L'Etat japonais s'apprête à offrir une prime d'un million de yens, soit 7500 francs par foyer, et 7500 supplémentaires par enfant aux habitants et habitantes de Tokyo qui quittent la capitale pour vivre dans une des 1300 communes de province éligibles.
Pour Takashi Shirinashihama de l'Organisation des migrations intérieures du Japon, ce dispositif incitatif tombe à pic. "La crise Covid a encouragé le télétravail et, grâce à ce changement, le nombre de personnes qui s'intéressent à ces régions a augmenté. Les habitants de la mégalopole de Tokyo consultent davantage les autorités locales de province. Cette aide financière renforce leur intérêt et je pense que, dans une certaine mesure, cela a des effets", a-t-il noté cette semaine dans l'émission Tout un monde.
Le gouvernement japonais espère convaincre chaque année 10'000 Tokyoïtes d'aller vivre dans une localité de province.
Les autorités conseillent toutefois de bien se renseigner avant d'accepter et de ne pas agir dans la précipitation. "Il peut y avoir un certain écart entre ce que l'on imagine avant de déménager et la réalité, notamment en ce qui concerne le contact avec les habitants et l'intégration dans les communautés locales. Tout cela peut être très éloigné des attentes que l'on a", ajoute Takashi Shirinashihama.
Télétravailler depuis la province
Les personnes intéressées par ces subsides sont sensibles à l'argument financier. "On nous interroge souvent sur les subventions et le travail", confirme un fonctionnaire du département de Miyazaki, au sud-ouest du Japon.
Si l'incitation pécuniaire est un facteur important, il ne s'agit pas du seul recherché par les Tokyoïtes qui envisagent de changer de vie. "Il y a trop de monde dans la région de Tokyo. On court toujours partout, c'est fatigant", témoigne un père de famille. "Nous voulons un lieu de vie stable, un bon environnement médical et un cadre de vie naturel où notre enfant pourra pleinement s’épanouir", résume-t-il.
La possibilité de télétravail est également un critère principal. "Ces derniers temps, nous recevons surtout des demandes de familles avec des enfants dont les parents veulent au moins une pièce de plus pour le télétravail", rapporte Yuki Sekiguchi, responsable de la ville moyenne de Ryugasaki, dans le département d'Ibaraki.
Difficultés à convaincre les jeunes
De leur côté, les régions de province cherchent souvent à séduire les mêmes catégories de la population. "Nous voulons dans la mesure du possible attirer les jeunes, les femmes et les foyers avec des enfants", indique un représentant de Tokushima, sur l'île de Shikoku, dans le sud du pays.
Certaines localités ont néanmoins du mal à convaincre les jeunes, car elles cumulent les handicaps, à l'instar des villes du département de Fukushima, dont le nom est devenu synonyme d'accident nucléaire. A Namié, "la pollution radioactive et le fait qu'il reste encore des zones non décontaminées demeurent encore un problème", raconte un représentant de la ville.
"Avant la catastrophe, la population était d'environ 21'000 personnes, mais la ville a été complètement évacuée à cause de l'accident de Fukushima. Durant un temps, il ne restait aucun habitant. Actuellement, environ 2000 personnes vivent à Namié, dont 66% sont d'anciens habitants et 33% des nouveaux venus qui ont déménagé", ajoute-t-il.
D'autres personnes sont toutefois prêtes à s'installer dans le département pour redonner vie à la région sinistrée. "Je ne veux plus être en ville. Je serai à la retraite cette année, je veux donc trouver une occupation ailleurs en province. Le département de Fukushima, qui est dans un rayon proche de la région de Tokyo, est une bonne option pour moi", témoigne une sexagénaire prête à déménager.
Karyn Nishimura/iar