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Nouvelle année faste pour les géants des hydrocarbures?

Groupes pétroliers: pourquoi profitent-ils de la crise énergétique? Interview de Thierry Bros
Groupes pétroliers: pourquoi profitent-ils de la crise énergétique? Interview de Thierry Bros / Forum / 4 min. / le 8 février 2023
L'année 2022 restera dans les annales pour les "super majors" pétrolières: la faim insatiable de pétrole et de gaz, combinée à la guerre en Ukraine, leur a fait gagner des bénéfices record, et tout indique que les profits seront au rendez-vous en 2023 aussi.

Quatre des cinq majors (Shell, Chevron, ExxonMobil, TotalEnergies) ont battu en 2022 leur record de bénéfice net, tandis que BP établit un record de bénéfice hors éléments exceptionnels. Au total, 151 milliards de dollars de bénéfice net ont été engrangés en 2022. Les bénéfices ajustés, qui rendent mieux compte de la rentabilité en excluant les pertes comptables causées par les retraits de Russie, sont plus proches de 200 milliards.

De quoi s'attirer les foudres des gouvernements et ONG, en pleine crise énergétique et climatique. Mardi, le président des Etats-Unis Joe Biden a jugé ces profits "scandaleux".

Les compagnies ont profité à plein de l'escalade des cours, avec un baril de Brent, référence de l'or noir, frôlant les 140 dollars en mars 2022 et un gaz à 350 euros le mégawattheure l'été dernier en Europe, 15 fois le prix habituel.

Aucune baisse de la consommation n'est attendue

Les prix ont baissé depuis, mais en 2023 "nous pouvons avoir d'autres pics, car la guerre en Ukraine est loin d'être terminée", prévient Adi Imsirovic, chercheur à l'Oxford Institute for Energy Studies.

Malgré des incertitudes pour l'économie mondiale, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) ne s'attend pas à une baisse de la demande et anticipe au contraire une croissance en 2023 (+2,2 millions de barils par jour en 2023, après +2,5 millions en 2022).

La manne amassée par les majors crée pour l'heure un casse-tête dans la classe politique de tout l'Occident, sur fond de crise du coût de la vie.

Joe Biden dénonce

Sur le Vieux continent comme aux Etats-Unis, allumer sa chaudière, cuire du pain ou rouler au diesel est devenu une dépense lourde pour nombre de ménages et d'entreprises.

"Je fais ma part pour faire baisser les prix, il est temps que Big Oil fasse la sienne", s'était déjà emporté Joe Biden la semaine dernière.

En France, l'annonce mercredi des bénéfices de TotalEnergies - à 20,5 milliards de dollars - a encore nourri le débat pour davantage taxer ces "superprofits" (lire encadré).

Une taxe sur les bénéfices énergétiques

En Grande-Bretagne, le gouvernement a introduit en mai 2022 une taxe sur les bénéfices énergétiques exceptionnels, tout comme l'Union européenne fin septembre, avec une "contribution temporaire de solidarité", attaquée en justice par Exxon.

"Ce dont on a besoin en ce moment, c'est de plus d'offre. Au lieu de cela, ce qui a été mis en place est une pénalité sur le secteur énergétique dans son ensemble", a déploré Darren Woods, le PDG d'Exxon.

Les compagnies pétrolières investissent certes de plus en plus dans le solaire, l'éolien et autres énergies renouvelables, "mais pas autant que le montant qu'elles versent aux actionnaires", souligne David Elmes, professeur à la Warwick Business School, alors que BP freine sa transition énergétique.

L'avenir des prix

Et maintenant? "Les prix vont à mon avis augmenter du fait de l'embargo pétrolier imposé par l'Occident sur la Russie (...) donc ces entreprises seront autant profitables en 2023 qu'en 2022", analyse Moez Ajmi, consultant au cabinet EY. D'autant que les compagnies pourront compter sur une demande "clairement encore au rendez-vous, surtout avec le renoncement de la politique zéro Covid en Chine".

Or, cette demande en gaz et pétrole reste soutenue par les dizaines de milliards de subventions pour les factures des consommateurs, qui "ne font que prolonger la crise", estime Adi Imsirovic. A vouloir "subventionner les combustibles fossiles, (...) la demande continue de croître au lieu de baisser" alors que "le meilleur remède contre les prix élevés sont les prix élevés", ajoute-t-il. Pour le chercheur, les gouvernements de l'UE devraient d'abord se contenter d'aider "les plus pauvres".

afp/miro

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TotalEnergies a dégagé en 2022 le meilleur bénéfice de son histoire

Le pétrolier français TotalEnergies a dégagé en 2022 le bénéfice le plus important de son histoire grâce à l'envolée des cours du gaz et du pétrole dans le sillage de la guerre en Ukraine, faisant resurgir les appels à taxer davantage les "superprofits" et à arrêter l'exploitation d'hydrocarbures.

L'entreprise française a dévoilé mercredi un bénéfice net annuel de 20,5 milliards de dollars (18,9 milliards de francs), après 16 milliards en 2021, son record précédent. Mais sa rentabilité hors norme est mieux reflétée dans les 36,2 milliards de bénéfice ajusté, qui exclut notamment 14,8 milliards de perte comptable liée au retrait progressif de ses activités en Russie.

"Le montant" comme les "conditions" d'une ristourne restent à déterminer, a déclaré le PDG du groupe pétrolier Patrick Pouyanné devant la presse, en reconnaissant qu'un litre de carburant à deux euros constituait un "seuil psychologique (...) dans les têtes des Français". "Nous sommes prêts à envisager" une nouvelle ristourne, a-t-il dit.

Equinor dégage un résultat record en 2022 grâce à la flambée des cours

Le géant norvégien de l'énergie Equinor a publié mercredi des résultats record pour 2022 grâce à la flambée des cours, ce qui va lui permettre de choyer ses actionnaires.

Le bénéfice net a plus que triplé l'an dernier pour atteindre 28,7 milliards de dollars, dopé en particulier par l'envol du prix du gaz qui a occulté un léger repli de la production. Celle-ci a reculé de 2% à 2,04 millions de barils-équivalent par jour (Mbep/j).

Mis en avant par le groupe, le bénéfice net ajusté - qui gomme certains exceptionnels - s'est élevé à 22,7 milliards de dollars contre 10 milliards en 2021, pour un chiffre d'affaires en augmentation de 66% à 150,8 milliards.

Ces performances vont permettre à Equinor de rémunérer généreusement ses actionnaires: cette année, le groupe prévoit de redistribuer 17 milliards de dollars sous forme de dividendes et de rachat d'actions.