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Une société clandestine israélienne aurait manipulé plus de trente campagnes électorales

L'enquête internationale de journalistes "Story Killers" relève l'ampleur de l'industrie de la désinformation
L'enquête internationale de journalistes "Story Killers" relève l'ampleur de l'industrie de la désinformation / Forum / 3 min. / le 15 février 2023
Une entreprise clandestine israélienne, spécialisée dans la manipulation électorale notamment par les réseaux sociaux, a été utilisée pour influencer des dizaines d'élections dans le monde, particulièrement en Afrique, selon le collectif de journalistes d'investigation Forbidden Stories.

La société, sans existence légale, surnommée "Team Jorge" par les journalistes en raison du pseudonyme d'un de ses responsables, Tal Hanan, est composée d'anciens membres des services de sécurité israéliens, a révélé le collectif mercredi. Ses différents commanditaires n'ont pas été identifiés.

Trois membres de Forbidden Stories travaillant pour Radio France ou les journaux israéliens The Marker ou Haaretz se sont fait passer pour des clients potentiels pour recueillir pendant plusieurs mois des informations.

Jorge était déjà impliqué dans le scandale Cambridge Analytica en 2018, du nom de cette entreprise accusée d'avoir analysé des volumes importants de données pour vendre des outils d'influence, utilisés notamment lors du référendum sur le Brexit ou durant les élections américaines de 2016. Plus de 87 millions de comptes Facebook auraient été ciblés.

Plus de 30 campagnes électorales concernées

Avec sa nouvelle structure, l'ancien sous-traitant de Cambridge Analytica a revendiqué à ses faux clients d'être "intervenu dans 33 campagnes électorales au niveau présidentiel", a indiqué Radio France. Selon les précisions d'un autre responsable, "les deux tiers d'entre elles" ont eu lieu "en Afrique anglophone et francophone. Vingt-sept ont été un succès".

En Europe, la société serait intervenue dans le référendum organisé par les indépendantistes catalans en 2014, non reconnu par le gouvernement espagnol, précise le site de Radio France.

Plus récemment, elle a recruté un journaliste français opérant sur BMFTV afin qu'il dénonce les sanctions imposées aux oligarques russes depuis l'invasion de l'Ukraine.

Près de 40'000 faux comptes

La société a notamment développé depuis six ans une plateforme numérique qui lui permet de créer à volonté des faux comptes sur les réseaux sociaux et de les animer pour leur donner un vernis d'existence, explique le collectif.

"Début janvier 2023, le système exploitait 39'213 faux profils différents" représentant diverses ethnies, nationalités et genres, selon Radio France. Ces comptes, consultables dans un catalogue, peuvent être activés automatiquement afin d'inonder les réseaux sociaux de récits fabriqués de toutes pièces.

Espionnage et influences

L'entreprise recourt aussi à l'espionnage de personnages clés en les plaçant notamment sur écoute ou en piratant leurs systèmes de messagerie. Elle propose également des actions d'influence et de lobbying auprès de décideurs ou de journalistes pour le compte de ses différents clients.

>> L'interview dans Tout un monde de Cécile Andrzejewski, journaliste au sein du collectif "Forbidden Stories" :

Cécile Andrzejewski, journaliste au collectif "Forbidden Stories". [Investigate Europe - DR]Investigate Europe - DR
"Story Killers", le business de la désinformation : interview de Cécile Andrzejewski / Tout un monde / 11 min. / le 16 février 2023

Miruna Coca-Cozma/mera avec afp

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Forbidden Stories

Forbidden Stories ("histoires interdites") est un réseau de journalistes d'investigation créé en 2017 et dont fait partie la RTS. Il s'est donné pour mission de poursuivre le travail d'autres journalistes menacés, emprisonnés ou assassinés. Ce consortium avait fait éclater en 2021 le scandale du logiciel espion israélien Pegasus.