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Le futur mobilier liturgique de Notre-Dame de Paris dévoilé

Mise en situation du projet de chaises de Ionna Vautrin dans la cathédrale Notre-Dame de Paris. [Ionna Vautrin]
Le futur mobilier liturgique de Notre-Dame de Paris dévoilé / Le Journal horaire / 36 sec. / le 23 juin 2023
Notre-Dame de Paris, partiellement détruite par un incendie en 2019, doit rouvrir fin 2024 avec un tout nouveau mobilier liturgique en bronze brun foncé, sobre et massif, ainsi que 1500 chaises design ajourées en chêne massif.

L'archevêque de Paris, Mgr Laurent Ulrich, a retenu les projets de Guillaume Bardet, 51 ans, et Ionna Vautrin, 43 ans, deux artistes et designers français, choisis parmi une soixantaine de candidats, qui réaliseront ces meubles dans une fonderie de la Drôme et une menuiserie des Landes, dans le sud-est et le sud-ouest du pays.

Guillaume Bardet, également céramiste, a choisi du bronze brun foncé pour le mobilier liturgique, un ensemble de cinq meubles et objets sacrés.

Ionna Vautrin, qui a notamment réalisé des lampes dans les trains grande vitesse français TGV, s'est orientée vers du chêne massif pour l'assise des chaises, aux lignes simples et avec un dossier à barreaux assez bas pour s'accouder et prier.

Mise en situation du projet de mobilier liturgique de Guillaume Bardet dans la cathédrale Notre-Dame de Paris. [Guillaume Bardet]
Mise en situation du projet de mobilier liturgique de Guillaume Bardet dans la cathédrale Notre-Dame de Paris. [Guillaume Bardet]

Retour de l'éclat blanc de la pierre

Notre-Dame, chef d'oeuvre de l'art gothique admiré dans le monde entier, accueillait 12 millions de visiteurs en moyenne chaque année avant l'incendie du 15 avril 2019, 2500 offices et 150 concerts.

En entrant dans les lieux "fin décembre 2024 si tout va bien", ils vont être "surpris" par une cathédrale "quasi-neuve", assure l'archevêque, enthousiaste.

Notre-Dame a déjà retrouvé "la blondeur de la pierre de ses murs et la fraîcheur des peintures de Viollet-Le-Duc (architecte rénovateur au XIXe siècle, n.d.l.r.) dans les chapelles rayonnantes", après "des siècles de crasse" qui les avaient noircis autant que la fumée des bougies et de l'incendie, souligne-t-il.

Le parcours des visiteurs revu

Les visiteurs arpenteront aussi un parcours épuré avec une circulation simplifiée qui "épousera l'ensemble du mystère de la révélation chrétienne (...) mieux compréhensible pour permettre aux visiteurs d'approfondir le sens de cette histoire juive et chrétienne".

Concernant la signalétique, le diocèse a abandonné l'idée de projections pédagogiques sur les murs. Le travail se poursuit sur des inscriptions calligraphiques avec "une recherche sur le graphisme propre à Notre-Dame, à l'identité forte", selon Mgr Ulrich.

Une fois le réaménagement intérieur achevé, à peine entrés par le portail principal, les visiteurs découvriront un tout nouveau baptistère (où l'on donne le baptême) en cuivre et miroir poli, doté d'un couvercle doré imitant l'onde de l'eau et surmonté d'une croix dorée.

Mise en situation du projet de mobilier liturgique de Guillaume Bardet et de chaises de Ionna Vautrin dans la cathédrale Notre-Dame de Paris. [DR]
Mise en situation du projet de mobilier liturgique de Guillaume Bardet et de chaises de Ionna Vautrin dans la cathédrale Notre-Dame de Paris. [DR]

Au coeur de l'axe central de la nef, croyants et touristes verront aussi un nouvel autel géométrique épuré, "un bloc fort qui semble tiré de la terre pour le sacrifice de Jésus et qui est pacifié en se transformant en table pour célébrer la messe", selon l'archevêque.

A ses côtés, une cathèdre (ou chaise de l'évêque) et son siège associé, le tabernacle (petit meuble qui renferme le "pain consacré") en forme de chapelle stylisée et un épais ambon (ou pupitre sur lequel est posée et lue la bible).

Contrairement au précédent mobilier liturgique, disparate, les maquettes en 3D des futurs meubles témoignent d'une unité de formes, "pas minimalistes", dit Mgr Ulrich, mais qui dégagent "une présence formidable par la simplicité de leurs lignes".

Un "mur-reliquaire"

Pour abriter la célèbre couronne d'épines du Christ ramenée par Saint-Louis, le diocèse a confié à un autre artiste, Sylvain Dubuisson, la conception d'un "mur-reliquaire" en bois ajouré.

Au coeur de ce panneau décoratif, un cercle bleu, lui-même entouré d'une vaste rosace à fond d'or irradiant le motif de la croix.

Interrogé sur l'intervention d'autres artistes contemporains, l'archevêque n'a cité aucun autre nom et semble l'écarter, notamment à l'intérieur des chapelles qui entourent la nef de Notre-Dame, où un espace sera réservé à la "confession".

afp/vajo

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A Paris, au pied de Notre-Dame, les jardins de la discorde

Au pied de la cathédrale toujours en travaux, un autre chantier attend son tour: la réfection du parvis, de son sous-sol et des squares bordant ce chef-d'oeuvre de l'art gothique.

Ce n'est qu'après la réouverture du monument au public, prévue fin 2024, que doit commencer ce réaménagement voulu par la mairie de Paris, pour un budget de 50 millions d'euros (49 millions de francs), en accord avec l'Etat et le diocèse.

Le projet retenu fin juin 2022, celui du paysagiste belge Bas Smets, vise à développer les espaces végétalisés autour de la cathédrale, pour donner au parvis l'apparence d'une "clairière".

Une pétition munie de 50'000 signatures

Mais une pétition en ligne, qui a récolté près de 50'000 signatures depuis fin avril, exige que soient "restaurés à l'identique" les deux squares situés à l'est de la cathédrale, alors que Bas Smets entend les unifier pour créer "un grand square continu".

L'un des plus anciens de la capitale (1844), le square Jean-XXIII offrait avant l'incendie une vue idyllique sur le chevet avec ses bancs Davioud, ses rangées de tilleuls et son kiosque à musique... Occupé par les bâtiments du chantier de reconstruction, il est aujourd'hui méconnaissable.

La suppression prévue des grilles et le remplacement du parterre de fleurs par une pelouse accessible pour "pique-niquer et jouer" concentrent l'essentiel des critiques contre le projet, prévu à l'horizon 2027.

"Avec un écrin dénaturé, Notre-Dame va perdre de son âme", redoute Baptiste Gianeselli, l'auteur de la pétition, qui explique vouloir "défendre la ville qu'(il) aime et le patrimoine".

La controverse a pris une tournure nationale

Des associations régulièrement opposées aux projets de la ville, ainsi que Stéphane Bern, un célèbre animateur de télévision engagé dans la défense du patrimoine, ont demandé dans une lettre ouverte au président de la République Emmanuel Macron et à la maire de Paris Anne Hidalgo de privilégier "la simple restauration du square".

Le ministre des Transports Clément Beaune, à qui l'on prête des ambitions pour la capitale en vue des municipales de 2026, a, lui, fustigé une "atteinte incompréhensible" aux jardins de Notre-Dame, alors même que l'Etat était présent dans le jury du concours.

Vue sur le chantier de la restauration de Notre-Dame de Paris, le 16 mai 2023. [HANS LUCAS VIA AFP - MAURIZIO ORLANDO]
Vue sur le chantier de la restauration de Notre-Dame de Paris, le 16 mai 2023. [HANS LUCAS VIA AFP - MAURIZIO ORLANDO]

Le 11 mai, la Commission nationale du patrimoine et de l'architecte (CNPA), dont l'avis est simplement consultatif, a approuvé le projet mais à quatre conditions, dont le maintien de la grille du square.

Quant au mobilier historique, autre réserve de la CNPA qui demande de respecter "l'identité parisienne" du square, il "sera réinstallé" après la fin du chantier, assure le premier adjoint à la mairie de Paris Emmanuel Grégoire.