La direction de ces cinq années à venir ne devrait pas changer, le Parlement, issu des législatives du 14 mai, étant le plus à droite de l'histoire de la République centenaire. Recep Tayyip Erdogan souhaite plutôt assurer sa transition afin de perpétuer son héritage politique au-delà de sa présidence. Il devrait donc aussi maintenir ce nationalisme dont est imprégnée la Turquie depuis des décennies. Pour cela, il pourra compter sur ses alliances avec les partis ultra-nationalistes et islamistes.
Face à la situation économique du pays et au séisme, les défis du troisième mandat de Recep Tayyip Erdogan sont nombreux. Voici quelques-uns des dossiers prioritaires qui l'attendent.
Lutte contre l'inflation
Plus qu'une priorité, lutter contre l'inflation sera une urgence pour soulager une population à bout de souffle. Les chiffres officiels indiquaient que l'inflation restait à plus de 40% sur un an en avril après avoir dépassé les 85% à l'automne. Cette amélioration est le résultat d'une baisse régulière des taux d'intérêt voulue par le président Erdogan.
Entre août et février, le principal taux directeur a été abaissé de 14% à 8,5%, des baisses justifiées par la banque centrale par le souci de soutenir "l'emploi et la production industrielle".
Recep Tayyip Erdogan affirme, à rebours des théories économiques classiques, que les taux d'intérêt élevés favorisent l'inflation et il a indiqué pendant sa campagne qu'il n'avait aucune intention de les relever.
D'autre part, la livre turque a perdu plus de la moitié de sa valeur en deux ans et a atteint cette semaine les 20 livres pour un dollar. Selon les données officielles, Ankara a dépensé 25 milliards de dollars en un mois pour la soutenir. Mais son effondrement semble inéluctable. D'autant que les réserves en devises sont passées dans le rouge pour la première fois depuis 2002.
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19h30:
Reconstruction post-séisme
Le tremblement de terre de magnitude 7,8 du 6 février a dévasté des zones entières du sud-est de la Turquie, faisant au moins 50'000 morts et plus de trois millions de déplacés. Le président turc a promis de reconstruire au plus vite 650'000 logements dans les provinces affectées. Le coût total des dégâts du désastre s'élève à plus de 100 milliards de dollars selon l'ONU et Recep Tayyip Erdogan.
Véto sur l'entrée de la Suède dans l'Otan
Les alliés de la Turquie au sein de l'Otan attendent qu'Ankara lève son veto à l'entrée de la Suède dans l'Alliance atlantique, bloquée depuis mai 2022.
Alors que Stockholm a multiplié les gestes de bonne volonté, dont l'adoption début mai d'une nouvelle loi antiterroriste, la Turquie - comme la Hongrie - est restée inflexible, continuant d'exiger l'extradition de dizaines d'opposants présentés comme des "terroristes" kurdes ou issus du mouvement du prédicateur turc en exil Fethullah Gülen, qu'Ankara accuse d'être derrière la tentative de coup d'Etat de juillet 2016. Les ministres des Affaires étrangères de l'Otan doivent se retrouver mardi à Oslo avant le sommet des chefs d'État en juillet à Vilnius, qui escomptent une bonne nouvelle.
Le veto turc à l'encontre de la Finlande a en revanche été levé début avril. Les deux pays nordiques, traditionnellement neutres, avaient déposé leur demande d'adhésion après l'agression russe contre l'Ukraine en février 2022, se sentant vulnérables face à leur puissant voisin.
Rapprochement avec la Syrie
Recep Tayyip Erdogan a tenté ces derniers mois de se rapprocher de son voisin, le président syrien Bachar al-Assad, mais, malgré une médiation russe, ses tentatives n'ont pas abouti. Bachar al-Assad a exigé en préalable à toute rencontre avec son homologue le retrait des forces turques stationnées dans le nord de la Syrie sous contrôle rebelle et la fin du soutien d'Ankara aux groupes rebelles opposés à Damas.
La Turquie, qui a lancé depuis 2016 plusieurs incursions contre des groupes djihadistes et kurdes en territoire syrien, accueille sur son sol 3,4 millions de réfugiés syriens ayant fui la guerre. Recep Tayyip Erdogan a annoncé début mai la construction de 200'000 logements sur treize sites du nord de la Syrie pour permettre le retour "volontaire" d'au moins un million de personnes.
juma avec agences
Stockholm et Ankara discuteront de l'adhésion de la Suède à l'Otan
L'agenda du nouveau mandat présidentiel turc n'attend pas.
Le ministre suédois des Affaires étrangères, Tobias Billstrom, a dans un premier temps déclaré lundi à la chaîne de télévision publique SVT qu'il rencontrerait son homologue turc Mevlut Cavusoglu, lors d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de l'Alliance à Oslo jeudi. "Mais nous avons été informés que le ministre turc des Affaires étrangères ne viendrait pas, il n'y aura donc pas de réunion à Oslo", a précisé par la suite un porte-parole du ministre suédois, tout en ajoutant que la réunion aurait néanmoins lieu "bientôt".
Les discussions entre les deux pays sur l'Otan ont été interrompues en raison des élections en Turquie.
"Je me réjouis de pouvoir passer à la vitesse supérieure et d'accélérer les choses maintenant que nous connaissons le résultat", a déclaré Tobias Billstrom.