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Sur le front de la guerre en Ukraine, les femmes s'engagent aussi

Une femme avec un drapeau ukrainien observe un tank russe détruit à Kiev, Ukraine. [Keystone/AP Photo - David Goldman]
Reportage en Ukraine, les femmes restées pour combattre ou soigner les blessés / La Matinale / 4 min. / le 20 décembre 2022
Si des centaines de milliers de femmes ukrainiennes ont fui pour se réfugier à l'étranger, d'autres sont restées au pays pour rejoindre le front ou soigner les soldats. Envoyée spéciale pour Radio France, Agathe Mahuet en a rencontré plusieurs dans le Donbass.

Beaucoup de ces femmes sont médecins dans l’armée, parfois dans des conditions très difficiles. C'est le cas de Victoria, qui soigne les soldats au plus près des tranchées de Bakhmut. Son poste est situé à 50 mètres derrière le front, avec le commandement. Sa mission quotidienne est de ramener les blessés au combat pour leur apporter les premiers soins. Certains jours, ce ne sont pas les blessés mais les morts, parfois une dizaine, qu'elle récupère.

"La peur? Je l’ai oubliée dès ma première fois, il y a quelques mois, quand mon meilleur ami est mort et que j’ai dû aller chercher son corps. Depuis ça, je n’ai plus peur", a-t-elle témoigné dans un reportage diffusé mardi dans La Matinale de la RTS.

Victoria a 30 ans. De son bonnet kaki dépassent des boucles d’oreille et une longue tresse. Elle porte du vernis à ongles, mais au milieu de ce champ de bataille, elle ne revendique pas particulièrement son statut de femme. "Je suis juste une militaire. J’ai les mêmes responsabilités que les hommes, et d’ailleurs je ne demande aucun traitement de faveur", tient-elle à faire savoir, tout en expliquant que ça lui tient à coeur d'être "en forme et en beauté". "Pour moi, c’est obligatoire! Quand on s’occupe des blessés, c’est essentiel d’avoir bonne mine. C'est plus apaisant pour les soldats".

"Il y a des femmes fortes qui défendent leur patrie"

Sur le front, il faut soigner, mais aussi nourrir les militaires. Dans un minuscule village libéré du Donbass, à quelques kilomètres de la ligne de front, Katerina, cantinière, est en train de chercher du fromage blanc. Elle tient absolument à préparer des syrniki, de petits pancakes, alors qu'on entend au loin les détonations, là où se battent "ses gars", comme elle dit.

Une réfugiée ukrainienne en Pologne participe à la confection de filets de camouflage à Cracovie. [AFP/Anadolu Agency - Omar Marques]
Une réfugiée ukrainienne en Pologne participe à la confection de filets de camouflage à Cracovie. [AFP/Anadolu Agency - Omar Marques]

"Moi, je suis de Kharkiv. Alors je n’ai pas peur, je suis habituée aux bombardements!". Elle ne sert ses repas qu'à des hommes. "Peut-être parce que la guerre est une affaire d’hommes? Mais il y a aussi des femmes fortes qui défendent leur patrie!", revendique-t-elle. Elle a d'ailleurs été médaillée la semaine dernière et montre fièrement la photo de sa récompense pour son implication et son patriotisme.

Elle aussi estime qu'être une femme dans l'armée n'est pas un problème, sauf sur un aspect logistique: "L'uniforme que l'armée nous donne est vraiment fait pour les hommes, il est très inconfortable pour nous! Moi, je me suis acheté ma propre tenue", glisse Katerina.

Uniformes recoupés et urinoirs de poche

Pour y remédier, Ksenia, 26 ans, consacre son temps à équiper les femmes de l’armée ukrainienne au sein d'une association basée à Kiev. "On a fait fabriquer ces uniformes féminins, plus souples, mieux taillés", explique-t-elle en montrant des tenues.

Dans le coffre d'une voiture, 120 plaques de métal un peu plus légères, conçues pour remplacer les lourds gilets pare-balles, sont prêtes à partir pour le front. Dans un entrepôt, on trouve encore des cartons remplis de produits d’hygiène, y compris des urinoirs féminins de poche. Ksenia explique qu'elle reçoit en ce moment 30 demandes par jour de femmes soldats en manque d’équipement adapté.

Sujet radio: Agathe Mahuet
Adaptation web: Vincent Cherpillod

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Quelque 50'000 femmes dans l'armée ukrainienne

Les femmes seraient quelque 50'000 aujourd'hui dans l’armée ukrainienne, une présence que les Ukrainiens aiment d'ailleurs bien mettre en avant. "Les filles coupent leurs tresses, font leurs valises et prennent les armes", racontent ainsi les paroles d'une chanson qui leur rend hommage.

Elles ne sont encore qu'en nombre limité en première ligne - 5000 environ - et occupent également rarement des postes de décision, même si les choses commencent à changer, comme le prouve l'exemple de Katia, 30 ans. Après quatre ans passés à l’Académie militaire de Lviv, elle est aujourd’hui commandante adjointe d’une brigade d’assaut qui combat dans les tranchées de Bakhmut, avec 120 soldats sous ses ordres.

Cette jeune femme menue joue toutefois surtout auprès d’eux un rôle logistique et psychologique: "Je ne suis pas pour que les femmes combattent, comme le font les hommes. Une éclaireuse, par exemple, manquerait de force et aurait besoin d'aide pour retirer des mines", estime-t-elle. "Chacun sa place dans l’armée, et chacun à son niveau, on ira vers la victoire".

Une femme formée à l'usage de la Kalashnikov à Zaporijjia en juin 2022. [AFP - Marina Moiseyenko]
Une femme formée à l'usage de la Kalashnikov à Zaporijjia en juin 2022. [AFP - Marina Moiseyenko]