Ni dissolution du Parlement, ni remaniement du gouvernement, ni référendum sur les retraites: les participants à une réunion du camp présidentiel à l'Elysée mardi matin ont indiqué que le chef de l'Etat n'envisageait aucune de ces options, mais avait demandé à ses troupes de faire "d'ici deux à trois semaines maximum" des "propositions" en vue d'"un changement de méthode et d'agenda des réformes".
Emmanuel Macron, qui n'a que très peu communiqué ces derniers jours, est attendu au 13 heures de TF1 et France 2 mercredi.
Depuis ce matin, il enchaîne les séances pour trouver un moyen de sortir de la crise politique après le passage en force de la réforme des retraites, adoptée finalement lundi après le rejet de deux motions de censure visant le gouvernement.
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Le président français a d'abord reçu sa Première ministre à 09h00, puis les présidents des groupes parlementaires de la majorité et certains de ses ministres. Mardi midi, il a mangé avec la présidente de l’Assemblée et le président du Sénat, avant de dîner avec des parlementaires de la majorité présidentielle.
Prise de parole attendue
L'intervention d'Emmanuel Macron à la télévision se fera dans un format inhabituel. Elle prendra la forme d'une interview et non une adresse formelle à la nation, comme il a l'habitude de le faire dans le Journal de 20 heures. Un choix de format qui s'explique peut-être par une volonté - ou une nécessité - d'apparaître moins solennel et de répondre aux critiques.
afp avec Julie Marty
Tensions encore vives
Le projet de loi de la réforme des retraites est définitivement classé mais cela n'implique pas l'arrêt des contestations pour autant. Au contraire.
"Le combat continue", ont scandé tous les leaders de la coalition de gauche Nupes. Les opposants à la réforme comptent notamment sur des recours devant le Conseil constitutionnel, également saisi par Elisabeth Borne, et ont dégainé une demande de référendum d'initiative partagée (RIP), dont les Sages doivent examiner la recevabilité.
Certains veulent continuer aussi le combat dans la rue, à l'instar du leader de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon, qui a appelé à "une censure populaire", "en tout lieu en toute circonstance".
"Rien n'entame la détermination des travailleurs", a prévenu de son côté le puissant syndicat CGT, tandis que le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger a appelé à la mobilisation pour la prochaine journée de grèves et de manifestations prévue jeudi.
La France en colère
Si la contestation sociale, encadrée par les syndicats pendant deux mois, est restée pacifique, les signes de radicalisation se multiplient depuis plusieurs jours en France.
Plusieurs manifestations, souvent émaillées de violences, ont encore eu lieu dans plusieurs villes lundi soir. Près de 300 personnes ont été interpellées, en grande majorité à Paris, où, des poubelles et des vélos ont été incendiés, selon une source policière. Les sapeurs-pompiers sont intervenus 240 fois, selon cette source.
A Donges (ouest), les forces de l'ordre sont intervenues dans la nuit de lundi à mardi pour débloquer un terminal pétrolier, occupé depuis une semaine par des grévistes. A Amiens (nord), la permanence du parti de droite Les Républicains a été vandalisée.
Tout au long de la journée lundi, la colère s'était illustrée par de nouveaux rassemblements, des piquets de grève, des routes bloquées, des transports perturbés ou encore des stations-service à sec pour la première fois depuis le début du conflit social. Le soir, des poubelles renversées et brûlées, des barricades, des jets de projectiles sur les forces de l'ordre, et des fumigènes ont marqué certaines des manifestations qui ont éclaté spontanément un peu partout en France après l'adoption de la réforme.
Mardi plusieurs grèves se poursuivaient, notamment dans le secteur pétrolier. Le gouvernement a annoncé des réquisitions de personnel au dépôt pétrolier de Fos-sur-Mer (sud-est) face au blocage.
"Pas d'interpellations injustifiées"
Le préfet de police Laurent Nuñez a affirmé mardi qu'il n'y avait "pas d'interpellations injustifiées" à Paris dans le cadre de la mobilisation contre l'emploi du 49.3 pour faire adopter la réforme contestée des retraites.
"On interpelle pour des infractions qui, à nos yeux, sont constituées" et, une fois le placement en garde à vue décidé par un officier de police judiciaire (OPJ), "nous avons 48 heures pour essayer de matérialiser l'infraction, c'est court", a insisté le préfet de police.
Près de 290 interpellations
"Quand on arrive au bout des 48 heures, parfois on n'a pas caractérisé l'infraction, on est dans un Etat de droit, c'est heureux et à ce moment-là, il n'y a pas de poursuites", a poursuivi Laurent Nuñez.
Le préfet a souligné par ailleurs "qu'un certain nombre de personnes n'ont pas été déferrées (présentées devant un juge, NDLR) mais il y a eu des alternatives aux poursuites, donc l'infraction était constituée".
Au total, 287 personnes, dont 234 à Paris, ont été interpellées lundi soir en France lors d'une cinquième soirée consécutive de manifestations spontanées contre l'usage du 49.3.