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Au check-point d'Hébron, Israël teste un fusil qui utilise l'intelligence artificielle

Le fusil automatisé Smart Shooter se site juste au-dessus du tourniquet du checkpoint de Hébron. [RTS - Alice Froussard]
A Hébron, Israël teste un fusil qui utilise l'intelligence artificielle / La Matinale / 2 min. / le 13 avril 2023
Entre les tourniquets de métal, les barbelés et les grillages, les habitants palestiniens d’Hebron, ville occupée au sud de la Cisjordanie, ont remarqué un nouvel objet depuis quelques mois: un fusil intrigant, équipé d’un paravent. Il s’agit du "Smart Shooter", une arme à intelligence artificielle que l’armée israélienne a installé au-dessus du "check-point".

Dans cette ville coupée en deux vivent d'un côté 700 colons israéliens et autant de soldats. De l'autre, des Palestiniens, chez qui cette nouvelle arme suscite inquiétude et amertume.

Tous les jours, Mohammad, 19 ans, doit traverser ce checkpoint de l'armée israélienne pour passer de l'autre côté de la ville. Après les détecteurs de métaux et les contrôles d'identité obligatoires, le voilà confronté à ce fusil d'un nouveau genre. "On ignore comment fonctionne exactement cette nouvelle arme qu'ils ont installée. On sait seulement qu'elle peut tirer toute seule, que c'est une sorte d'arme autonome. Depuis son installation, rien n'a vraiment changé, mais Dieu sait ce qu'ils testeront encore sur nous à l'avenir", a-t-il témoigné jeudi dans La Matinale de la RTS.

Un fusil et des algorithmes

Le "Smart Shooter", tireur intelligent en français, est une arme qui peut être contrôlée à distance. Elle utilise également des algorithmes, comme ceux des missiles de précision. Grâce à une intelligence artificielle, l'arme permet donc à l’opérateur d’identifier une cible, de la suivre et de garantir sa "neutralisation".

Contacté, le fabricant précise qu’il ne peut pas discuter directement de la situation dans la ville palestinienne d’Hébron pour des questions de confidentialité, mais il précise l’objectif de ce type de technologies: "Mettre les soldats hors d’atteinte, hors de danger en cas de répliques ou de violences". L'arme permettrait aussi "d'atténuer les responsabilités, car le soldat n'est plus [directement] celui qui tire. Il peut le décider, mais ce n'est plus lui qui appuie sur la gâchette. Il n'est en quelque sorte plus responsable de la "dernière action".

Le Smart Shooter utilise l'intelligence artificielle pour suivre ses cibles. [RTS - Alice Froussard]
Le Smart Shooter utilise l'intelligence artificielle pour suivre ses cibles. [RTS - Alice Froussard]

"La déshumanisation des Palestiniens"

Pour Monzer, un Palestinien de 41 ans qui lui aussi doit passer tous les jours par ce check-point, cette nouvelle technologie ne change rien. "Les Israéliens n'ont pas besoin d'une arme pour se débarasser de nous. Ici, c'est simple, les Palestiniens n'ont aucun droit. C'est votre pièce d'identité qui dit si vous avez le droit de vivre ou de mourir. Si quelqu'un a les mains dans les poches, il peut se faire tirer dessus. Le soldat dira qu'il vous a soupçonné de vouloir mener une attaque au couteau", juge-t-il.

A ses côtés, sa femme Larissa estime que cette arme incarne "la déshumanisation des Palestiniens par Israël".

De son côté, l'armée israélienne indique que le Smart Shooter a fait l'objet d'un examen complet sur le plan technique et juridique. Elle ajoute que l'arme ne tire que des balles d'acier recouvertes de caoutchouc ainsi que des gaz lacrymogènes.

Alice Froussard

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