Les tensions se sont accrues à l'approche des élections locales dans les municipalités à majorité serbe. Au point que la présidente du Kosovo Vjosa Osmani a annoncé samedi un report au 23 avril des élections initialement prévues le 18 décembre et que le principal parti serbe a dit vouloir boycotter.
Dimanche, des dizaines de Serbes, protestant contre l'arrestation d'un ancien policier, se sont réunis à nouveau dans la matinée sur des barrages édifiés la veille et qui paralysent le trafic à deux passages frontaliers entre le Kosovo et la Serbie.
Tirs sur la police
Plusieurs heures après la mise en place de ces blocages routiers, la police a indiqué avoir subi trois attaques successives avec des armes à feu, samedi soir, sur l'une des routes menant à la frontière.
"Les unités de police, en situation d'autodéfense, ont été forcées de répondre avec leurs armes aux personnes et groupes criminels, qui ont été repoussés et sont partis dans une direction inconnue", selon un communiqué de la police.
La police de l'Union européenne, déployée dans la région dans le cadre de la mission Eulex, a déclaré avoir été aussi visée par une grenade assourdissante qui n'a pas fait de blessés dans ses rangs.
Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a condamné ces attaques et a appelé les Serbes du Kosovo à retirer "immédiatement" les barricades. "Le calme doit être rétabli", a-t-il tweeté dimanche, appelant tous les protagonistes à "éviter l'escalade".
"Inacceptables", selon l'Otan
L'Otan, qui dispose d'une mission de 4000 membres au Kosovo sous mandat de l'ONU, a jugé ces attaques "inacceptables". "Nous appelons toutes les parties à éviter les provocations et à contribuer au calme et à la stabilité", a tweeté la porte-parole de cette mission Oana Lungescu.
Des explosions et des tirs ont été entendus plus tôt dans la semaine alors que les autorités locales tentaient de préparer le vote. Un policier issu de la communauté albanaise, faisant partie des forces déployées dans la région, a été blessé.
Le report des élections salué
Les ambassades de France, d'Allemagne, d'Italie, de Grande-Bretagne et des Etats-Unis, ainsi que la représentation de l'UE, ont salué le report des élections, y voyant une "décision constructive" pour "faire progresser les efforts pour parvenir à une situation plus sûre dans le nord".
L'ancienne province serbe du Kosovo, en majorité peuplée d'Albanais, a proclamé son indépendance en 2008. Cette proclamation d'indépendance a été reconnue par les Etats-Unis et la majorité des pays de l'UE mais pas par Belgrade qui encourage la majorité serbe du nord du Kosovo à défier l'autorité de Pristina.
Les Serbes représentent environ 120'000 personnes, sur une population kosovare totale de quelque 1,8 million de personnes, très majoritairement d'origine albanaise.
Pristina et Belgrade ont échangé les accusations après la dernière série d'incidents. Le Premier ministre du Kosovo Albin Kurti a accusé la Serbie de "menacer le Kosovo d'une agression".
Le président serbe Aleksandar Vucic a dit qu'il demanderait aux forces de l'Otan de permettre le déploiement de policiers et de militaires serbes au Kosovo, tout en reconnaissant qu'il n'y avait "aucune chance de cette requête soit approuvée".
furr avec les agences
Préoccupation de la Suisse
La Suisse est "préoccupée" par la recrudescence des tensions entre la Serbie et le Kosovo, marquée par l'"érection de barricades" (dans le nord du Kosovo). Elle invite les deux parties à prendre sans attendre des mesures en vue d'une désescalade.
En exprimant ainsi sa préoccupation sur Twitter, le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) va dans le même sens que la France, elle aussi inquiète de la situation sur place. A noter que les Kosovars représentent une des plus importantes minorités étrangères en Suisse, avec quelque 115'000 ressortissants, un nombre en constante hausse.
Appels de Moscou et Paris
Le Ministère français des affaires étrangères s'est dit lui aussi "très préoccupé" des vives tensions au nord du Kosovo, et notamment de l'attaque "inacceptable" contre les forces de l'ordre de l'UE survenue dans la nuit de samedi à dimanche.
Dans son communiqué, la France a rappelé son soutien à la médiation européenne entre la Serbie et le Kosovo qui doit permettre de "progresser vers un accord global" et a exhorté "les deux parties à se réengager dans le dialogue".
Moscou de son côté a appelé à régler les tensions entre la Serbie et le Kosovo par des "moyens diplomatiques" après ces attaques, exigeant aussi que les droits des Serbes soient "garantis". La Russie est un proche soutien de Belgrade du fait de liens historiques et religieux anciens.