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Mike Horn regrette d’avoir participé à des opérations militaires dans l’armée sud-africaine

Le Conseil d'Etat vaudois invité à se positionner sur le passé de Mike Horn dans l'armée sud-africaine. [RTS]
Mike Horn, la face cachée de l’aventurier / Temps présent / 48 min. / le 19 janvier 2023
Le célèbre aventurier helvético-sud-africain regrette d’avoir participé à des opérations avec l’armée sud-africaine lors de la guerre à la frontière angolaise révélées par Temps Présent, qui a identifié pour la première fois l’affectation militaire de Mike Horn et rencontré des anciens collègues de son unité. L’explorateur affirme toutefois assumer son passé.

Dans un portrait consacré à l’aventurier, l’émission Temps Présent a révélé jeudi des éléments concernant le passé de Mike Horn dans l’armée sud-africaine au sein d’un bataillon de contre-insurrection. Après s’être exprimé longuement lors du tournage du reportage, Mike Horn a tenu à préciser 48 heures avant sa diffusion qu’il "regrette ces opérations" tout en affirmant assumer son passé.

Les regrets écrits de Mike Horn dans l'émission Temps Présent. [Temps Présent]
Les regrets écrits de Mike Horn dans l'émission Temps Présent. [Temps Présent]

En 1986, alors qu’il a 18 ans et effectue son service militaire obligatoire, Mike Horn est engagé dans le bataillon 101, une unité de contre-insurrection réputée pour sa cruauté , qui lui vaudra d’être qualifiée de "bataillon d’assassins" par le premier président de la Namibie Sam Nujoma, selon un de ses anciens membres interviewé par Temps Présent. Il accède au rang de lieutenant (officier) et dirige une unité, la force de réaction rapide 903.

A l’époque, le bataillon 101 est actif à la frontière nord de la Namibie, un pays alors occupé par l’Afrique du Sud qui y impose le régime raciste de l’apartheid. Avec une tactique militaire s’apparentant à de la chasse à l’homme, le bataillon 101 traque alors les insurgés indépendantistes namibiens afin de les éliminer.

Mike Horn a combattu au sein d'un bataillon de contre-insurrection de l'armée sud-africaine. [YouTube (capture d'écran) - Temps Présent]
Mike Horn a combattu au sein d'un bataillon de contre-insurrection de l'armée sud-africaine. [YouTube (capture d'écran) - Temps Présent]

L’ancien supérieur de Mike Horn, Waal de Waal, explique: "Il faut se souvenir que nous étions en guerre. Et des choses désagréables se passent. Nous nous tirions dessus, nous nous roulions dessus. En fait, eux ne pouvaient pas nous rouler dessus car ils étaient au sol. Mais nous, nous étions sur des véhicules. Et l'arme du conducteur c’est son véhicule. Donc si un ennemi le visait, il n'avait pas le temps de s'arrêter pour tirer. Il lui roulait dessus. Et c'est tout. C’était la guerre."

"Ils se moquaient totalement de la loi"

Le juge à la Cour suprême de Namibie Dave Smuts était à l’époque avocat et se rendait régulièrement dans la région pour enquêter sur les violations graves et répétées des droits de l’homme. Il témoigne: "dans cette zone, il y a eu un véritable effondrement de l’Etat de droit. Les règles de la loi n’étaient plus appliquées. Les civils étaient traités de manière épouvantable, tués. Tout comme les insurgés capturés qui étaient souvent assassinés."

Le juge à la Cour suprême précise également: "le bataillon 101 lui-même a parfois opéré complètement en dehors de la légalité. Et nous avons un exemple très bien documenté dans lequel cela s'est produit. Mais ils se moquaient totalement de la loi, ils savaient que les autorités les tireraient d'affaire."

Selon Dave Smuts, le bataillon 101 est directement impliqué dans l’assassinat, le 30 novembre 1986, du leader indépendantiste namibien Imanuel Shifidi, un ancien prisonnier politique incarcéré 18 ans dans la même geôle que Nelson Mandela. Mike Horn dément formellement toute participation à cette opération.

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Mike Horn: "C'était pas chasser pour tuer"
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Dans l’interview qu’il a accordée à l’équipe de Temps Présent, Mike Horn estime que, malgré la violence, son engagement au sein du bataillon 101 est "quelque chose que j’ai pris comme une bonne expérience car cela m’a formé comme aventurier". La guerre l’a-t-il traumatisé ? "Ca faisait partie de ma vie comme partir en expédition ou aller acheter des croissants. C’est-à-dire que dès que tu veux que quelque chose te traumatise, c’est là où cela te traumatise pour toute ta vie."

Mike Horn confirme par ailleurs avoir participé, après son service militaire dans l’armée sud-africaine, à une opération d’infiltration secrète, dont il ne peut rien dire car "quand j’ai signé quelque chose qui est secret, c’est secret pour toute ma vie".

L’aventurier, né en 1966, a grandi dans une Afrique du Sud alors régie par les lois de l’apartheid, qui organisait la stricte séparation de la population en fonction de la couleur de la peau des individus. Ce régime a disparu progressivement dès 1991. En 1994, les premières élections multiraciales ont porté au pouvoir Nelson Mandela et son parti l’ANC, autrefois interdit.

Passé militaire mis en avant

Au cours de l’été 1990, Mike Horn a quitté soudainement l’Afrique du Sud pour la Suisse où il vit depuis. C’est à Château d’Oex, dans le canton de Vaud, qu’il a commencé à la fin des années 90 une carrière d’aventurier-explorateur qui l’a mené aux quatre coins de la planète et lui a donné une renommée internationale, grâce au soutien de nombreux sponsors.

Dans ses livres, mais aussi au cours d’interviews ou de conférences publiques, l’aventurier a régulièrement mis en avant son passé militaire, évoquant systématiquement son appartenance aux "Forces spéciales", entretenant le mystère sur sa véritable affectation.

Il a acquis la nationalité helvétique en 2011.

Corinne Portier

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