Emprisonnée juste après le coup d'Etat du 1er février 2021, qui a mis fin à une brève période démocratique dans ce pays d'Asie du Sud-Est, Aung San Suu Kyi a été poursuivie pour corruption, fraude électorale, violation de secrets d'Etat et des restrictions anti-Covid-19.
Elle avait déjà été condamnée à 26 ans de prison, pour quatorze charges différentes. Le tribunal de la junte a rendu son verdict vendredi pour les cinq dernières accusations de corruption.
Dans une affaire de location d'un hélicoptère pour un ministre, l'ancienne dirigeante est accusée de ne pas avoir respecté les règles et d'avoir causé "une perte pour l'Etat".
Résolution de l'ONU
Le verdict de vendredi marque la fin d'une procédure judiciaire à huis clos longue de 18 mois, qui vise à écarter Aung San Suu Kyi de la scène politique, selon les groupes de défense des droits fondamentaux. La cheffe de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) avait remporté haut la main les élections législatives de 2015 et de 2020.
L'armée a justifié son coup d'Etat en assurant avoir découvert des millions de votes irréguliers lors du dernier scrutin, considéré comme globalement libre par des observateurs internationaux.
Le Conseil de sécurité de l'ONU a demandé en décembre la libération immédiate d'Aung San Suu Kyi, dans sa première résolution depuis des décennies sur la situation en Birmanie.
Cet appel, survenu dans un rare moment d'unité, a été rendu possible grâce à l'abstention de la Chine et de la Russie, habituels soutiens de Naypyidaw, qui ont renoncé à leur droit de veto. La junte a aussitôt accusé l'ONU de vouloir "déstabiliser" le pays.
Figure toujours populaire
Depuis le putsch, la détenue n'a été vue que de très rares fois, sur des photos granuleuses prises par les médias d'Etat dans une salle d'audience vide. La Nobel de la paix pourrait purger une partie de sa peine d'emprisonnement en résidence surveillée.
Aung San Suu Kyi reste une figure populaire en Birmanie, même si son image internationale a été écornée par son incapacité à défendre la minorité musulmane des Rohingyas, victimes d'exactions de l'armée en 2016 et 2017 - un "génocide" selon Washington.
La Birmanie a sombré après le coup d'Etat dans une période de chaos, avec des violences quotidiennes entre l'armée et des milices auto-constituées qui s'accusent d'avoir tué des centaines de civils.
Plus de 2600 personnes ont été tuées sous la répression de la junte, d'après une ONG locale. Plusieurs groupes de défense des droits ont accusé l'armée birmane de lancer des frappes aériennes sur des civils, ce qui constitue des crimes de guerre. L'armée a comptabilisé de son côté 4000 civils tués.
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ats/rad