture des bureaux de vote / Forum / 3 min. / le 30 octobre 2022

Un résultat sans doute très serré

Si les sondages prédisent depuis des mois un 3e mandat de quatre ans à l'ex-chef d'Etat de gauche Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010), le président d'extrême droite Jair Bolsonaro peut encore y croire après son score inattendu du 1er tour du 2 octobre (lire encadré).

Le chef de l'Etat sortant, auquel les sondages avaient donné une douzaine de points de retard, a bénéficié d'une dynamique dans l'entre-deux tours quand la gauche semblait, elle, un peu sonnée.

"C'est bien plus serré que quiconque l'aurait cru", a dit à l'AFP le rédacteur en chef du média Americas Quarterly. "Cela va être une élection pleine de confusion", a ajouté Brian Winter.

Jair Bolsonaro peut-il accepter la défaite?

Le président sortant Jair Bolsonaro au moment de voter pour le 2e tour de la présidentielle. [AP/Keystone - Bruna Prado]
Le président sortant Jair Bolsonaro au moment de voter pour le 2e tour de la présidentielle. [AP/Keystone - Bruna Prado]

La grande inconnue, au-delà du verdict des urnes, est de savoir si Jair Bolsonaro acceptera le résultat en cas de défaite.

Après avoir mis en sourdine ses attaques incessantes contre le système "frauduleux" des urnes électroniques, il a récemment dénoncé des irrégularités présumées dans la diffusion des spots radio de sa campagne.

"Bolsonaro va remettre en question le résultat", estime Rogerio Dultra dos Santos, de l'Université fédérale de Fluminense à Rio.

Le spectre d'un "remake" du Capitole

Beaucoup craignent une réplique brésilienne de l'assaut du Capitole après la défaite de Donald Trump. Elle pourrait viser par exemple la Cour suprême si souvent vilipendée par Jair Bolsonaro.

L'ex-capitaine peut compter sur "l'appui de ses électeurs les plus radicalisés (...) et provoquer des troubles", selon l'analyste. Mais Rogerio Dultra dos Santos voit mal les forces armées se lancer dans une aventure golpiste et souligne que les institutions démocratiques sont solides.

Lula, ancien métallurgiste au destin hors norme, a espéré pour sa part que le président sortant "aura un moment de sagesse" et lui téléphonera s'il gagne "pour reconnaître le résultat".

>> Les précisions dans le 19h30 sur les prétentions à la victoire des deux candidats :

Jour d’élection au Brésil: Jair Bolsonaro et Lula prétendent à la victoire après une campagne marquée par la violence et la désinformation
Jour d’élection au Brésil: Jair Bolsonaro et Lula prétendent à la victoire après une campagne marquée par la violence et la désinformation / 12h45 / 1 min. / le 30 octobre 2022

Une campagne balisée par la désinformation

La campagne a pourtant été tout sauf "sage". S'accusant mutuellement de mentir, Jair Bolsonaro et, dans une moindre mesure, Lula, ont alimenté la machine à désinformation, qui a fonctionné comme jamais au Brésil.

>> Lire : Ultime débat à couteaux tirés entre Lula et Jair Bolsonaro au Brésil

Les réseaux sociaux, unique source d'information de la majorité des 170 millions d'utilisateurs brésiliens, ont véhiculé une masse inédite de fausses informations.

Avec cette "sale campagne", les véritables préoccupations de la population ont été négligées: inflation, chômage, pauvreté ou faim, dont souffrent 33 millions de Brésiliens.

L'enjeu majeur de l'entre-deux tours a été la chasse aux 32 millions d'abstentionnistes du 1er tour (21%). A titre de comparaison, Lula a obtenu six millions de voix d'avance le 2 octobre.

>> Voir aussi le sujet du 19h30 sur les attaques lors du premier débat télévisé :

Au Brésil, piques et attaques verbales lors du premier débat télévisé entre Lula et Jair Bolsonaro
Au Brésil, piques et attaques verbales lors du premier débat télévisé entre Lula et Jair Bolsonaro / 12h45 / 2 min. / le 17 octobre 2022

Deux projets de société radicalement différents

L'ancien chef de l'Etat veut protéger la démocratie et rendre "le Brésil heureux" de nouveau, après deux mandats où il a extrait près de 30 millions de Brésiliens de la pauvreté mais où l'économie était florissante.

Le populiste Jair Bolsonaro, quant à lui, veut défendre "le bien contre le mal", la famille, Dieu, la patrie et la liberté individuelle. Malgré un mandat émaillé de crises graves dont celle du Covid, il conserve un socle de partisans irréductibles et a su imposer sa ligne politique face à une gauche peu audible et à une droite traditionnelle qui a sombré.

L'ex-président Lula pose un baiser sur son ticket après avoir voté pour le second tour de la présidentielle brésilienne. [AP/Keystone - Andre Penner]
L'ex-président Lula pose un baiser sur son ticket après avoir voté pour le second tour de la présidentielle brésilienne. [AP/Keystone - Andre Penner]

S'il est élu, Lula, figure-clé de la politique brésilienne depuis quatre décennies, fera un come-back spectaculaire après avoir connu la disgrâce de la prison (2018-2019) puis l'annulation de ses condamnations pour corruption.

Il est le favori des femmes, des pauvres, des catholiques et du Nord-est rural. Mais les hommes, les classes aisées, les proarmes, les milieux d'affaires et les évangéliques votent majoritairement Bolsonaro.

>> Les précisions de Laetitia Rossi, correspondante pour le 19h30 :

Laetitia Rossi, correspondante à Rio de Janeiro, suit la journée à haut risque de l’élection présidentielle au Brésil
Laetitia Rossi, correspondante à Rio de Janeiro, suit la journée à haut risque de l’élection présidentielle au Brésil / 19h30 / 1 min. / le 30 octobre 2022

Un Parlement encore plus à droite

Le prochain locataire du Palais du Planalto à Brasilia devra composer avec un Parlement encore plus à droite qu'avant les législatives du 2 octobre: le Parti libéral (PL) de Bolsonaro est représenté en force.

Le nom du nouveau président devait être officialisé avant 20h00 locales (minuit heure suisse). Les premières estimations devraient quant à elles être favorables au candidat de l'extrême droite avec le dépouillement en premier des Etats du sud du pays, avant ceux du nord, soutiens de Lula.

>> Voir aussi le reportage du 19h30 sur les Brésiliens et Brésiliennes de Suisse :

Les Brésiliens de Suisse se sont déplacés en nombre dans les bureaux de vote. Reportage à Genève, où les électeurs sont partagés
Les Brésiliens de Suisse se sont déplacés en nombre dans les bureaux de vote. Reportage à Genève, où les électeurs sont partagés / 19h30 / 2 min. / le 30 octobre 2022

agences/oang

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Ecart encore resserré dans le dernier sondage

L'avance de l'ancien chef d'Etat de gauche Lula sur le président sortant d'extrême droite Jair Bolsonaro s'est réduite à quatre points, selon un sondage publié par Datafolha samedi.

Lula devrait être élu avec 52% des votes exprimés contre 48% à Jair Bolsonaro, selon l'institut de référence qui accordait un avantage de six points à Lula dans son précédent sondage jeudi.

Plus de 8300 personnes ont été interrogées sur deux jours, vendredi et ce samedi, pour cet ultime sondage qui comporte une marge d'erreur de +/- 2 points de pourcentage et promet donc un résultat serré.

Un centriste et un général comme colistiers

Les candidats à la vice-présidence du Brésil ont eux aussi des profils diamétralement opposés, dans l'ombre des aspirants à la fonction suprême.

L'ex-président de gauche a choisi le technocrate centriste Geraldo Alckmin, 69 ans, comme colistier. Lula justifie ce choix, jugé "contre-nature" par certains, en assurant que le temps est venu de l'union sacrée en défense de la démocratie.

Geraldo Alckmin a acquis une réputation de solide gestionnaire au fil de ses quatre mandats de gouverneur de Sao Paulo (2001-2006 et 2011-2018), de quoi rassurer les milieux d'affaires.

Le chef de l'Etat sortant, lui, a opté de son côté pour un général de la "ligne dure" et homme de confiance. Jair Bolsonaro avait placé Walter Braga Netto à des postes stratégiques de son gouvernement avant de le lancer dans la course électorale.

Ce militaire de 65 ans est considéré comme un bolsonariste pur et dur. Fin mars 2021, juste après sa nomination au ministère de la Défense, il avait mis le feu aux poudres en affirmant que le coup d'Etat militaire de 1964 devait être "célébré" comme un "mouvement" ayant permis de "pacifier" le pays.