"Les Ukrainiens mènent une bataille ancestrale face à l’agression et la domination. C’est une bataille menée maintes fois par les Etats-Unis et nous allons nous assurer que les Ukrainiens sont bien équipés pour se défendre", a déclaré mercredi le président Joe Biden lors de l'annonce de la livraison de chars Abrams à l'Ukraine.
En raison de cette prodigalité, le complexe militaro-industriel américain est aujourd’hui à flux tendu. En un an, les Etats-Unis ont livré l’équivalent de 7 ans de production de lance-missiles antichars Javelin. L’artillerie ukrainienne, si centrale dans cette guerre, a de son côté tiré un million d’obus de calibre 155 millimètres de facture américaine.
Mackenzie Eaglen, spécialiste des budgets militaires à l'American Enterprise Institute, un think tank de droite, observe une baisse des stocks. "L’inquiétude augmente mois après mois. Personne n’est encore terrifié, mais l’anxiété gagne le plus haut niveau de la hiérarchie, qui s’informe désormais constamment du niveau des stocks", note-t-elle vendredi dans le 19h30.
Puiser dans les stocks en Israël
Face à la demande ukrainienne, le Pentagone entend augmenter la production d’obus 155 millimètres, passant de 14'400 obus par mois avant la guerre à 90'000 d’ici 2025.
Dans l’immédiat, les Etats-Unis doivent puiser dans leurs stocks de munitions entreposés en Israël pour prévenir les conflits au Moyen-Orient. "En termes de munitions et de projectiles, nous pouvons fournir l’Ukraine indéfiniment, à travers diverses mesures bout-de-ficelles. Mais si nous devions nous engager dans un conflit sur un autre théâtre d’opération, ça deviendrait problématique", analyse Mackenzie Eaglen.
Politiques et industriels à convaincre
L'arsenal des Etats-Unis s'est dégarni, mais la production devrait augmenter ces prochains mois, à condition que le Congrès et l’industrie suivent l’administration. La nouvelle majorité républicaine à la Chambre des Représentants réclame des coupes dans les dépenses publiques et menace de bloquer le budget, si Joe Biden refuse de négocier. Le budget de la Défense serait alors mis en péril, en l’absence d’accord bipartite.
Quant aux industriels, ils devront ouvrir de nouvelles chaînes de production et augmenter la capacité des usines existantes. C’est un investissement important et le Pentagone devra s’engager à passer commande à long terme, alors que personne ne peut prédire l’issue de la guerre en Ukraine et les besoins en munitions des prochaines années.
Gaspard Kühn/ami