Juste avant l'annonce du retrait, on pouvait lire sur les réseaux sociaux des publications de soldats qui se plaignaient d'être utilisés comme de la chair à canon, de ne pas être correctement équipés ou encore de ne pas percevoir la solde qui leur était due.
Or, en ordonnant ce retrait, le ministre russe de la Défense a donné l'impression de comprendre les problèmes de ses soldats et de leur éviter la bataille très dure qui aurait eu lieu si les Russes étaient restés à Kherson. C'est ce dont la plupart des Russes se félicitent sans pour autant condamner cette opération.
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Pas de prise de parole dans les médias
La mécanique de communication utilisée par Moscou pour masquer cet important revers était extrêmement bien huilée. Ainsi, les journaux des chaînes publiques se sont bornés à rediffuser la discussion entre le général Sourovikine, chef de l'opération spéciale, qui demande à Sergueï Choïgou, le ministre de la Défense, d'ordonner le retrait tout en expliquant qu'il s'agit d'une décision difficile à prendre, pour dramatiser la situation aux yeux des téléspectateurs. Sans donner beaucoup plus de détails.
Sur les chaînes privées ou dans les émissions de débat, la prise de parole est également inexistante. Ainsi, Andreï Norkin, présentateur de la plus grande chaîne privée russe NTV, a carrément refusé de commenter la nouvelle. Car, a-t-il déclaré, s'il soutient la décision du ministère de la Défense, il peut être envoyé en prison pour ne pas défendre la souveraineté territoriale de la Russie. Et, au contraire, s'il critique cette décision, il peut passer plusieurs années en prison au motif qu'il porte atteinte à la réputation de l'armée russe.
Vladimir Poutine toujours plus isolé
Certaines voix critiques s'élèvent toutefois sur les réseaux sociaux. Et on a du mal à croire qu'elles ne sont pas autorisées à le faire. Il s'agit pour le pouvoir de faire en sorte que les médias reflètent, plus ou moins, les débats du quotidien des Russes. Et ce retrait de Kherson en fait partie.
Sur le plan international, Vladimir Poutine est de plus en plus isolé. Il a d'ailleurs délégué son chef de la diplomatie pour conduire la délégation russe lors du Sommet du G20 à Bali et ne s'y rend pas lui-même.
Sur le plan intérieur, Evgeny Prigojine, patron de la milice Wagner, ou Ramzan Kadyrov, chef tchétchène, habitués des critiques acerbes contre le commandement militaire, n'ont pour l'heure pas tenu de propos fracassants après cette annonce.
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Jean-Didier Revoin/hkr