Tout un symbole pour le chef de l'Etat, 69 ans, donné favori malgré vingt ans de pouvoir face à son adversaire du CHP, le social-démocrate Kemal Kiliçdaroglu, 74 ans. Adnan Menderes, figure emblématique pour la droite conservatrice turque, avait mis fin en 1950 au règne du CHP laïque de Mustafa Kemal "Atatürk", père de la Turquie moderne.
Recep Tayyip Erdogan, qu'on donnait usé et fatigué, affaibli par la crise économique et les conséquences de séisme du 6 février, a créé la surprise en remportant 49,5% des voix le 14 mai, contre 45% à son rival.
Depuis, Kemal Kiliçdaroglu, à la tête d'une coalition de six partis, de la droite nationaliste à la gauche, a tenté vaille que vaille de mobiliser ses troupes, y compris sur sa droite. Ses partisans ont essaimé les rues des grandes villes pour déposer des tracts dans les immeubles appelant la population à voter dimanche: "Voisin, n'oublie pas le deuxième tour le 28 mai".
Temps de parole inégaux
Samedi, c'est le populaire maire CHP d'Istanbul, Ekrem Imamoglu, qui prendra la parole dans la métropole. Mais à la différence du président sortant, omniprésent sur les estrades et à la télévision, Kemal Kiliçdaroglu a dû batailler dur pour se faire entendre à travers le pays.
Selon l'organisation Reporters sans frontières, la télévision publique TRT a accordé "soixante fois plus de temps d'antenne" à Recep Tayyip Erdogan qu'à son rival pendant la campagne.
"Fabriquer des fausses nouvelles"
Vendredi soir, en direct sur la chaîne Fox, Kemal Kiliçdaroglu a encore dénoncé le blocage de ses SMS "sur ordre d'Erdogan" par le BSK, l'autorité de régulation des télécommunications. Le camp du président "cherche par tous les moyens à rester au pouvoir", a-t-il accusé: "Ils ont pris le contrôle de toutes les institutions (qui) appartiennent à 85 millions de personnes, pas à un seul homme".
Simultanément, le chef de l'Etat accusait sur la TRT "les médias occidentaux de toujours chercher à fabriquer des fausses nouvelles".
Aller dans le sens du peuple
Kemal Kiliçdaroglu, qui avait prôné l'apaisement avant le premier tour, a musclé son discours depuis et joué sur le sentiment anti-syrien d'une partie du pays. Le candidat a promis, notamment dans le sud frontalier de la Syrie, gravement touché par le tremblement de terre, de "renvoyer les Syriens" dans l'année qui suivra son élection.
Les bureaux de vote seront ouverts dimanche de 8h00 (5h00 GMT) à 17h00 (14h00 GMT) et les premiers résultats sont attendus en début de soirée. Mais cette fois, le CHP entend déployer "cinq observateurs par urnes, pas un ou deux... soit un million de personnes pour garantir la sécurité" du vote.
afp/juma