Pour le 21e jour consécutif, les cinq millions d'habitants de Khartoum, la capitale soudanaise, ont été réveillés par des frappes aériennes et des tirs de mitrailleuse, ont raconté des témoins à l'AFP. D'autres citoyens du pays ont rapporté jeudi des combats à El-Obeid, à 300 km au sud de la capitale.
Les combats entre l'armée, sous le commandement du général Abdel Fattah al-Burhane, et les Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo, ont fait depuis le 15 avril environ 700 morts, selon l'ONG ACLED qui recense les victimes de conflits.
Beaucoup d'enfants parmi les victimes
Les Nations unies ont alerté sur le nombre "effroyablement" important d'enfants victimes de la guerre au Soudan, faisant état d'informations locales selon lesquelles sept d'entre eux seraient tués ou blessés chaque heure dans le conflit qui déchire le pays.
"Ainsi que nous l'avions craint et prévu, la situation au Soudan est devenue fatale à un nombre effroyablement important d'enfants", a déclaré un porte-parole de l'agence onusienne de l'Unicef, James Elder, devant la presse à Genève.
Selon lui, l'agence a reçu des informations d'établissements de santé de Khartoum et de la région du Darfour selon lesquelles 190 enfants auraient été tués et 1700 autres blessés dans les onze premiers jours du conflit, qui a débuté le 15 avril. Ces estimations n'ont pas encore pu être vérifiées de manière indépendante par l'ONU.
Ce chiffre ne recenserait toutefois que les enfants ayant été pris en charge dans un de ces établissements, a souligné le porte-parole, ajoutant: "La réalité pourrait être bien plus grave".
Joe Biden veut la paix
Le président américain Joe Biden a haussé le ton, jeudi: "la tragédie (...) doit cesser", a-t-il plaidé, en agitant la menace de sanctions contre "les individus qui menacent la paix", sans toutefois nommer personne.
Le pays de 45 millions d'habitants n'est sorti qu'en 2020 de deux décennies de sanctions américaines imposées à la dictature militaro-islamiste du général Omar el-Béchir, renversé par l'armée sous la pression de la rue en 2019.
Besoin d'argent
"A chaque minute de guerre en plus, des gens meurent ou sont jetés dans les rues, la société se désagrège et l'Etat se décompose", déplore de son côté Khalid Omar Youssef, ancien ministre civil limogé lors du putsch.
En trois semaines, les combats ont fait quelque 700 victimes, plus de 5000 blessés, déplacés au moins 335'000 personnes et ont poussé 115'000 autres à l'exil, selon l'ONU, qui réclame 395 millions de francs suisses pour aider le pays, l'un des plus pauvres au monde.
L'ONU estime que 860'000 personnes, des Soudanais mais également de nombreux Sud-Soudanais retournant dans leur pays, pourraient traverser les frontières ces prochains mois. Le patron de l'ONU Antonio Guterres a jugé "absolument essentiel" que la crise ne déborde pas des frontières.
Pourparlers tous azimuts
Alors que les canaux diplomatiques se multiplient en Afrique et au Moyen-Orient, l'armée a plaidé pour "des solutions africaines aux problèmes du continent", tout en saluant la médiation américano-saoudienne. L'émissaire du général Burhane était jeudi à Addis Abeba (Ethiopie). Le Caire a annoncé avoir eu au téléphone les deux généraux rivaux.
Dimanche, les ministres arabes des affaires étrangères se réuniront autour du "dossier soudanais", dans lequel ils soutiennent des camps différents.
L'armée s'est engagée à "nommer un émissaire pour négocier une trêve." Les FSR, eux, disent avoir accepté trois jours de trêve --et non une semaine--, et parlent avec plusieurs pays et organisations.
furr avec afp/ats
Réunion du Conseil des droits de l'homme
Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU se réunira en session spéciale jeudi prochain sur la crise au Soudan. Une demande a été lancée vendredi soir par quatre Etats, soutenus par plus de 50 autres pays dont la Suisse, a affirmé le Haut-Commissariat aux droits de l'homme.
Au moins un tiers des 47 membres de l'instance doivent appuyer une requête pour qu'elle soit validée. Cette réunion sera la 36e session spéciale du Conseil des droits de l'homme.