Un barrage clé partiellement détruit
Situé sur la ligne de front entre les régions contrôlées par Moscou et le reste de l'Ukraine, le barrage de la centrale hydroélectrique de Kakhovka, dans le sud de l'Ukraine, a été en partie détruit dans la nuit de lundi à mardi, provoquant d'importantes inondations jusqu'à la ville de Kherson.
>> Le suivi minute par minute de la situation en Ukraine : Le barrage de Kakhovka partiellement détruit par une explosion, plusieurs villages en aval inondés
Aménagé sur le fleuve Dniepr en 1956, pendant la période soviétique, l'ouvrage, construit en partie en béton et en terre, mesure 16 mètres de haut et 3273 mètres de long. Il s'agit de l'une des plus grandes infrastructures de ce type en Ukraine.
Selon le site internet de la société ukrainienne exploitante, Ukrgidroenergo, la puissance de la centrale hydroélectrique, entièrement détruite mardi, était de 334,8 mégawatt (MW).
Pris dès le début de l'invasion pour cible prioritaire des Russes, le barrage permet d'envoyer de l'eau dans le canal de Crimée du Nord, qui part du sud de l'Ukraine et traverse toute la péninsule de Crimée, occupée et annexée par Moscou depuis 2014.
Ukraine et Russie se rejettent la responsabilité
La présidence ukrainienne a accusé la Russie d'avoir "fait sauter" dans la nuit le barrage pour inonder la zone et freiner l'offensive ukrainienne en préparation.
"La Russie contrôle le barrage et toute la région de Kakhovka depuis plus d'une année. Il est physiquement impossible de le faire exploser de l'extérieur, en bombardant. Il a été miné par les occupants russes. Et ils l'ont fait sauter", a déclaré le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans une vidéo partagée sur les réseaux sociaux.
"Le monde doit réagir", a-t-il ensuite appelé, dénonçant "la plus grande catastrophe environnementale causée par l'homme en Europe depuis des décennies".
De leur côté, les autorités russes ont dénoncé une attaque terroriste, terme utilisé par Moscou pour désigner une attaque ukrainienne. "Il s'agit sans équivoque d'un acte de sabotage délibéré de la partie ukrainienne qui a été planifié et réalisé sur ordre de Kiev", a déclaré à la presse le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. Il a rejeté "fermement" les accusations des autorités ukrainiennes qui en imputent la responsabilité à Moscou.
Des milliers de personnes menacées par l'inondation
Avec des villages "complètement ou en partie inondés", les autorités ukrainiennes ont rapidement dénoncé un "crime de guerre" de la Russie, pendant que le président ukrainien Volodymyr Zelensky convoquait en urgence son conseil de sécurité.
L'Ukraine a annoncé évacuer "plus de 17'000" civils des zones inondées autour du barrage de Kakhovka. "Plus de 40'000 personnes risquent d'être en zones inondées. Les autorités ukrainiennes évacuent plus de 17'000 personnes. Malheureusement, plus de 25'000 civils se trouvent sur le territoire sous contrôle russe", a indiqué sur Twitter le procureur général ukrainien Andriï Kostine.
Les autorités d'occupation installées sur place par Moscou ont elles indiqué avoir commencé l'évacuation des habitants de trois localités. Plus tôt dans la journée, elles avaient déclaré que la situation était "sous contrôle".
Inquiétudes pour la centrale nucléaire de Zaporijjia
Le barrage hydroélectrique de Kakhovka est situé le long du Dniepr, à 150 kilomètres en aval de la centrale nucléaire de Zaporijjia, dont il assure le refroidissement et qui est située dans la région voisine de Zaporijjia, elle aussi en partie occupée par les forces russes.
Il n'y a "pas de danger nucléaire immédiat", a assuré l'Agence internationale pour l'énergie atomique (AIEA), soulignant que ses experts à la centrale de Zaporijjia surveillaient la situation.
Le directeur de la centrale Iouri Tchernitchouk, installé par l'occupation russe, a assuré sur Telegram qu'"à l'heure actuelle il n'y a pas de menace" pour la sécurité de l'installation. "Cinq blocs sont arrêtés à froid, l'un est à 'l'arrêt à chaud'. Le niveau de l'eau du bassin de refroidissement n'a pas changé", selon lui. Moscou estime également que la centrale n'est pas menacée.
Pour Kiev, en revanche, le danger de catastrophe nucléaire à la centrale "augmente rapidement". La société ukrainienne exploitante, Ukrgidroenergo, estime que le réservoir du barrage "devrait être opérationnel durant les quatre prochains jours" mais son niveau décroît rapidement, menaçant le fonctionnement du système de sécurité de la centrale.
Le Premier ministre ukrainien Denys Chmygal a appelé le monde à "réagir" et estimé que "la Russie doit se retirer immédiatement de la centrale nucléaire de Zaporijjia pour éviter une nouvelle catastrophe".
jgal avec agences