Pour la dixième semaine consécutive, des manifestations géantes ont eu lieu dans les grandes villes d'Israël. Elles dénoncent la réforme judiciaire entreprise par le gouvernement de Benjamin Netanyahu qui vise à limiter l'impact des décisions de la Cour suprême et les subordonner au Parlement, en violation de la séparation des pouvoirs.
Signe de la contestation grandissante, 37 membres de l’escadron 69, l'élite des pilotes de l'armée israélienne, ont dénoncé cette réforme la semaine dernière et fait savoir qu'ils ne voulaient plus regagner leurs appareils .
"Ce n’est pas une réforme, c’est une révolution, elle vise à instaurer une dictature. Je veux qu'Israël reste une démocratie, pour mes enfants, pour mon petit-fils," dénonce Tamir, un ancien soldat qui a rejoint les rangs des manifestants.
Pour le moment, seuls quelques milliers des 500'000 réservistes de l'armée israélienne ont fait part de leur voeu de désobéir. Un mouvement qui n'est pas négligeable, a expliqué dans Tout un monde, le major général de réserve Nitzan Alon: "La proportion de réservistes dans les états-majors est énorme et leur rôle est central dans le fonctionnement de l’armée israélienne."
Un dilemme pour l'armée
Les gradés craignent que des dissensions apparaissent au sein de l’armée, affirme le brigadier général de réserve Amir Avivi: "J’ai été invité à rejoindre un groupe whatsapp de pilotes de combat qui s’opposent à la désobéissance, (...) et en face, il y a un autre groupe whatsapp de pilotes de combat qui pensent le contraire. Comment va faire l’armée de l’air?" Pour Amir Avivi, l'armée doit rester unie.
Dans un élan d’unité, les gradés de la réserve ont publié dans la presse une lettre ouverte, ils appellent à laisser l'armée israélienne en dehors du débat politique et ils rappellent aux réservistes leurs devoirs de soldat.
Cette lettre se veut aussi une leçon de démocratie. "Si malgré tous nos différends, nous, les généraux israéliens, arrivons à nous asseoir autour de la même table (...) et à rédiger cet appel, alors nous disons à nos politiciens, vous aussi, vous pouvez y arriver," confirme Amir Avivi.
Les gradés redoutent une crise constitutionnelle qui mettrait l'armée dans une position délicate. Entre les juges de la Cour suprême, garants de la Constitution, et le gouvernement, elle ne saurait à qui elle doit obéir. Face à ce dilemme compliqué, les généraux appellent à la négociation.
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Sujets radio: Jessica Monteiro/Léo Bräuer-Potier
Adaptation web: Miroslav Mares
L'extrême droite israélienne impose ses réformes
Il y a trois mois, pour reprendre son poste de Premier ministre, Benjamin Netanyahu a formé une coalition notamment avec le parti sioniste religieux et le parti Otzma Yehudit d’Itamar Ben Gvir. Pour la première fois, l'extrême droite réussissait à se hisser au pouvoir en Israël.
Il s'agit là d'une occasion en or pour faire valoir leurs revendications, soit notamment l'installation d'une théocratie, donc l'inscription de préceptes religieux dans la loi, la volonté d'imposer l'hébreu comme seule langue nationale et l'éradication des "ennemis d'Israël", sans négociation, sans concession et sans compromis.
Yishai Fleisher, un conseiller de Ben Gvir, prétend que la loi doit être ramenée dans les rues en combattant le crime: "On est contre la terreur, le djihad. On n’est pas racistes, on n’a pas de problèmes avec le beau mélange qu’est Israël. C’est un Etat juif avec de nombreuses minorités qui font partie de notre pays. Mais le djihad est quelque chose d’inacceptable."
Pour Thomas Vescovi, chercheur indépendant et auteur de plusieurs ouvrages sur Israël, il s'agit d'une communication bien rodée et son objectif est la dédiabolisation du parti et la justification d'actes de violence. "Ce que cherche à refaire Ben Gvir est très clair, c'est une volonté d'expulser l'ensemble des Palestiniens qui ont participé sous une forme ou une autre à la résistance, de leur supprimer leurs droits politiques et une quelconque souveraineté."
Selon le chercheur, l'extrême droite cherche à imposer, comme seuls maîtres du territoire, la population juive et leurs dirigeants. Pour y réussir, il affirme que tous les résistants sont des terroristes.