Fin 2022, le nombre de déplacés s'approchait de 108,5 millions, près de 20 millions supplémentaires par rapport à fin 2021, la plus importante augmentation sur un an. Depuis, près de deux millions de personnes ont fui leur habitation au Soudan, dont 450'000 vers les pays voisins.
Un chiffre qui devrait atteindre "500'000 dans les prochains jours", a déploré devant la presse le haut commissaire Filippo Grandi, qui redoute des trafics de réfugiés vers d'autres Etats. "C'est une urgence très importante" qui n'est pas suffisamment relayée depuis que les Occidentaux ont été évacués de ce pays, insiste-t-il. Et de regretter le manque d'assistance internationale par rapport à la situation en Ukraine.
Plus largement, "certaines personnes sont beaucoup trop rapides pour aller vers un conflit et bien trop lentes pour trouver des solutions", estime-t-il. Il dénonce des refoulements ou une criminalisation des migrants et des réfugiés et en appelle aux dirigeants pour convaincre leurs populations de l'importance d'assister ceux qui en ont besoin.
Et de dénoncer une "dévastation" pour les millions de civils contraints de fuir et "une mise en accusation de la situation actuelle dans le monde", en permanence confronté à des urgences. Jamais le HCR n'avait autant décrété de situations inhabituelles que l'année dernière, plusieurs dizaines.
Missions dangereuses en Ukraine
Parmi le total de décembre dernier, 35,3 millions de personnes étaient réfugiées et près de 63 millions déplacées internes. La guerre en Ukraine est la première responsable, avec un nombre de réfugiés passant de 27'300 fin 2021 à près de 5,8 millions. Après la destruction du barrage de Nova Kakhovka la semaine dernière, Filippo Grandi n'a pas d'indication sur des réfugiés additionnels, mais on compte des "milliers de déplacés".
"La majorité des personnes ne veulent pas quitter leurs maisons" et la difficulté est de les aider face à une "situation dramatique". Filippo Grandi n'a jamais dû autoriser autant de missions d'urgence qu'en une semaine, tant ces personnes sont proches de la ligne de front et exposées à des menaces.
Plus largement, les pays pauvres ou à revenus intermédiaires, et non les Etats riches, continuent d'accueillir le plus grand nombre de déplacés. Filippo Grandi cible certains responsables politiques qui affirment le contraire. Plus d'un réfugié sur cinq se trouve dans l'un des pays les plus pauvres et sept sur dix ne vont pas plus loin qu'un pays voisin.
Les financements de l'assistance requise pour ces personnes sont restés largement inférieurs aux besoins, de même que l'enveloppe du HCR lui-même qui n'a reçu pour le moment qu'un tiers de son budget. "Il faut bien davantage de soutien international et de partage équitable de responsabilités", ajoute Filippo Grandi, qui exclut toute aide financière massive du secteur privé pour l'agence onusienne. "Bien davantage doit être fait pour mettre un terme aux conflits", insiste-t-il encore.
Contre l'"externalisation" vers des Etats tiers
Il salue les "étapes supplémentaires" décidées la semaine dernière par les pays européens, dont la Suisse, vers un nouveau pacte pour l'asile et la migration. "Nous n'y sommes pas encore", mais "c'était un signal positif", même si des problèmes subsistent, et "relativement équitable" pour les personnes déplacées elles-mêmes, affirme le haut commissaire.
Il appelle à nouveau les Etats européens à dialoguer avec tous les pays de transit en Afrique, pas seulement à discuter sur le contrôle des frontières dans les pays voisins du continent européen. Ceux qui veulent demander l'asile dans un pays européen doivent pouvoir le faire, "sans être mis en prison", d'autant plus que ces Etats ont besoin de main-d'oeuvre, selon lui.
Il est contre toute "externalisation" de requêtes à des pays tiers, comme la Grande-Bretagne l'a fait par exemple avec le Rwanda. En revanche, il salue plusieurs initiatives américaines pour faciliter l'accès de réfugiés au territoire américain, dont des applications.
L'année dernière, près de 340'000 réfugiés ont aussi pu rentrer chez eux, dans plusieurs dizaines de pays. Même si le nombre a diminué en un an, des retours significatifs ont été observés au Soudan du Sud, en Syrie ou encore au Cameroun. Près de 5,8 millions de déplacés internes ont également retrouvé leur habitation, notamment en Ethiopie, en Birmanie ou en Syrie.
De nombreux acteurs doivent se retrouver en décembre prochain à Genève, pour le second Forum mondial sur les réfugiés. Ils doivent offrir des solutions pour assister ces personnes dans les différents pays.
ats/ther