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La semaine de 4 jours dope l'efficience et les chiffres d'affaires des entreprises

La semaine de 4 jours dope l'efficience et les chiffres d'affaires des entreprises [Science Photo Library via AFP - GORODENKOFF PRODUCTIONS]
Un bilan encourageant de la semaine de 4 jours payée 5 mais ça ne marche pas partout / Tout un monde / 9 min. / le 19 décembre 2022
Il y a près d'un siècle, Henry Ford révolutionnait le quotidien de ses ouvriers en faisant passer la semaine de travail de 6 à 5 jours. Aujourd'hui, sans diminution du salaire des employés, certaines entreprises tentent l'expérience de la semaine de 4 jours. Selon une récente étude, les résultats sont très encourageants.

Effectuer le même volume de travail, mais en moins d'heures, tout en gardant son salaire, l'expérience serait possible grâce à la numérisation et aux gains de productivité. Sur le papier, les avantages sont nombreux.

La fondation "4 day week global" milite pour la réduction du temps de travail à 4 jours par semaine. L'organisation vient de publier les résultats d'une expérience grandeur nature. Pendant six mois, 33 sociétés volontaires ont testé cette nouvelle organisation du travail. Au final, aucune n'a l'intention de revenir en arrière.

En Irlande, l'entreprise "Rentarecruiter" a tenté l'expérience. Lundi, dans l'émission Tout un monde, son co-fondateur Barry Prost explique quelles ont été les motivations. Pour lui, l'objectif était d'offrir des avantages non monétaires aux employés.

Moins de réunions permet d'augmenter l'efficacité

Pour cette PME, il est difficile d'égaler les salaires versés par les grandes multinationales: "Je pense que la semaine de 4 jours correspond bien à notre passion, non seulement pour nous différencier en tant que société de recrutement auprès de nos clients, mais aussi auprès de nos employés," déclare Barry Prost.

Au début de l'expérience, les salariés ont été à la fois surpris et enthousiastes. Pour leur offrir un week-end de trois jours, il fallait travailler de manière plus efficiente. Selon Barry Prost la planification est un élément clé. Elle permet de comprendre comment mettre en oeuvre la semaine de 4 jours sans impact négatif sur la productivité.

"Pour notre personnel, nous avons mis en place des formations à la gestion du temps. (...) Nous avons réduit le nombre de réunions d'équipe à 3 réunions de 30 minutes par semaine," explique l'Irlandais.

Après six mois d'expérience, le bien-être du personnel s'est amélioré. Les impacts sociaux sont très positifs.

L'entreprise a réussi à doubler son chiffre d'affaires

Par rapport à la même période de l'an dernier, l'entreprise a de son côté augmenté son bénéfice de 50% et son chiffre d'affaires a doublé.

L'University College de Dublin a mesuré le taux de satisfaction dans les entreprises qui appliquent ce modèle. Selon Orla Kelly, professeure adjointe en politique sociale, les résultats démontrent une diminution du stress, des burnouts, de la fatigue ou encore des conflits familiaux.

Les essais et les études sur la semaine de 4 jours se multiplient, au Royaume Uni ou en Espagne par exemple. Mais au-delà des tests, la mesure est encore loin de se généraliser, car l’idée est encore assez nouvelle.

La culture suisse est au présentéisme

Pour certains spécialistes, le modèle est pour l'instant incompatible avec les pratiques hélvétiques. "La Suisse a déjà une forte culture du temps partiel.  Il faut savoir qu'en Europe, on est l'un des pays qui favorise le plus le temps partiel", estime Joanna Bessero, consultante en ressources humaines. Même si le télétravail s'est répandu grâce à la pandémie, le réflexe suisse est encore au présentéisme.

Selon l'experte en RH, les Suisses ont l'habitude d'être payés en fonction du nombre d'heures travaillées et non pas en fonction d'un résultat ou du rendement.

Du côté d'Economie suisse, Corine Fiechter, responsable de projets, affirme qu'il serait compliqué d'étendre ce concept à de nombreux secteurs: "Si on prend l'exemple de la coiffure, on peut se demander si un coiffeur arrive à faire en 4 jours ce qu'il fait normalement en 5. Peut-il être vraiment plus productif, plus efficace, en gagnant du temps quand il coupe les cheveux?"

Une mesure qui devrait être couplée à un revenu universel

Dans plusieurs domaines professionnels, le choix de l'employé se fait en fonction du salaire, surtout lorsqu'il est bas. Voilà pourquoi Juliet Schor, professeure à Boston College, affirme qu'une universalisation de cette mesure devrait être couplée avec celle d'un revenu universel, accessible à toutes les catégories professionnelles.

Quoi qu'il en soit, des multinationales connues testent la formule, notamment Unilever en Nouvelle-Zélande et en Australie ou encore IBM au Japon. Après un mois de test, la société japonaise a constaté des résultats spectaculaires sur la hausse de la productivité, soit 40%.

>> Lire aussi : Les Suisses et les Suissesses travaillent moins qu'il y a dix ans

Sujet radio: Blandine Levite

Adaptation web: Miroslav Mares

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