Depuis plusieurs mois, de larges pans de la population iranienne protestent contre le régime brutal des mollah. Un mouvement de contestation déclenché en septembre dernier par la mort de Mahsa Amini, arrêtée par la police des mœurs pour ne pas avoir porté son voile correctement.
Le fait que l'ambassadrice de Suisse, recouverte d'un tchador, à savoir un vêtement traditionnel iranien porté par les femmes, se rende dans un sanctuaire aux côtés de deux mollah a donc provoqué l'indignation sur les réseaux sociaux.
"Nous, Iraniens, sacrifions nos vies et descendons dans la rue pour lutter contre le hijab et le régime de terreur islamique. Quand l'ambassadrice suisse en Iran Nadine Oliveri Lozano revêt le tchador et flirte avec les tueurs. Elle ignore la lutte des Iraniens pour la liberté et les droits!", pouvait-on notamment lire sur Twitter.
Un autre tweet de protestation:
"Dialogue interreligieux"
Contacté par la RTS, le DFAE a réagi mercredi soir à la polémique par écrit. "Lors de la visite du site religieux, le protocole vestimentaire en vigueur pour les femmes a été respecté. Le dialogue interreligieux revêt une grande importance dans le contexte actuel", a-t-il indiqué.
Il ajoute que la Suisse utilise tous les canaux existants pour promouvoir le dialogue, notamment entre les Etats dans le cadre de ses bons offices. "Parallèlement, la Suisse prend clairement et à plusieurs reprises position sur les violations des droits de l'homme en Iran", se défend-il encore.
Alain Berset également pointé du doigt
Mais cette controverse s'inscrit dans un contexte déjà tendu. Il y a une semaine, le président de la Confédération Alain Berset faisait face aux critiques pour avoir félicité la République islamique d'Iran pour son 44ème anniversaire.
"La Suisse a eu une position très claire sur l'Iran. Il faut maintenant replacer les choses dans leur contexte. Le télégramme envoyé à l'Iran a été modifié pour insister sur l'importance, pour la Suisse, du respect des droits humains" s'était-il défendu jeudi dernier en conférence de presse.
"En parallèle, j'ai eu l'occasion de signer une lettre qui a été envoyée à l'Iran dans laquelle nous appelons à l'arrêt immédiat des exécutions et à la désescalade dans le pays", avait-il encore ajouté.
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Fanny Zürcher/hkr
La communauté iranienne de Suisse fâchée
L'affaire suscite un sentiment de colère au sein de la communauté iranienne de Suisse. "C'est absolument choquant, incompréhensible, déconnecté de la réalité, d'avoir une ambassadrice de notre pays qui se comporte comme cela", a déploré l’avocate genevoise Mitra Sohrabi, membre du mouvement contestataire Femme, vie, liberté, jeudi dans le 12h30 de la RTS.
Cette nouvelle controverse intervient dans un climat de tensions autour de l’action de la diplomatie helvétique en Iran, où elle représente les intérêts des Etats-Unis.
"En 44 ans, il n'y a pas de bilan positif", estime Mitra Sohrabi. "A un moment donné, quand c'est un échec cuisant, on doit quand même se poser la question de savoir si on ne doit pas faire autre chose".
Le Parlement pourrait d'ailleurs mettre la pression sur le Conseil fédéral, dès la semaine prochaine. Le Conseil national discutera notamment des sanctions contre l'Iran.