La grève des éboueurs parisiens suspendue, la mobilisation en repli contre la réforme des retraites
"Nous avons besoin de rediscuter avec les agents de la filière déchets et assainissement de la ville de Paris afin de repartir plus fort à la grève (...), car nous n'avons presque plus de grévistes", reconnaît dans un communiqué la CGT-FTDNEEA qui rassemble les éboueurs, égoutiers, conducteurs de bennes de la capitale.
"Le combat n'est pas terminé, (Emmanuel) Macron et (Elisabeth) Borne doivent retirer cette réforme et se mettre à la table des négociations", réaffirme le syndicat majoritaire dans la filière.
La grève des agents, et surtout le blocage des trois incinérateurs desservant la capitale, notamment celui d'Ivry-sur-Seine, le plus important, ont entraîné un spectaculaire entassement des déchets non ramassés dans la capitale.
7000 tonnes de déchets
Mardi, au 23e jour du mouvement, "la collecte des déchets reste très perturbée" à Paris, a résumé l'adjointe à la propreté Colombe Brossel sur Twitter. Mais le volume global baisse de nouveau avec 7000 tonnes de déchets non ramassés, contre plus de 10'000 vendredi, a indiqué la maire PS Anne Hidalgo dans un tweet.
La fin du mouvement dans deux des trois usines d'incinération, annoncée vendredi par l'agence métropolitaine Syctom, et la réquisition de la troisième par la préfecture de police ont permis un début de désengorgement. Mais des blocages subsistaient toujours mardi aux portes de deux des trois usines.
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De nouveaux heurts
L'épreuve de force se prolonge dans la rue après l'adoption de la réforme des retraites. Le mouvement social est reparti pour un tour mardi, avec son lot désormais habituel de grèves, de blocages et de heurts.
A Paris, les forces de l'ordre sont intervenues pour disperser un groupe de casseurs, dont certaines ont pillé un commerce et allumé un feu de poubelles. Vingt-deux personnes ont été interpellées, selon la préfecture de police. Les forces de l'ordre ont tiré des grenades de gaz lacrymogène pour "disloquer" "le bloc" et permettre "l'intervention des pompiers".
Des heurts entre des manifestants et les forces de l'ordre ont éclaté à Nantes (ouest), où une agence bancaire a été incendiée et le tribunal administratif visé, ainsi qu'à Rennes (ouest), où de nombreuses dégradations ont eu lieu.
Accusées de violences par les manifestants, les forces de l'ordre ont été déployées massivement pour encadrer les foules. Il y a 13'000 policiers et gendarmes mobilisés, dont 5500 à Paris.
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Moins de manifestants à Paris
Quelque 450'000 personnes ont manifesté à Paris, a annoncé la Confédération générale du travail (CGT). C'est presque moitié moins que lors de la dernière journée de mobilisation. Le ministère de l'Intérieur a lui évalué le nombre de manifestants à 93'000 dans la capitale et à 740'000 manifestants à travers le pays.
Jeudi dernier, la CGT avait recensé 800'000 manifestants à Paris et les autorités 119'000.
De nombreuses routes ont été bloquées aux alentours des grandes villes du pays, avec à la clé d'importants bouchons. En outre, 15% des stations-service du pays sont à court d'au moins un carburant, conséquence de l'arrêt de cinq des sept raffineries du pays.
Le trafic ferroviaire est également perturbé, avec trois TGV sur cinq et un TER sur deux en moyenne selon la SNCF. Entre la Suisse et Paris, plusieurs corrrespondances ont également été supprimées, comme l'indique le site TGV Lyria. Dans les transports parisiens, la RATP a réduit le trafic sur la plupart des lignes de métro et de RER.
Aucun recul gouvernemental
Ces désagréments sont assumés par les syndicats, qui continuent de réclamer le retrait de la réforme et de sa mesure-phare: le report de l'âge légal de 62 à 64 ans. Mais le porte-parole de l'exécutif, Olivier Véran, a refermé la porte lundi en affirmant que "la loi sur les retraites est derrière nous".
A l'Elysée, où Emmanuel Macron a reçu lundi les cadres de la majorité et du gouvernement, le chef de l'Etat a pourtant dit vouloir "continuer à tendre la main aux forces syndicales" sur d'autres sujets, selon un participant.
La gauche, par la voix de plusieurs de ses ténors, dont le leader du PCF Fabien Roussel, accuse Emmanuel Macron de "jouer le pourrissement" du mouvement social.
Pour "trouver une voie de sortie" à la crise sociale, le numéro un de la CFDT, Laurent Berger, a appelé sur France Inter à mettre en place une "médiation" sans attendre la décision du Conseil constitutionnel, qui doit se prononcer d'ici trois semaines sur le projet de loi.
Cette proposition est partagée par les autres syndicats, qui vont ensemble "écrire au président de la République" Emmanuel Macron, pour lui demander une nouvelle fois "de suspendre son projet", a précisé le leader de la CGT Philippe Martinez.
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agences/oang/vajo