"Un petit nombre" de documents classés confidentiels datant de l'époque de la vice-présidence de Joe Biden ont été retrouvés dans sa résidence privée de Wilmington, dans l'Etat du Delaware, a indiqué jeudi la Maison Blanche. Ils ont été déplacés "par inadvertance", a ensuite assuré l'avocat de la présidence.
Aux Etats-Unis, une loi de 1978 oblige les présidents et vice-présidents américains à transmettre l'ensemble de leurs emails, lettres et autres documents de travail aux Archives nationales.
Pris en défaut, le président démocrate a assuré "coopérer pleinement" avec les autorités judiciaires. Mais l'opposition républicaine, craignant qu'il ne bénéficie d'un traitement de faveur, a immédiatement souhaité ouvrir une enquête parlementaire.
Dans un garage
Lundi, la Maison Blanche avait déjà reconnu qu'une dizaine de documents du même type avaient été découverts au Penn Biden Center, un cercle de réflexion de Washington où Joe Biden avait autrefois un bureau.
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Cette fois, les documents se trouvaient dans le garage de sa maison de Wilmington et dans une pièce adjacente, a précisé l'avocat de la présidence, Richard Sauber. Selon lui, le Département de la Justice a immédiatement été informé et doit prendre possession des dossiers.
Le procureur général, qui dirige le Département de la Justice, a dans la foulée nommé un procureur spécial pour enquêter. Merrick Garland, qui avait déjà délégué les investigations concernant Donald Trump à un procureur indépendant, a confié cette nouvelle mission à Robert Hur, un ancien procureur fédéral ayant traité jusqu'ici aussi bien de grande criminalité que d'affaires de corruption ou de fraudes.
"Sa nomination rappelle au public l'attachement du Département à l'indépendance de la justice dans les affaires particulièrement sensibles, et son engagement à rendre des décisions uniquement guidées par les faits et la loi", a déclaré le procureur général lors d'une brève allocution. Cette annonce est destinée à étouffer tout soupçon de favoritisme politique.
Le cas Trump
En effet, l'opposition s'est empressée de dénoncer une justice à deux vitesses. "C'est un nouveau faux pas de l'administration Biden qui (...) traite le président Trump d'une façon et le président Biden d'une autre", a lancé le président républicain de la Chambre des représentants Kevin McCarthy, pour qui "le Congrès doit enquêter sur cette affaire".
En quittant la Maison Blanche en janvier 2021, l'ancien président républicain avait emporté des boîtes entières de documents. Après avoir été prié de les restituer, il avait rendu une quinzaine de cartons en janvier 2022.
Après examen, la police fédérale avait estimé qu'il en conservait probablement d'autres dans sa luxueuse résidence de Mar-a-Lago en Floride. Des agents du FBI y ont mené le 8 août une perquisition spectaculaire sur la base d'un mandat pour "rétention de documents classifiés" et "entrave à une enquête fédérale", et ont saisi une trentaine d'autres boîtes.
Une intense bataille judiciaire s'est alors ouverte pour déterminer la nature des documents saisis (classifiés? personnels? déclassifiés?) ce qui a ralenti la procédure. Mais Donald Trump reste sous la menace d'une inculpation fédérale.
Après sa déclaration de candidature à la présidentielle de 2024, Merrick Garland a confié à un procureur spécial le soin de superviser cette enquête, ainsi que les autres investigations concernant le rôle de Donald Trump dans l'assaut sur le Capitole, le 6 janvier 2021.
"A côté de la Corvette"
Même si l'ampleur des documents stockés est différente, l'embarras était palpable jeudi chez les démocrates et cela n'a pas échappé à leur opposition.
"Vous vous rappelez comment la gauche avait réagi quand le président Trump a emporté de prétendus documents 'confidentiels' chez lui? Elle est drôlement silencieuse aujourd'hui", a commenté l'élu républicain de la Chambre Jim Jordan, un fidèle lieutenant de Donald Trump.
Le président était lui-même sur la défensive. "Des documents classifiés à côté de votre Corvette, mais qu'aviez-vous donc en tête ?" lui a demandé, provocateur, un journaliste de la chaîne prisée des conservateurs Fox News.
Le président a répondu qu'il s'exprimerait "bientôt, si Dieu le veut" sur le sujet. "Par ailleurs, ma Corvette est dans un garage fermé. (...) Ce n'est pas comme si elle était dans la rue", a ajouté le démocrate de 80 ans, en référence à sa voiture préférée, une décapotable datant des années 1960.
ats/ami
Selon le politologue Daniel Warner, le camp républicain va profiter de la situation
Les premiers documents ont été découverts en novembre, juste avant les élections de mi-mandat. Alors pourquoi avoir attendu le mois de janvier pour rendre cette découverte publique, se questionne dans Forum le politologue américain Daniel Warner? L'évènement de jeudi ne va pas aider le président démocrate. "Cela va ajouter la possibilité aux républicains de dire que c'est une hypocrisie de la part de Biden de dire que monsieur Trump était irresponsable", analyse-t-il.
Selon Daniel Warner, le camp républicain, majoritaire à la Chambre des représentants, va profiter de la mauvaise posture de Joe Biden. Mais il observe des nuances entre l'affaire du démocrate et celle des documents trouvés chez Donald Trump en Floride. L'ancien président avait refusé de donner les documents. "Par contre, Biden et ses conseillers ont tout de suite dit qu'il y a des documents", soulève le politologue. Le nombre de documents confidentiels n'est pas non plus comparable, avec une dizaine dans le cas de Joe Biden et des milliers pour Donald Trump, relève l'expert.