Cette mesure s'adresse avant tout aux jeunes qui vivent à la campagne. Pour eux, le permis de conduire est une priorité, faute de transports publics efficaces. Plus de trois quarts des 18-24 ans issus du milieu rural ont le permis; c'est seulement la moitié en région parisienne, selon l'institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire.
Le permis à 17 ans, c'est la possibilité de plus de mobilité, mais sur le plan de la sécurité routière, cette réforme inquiète certaines associations. L'association française Prévention Routière a ainsi fait part de son hostilité face à cette nouvelle mesure. Jean-Yves Lamant, président de la Ligue contre la violence routière, dénonce quant à lui une fausse bonne idée: "Les jeunes de 18 à 24 ans paient un très lourd tribut à la sécurité routière, c'est la première cause de mortalité des jeunes. Ils représentent 17% des accidents mortels alors qu'ils ne constituent que 9% de la population", indique-t-il à la RTS.
Pour Jean-Yves Lamant, le permis à 17 ans est une décision incompréhensible. "La décision consiste à élargir le champ des personnes qui vont pouvoir conduire et rentrer dans ces statistiques affreuses qui ne changent pas depuis 10 ans. On ne comprend pas", souligne-t-il.
D'autres solutions
La question de la mobilité que le gouvernement veut résoudre est importante. Mais pour Jean-Yves Lamant, il y a d'autres solutions comme le covoiturage ou la voiture sans permis par exemple.
Abaisser l'âge du permis, pour lui, est dangereux. "C'est un problème de maturité, au sens de la prise de conscience du risque et d'une inclinaison à avoir des comportements dangereux. Quand on est jeune, on se croit invincible. On croit qu'on ne peut pas mourir, que l'on peut dépasser les limites de vitesse qui sont faites pour les vieux".
Quand on est jeune, on se croit invincible. On croit qu'on ne peut pas mourir, que l'on peut dépasser les limites de vitesse qui sont faites pour les vieux
La nécessité d'une refonte
Pour le président de la Ligue contre la violence routière, il faut penser différemment l'obtention du permis de conduire en introduisant une sensibilisation aux risques. "Aujourd'hui, vous êtes devant un écran pour répondre à un QCM pour qu'on valide votre connaissance des panneaux. Ce n'est pas cela qui sensibilise et qui responsabilise aux dangers de la route. Il faut refondre ce permis de conduire pour cela: pour la sensibilisation, pour la connaissance des mécanismes qui gouvernent nos comportements, qui amènent à avoir des comportements dangereux et savoir comment les gérer", explique Jean-Yves Lamant.
Contrairement à la manière dont il est perçu aujourd'hui en France selon Jean-Yves Lamant, le permis de conduire ne doit pas être considéré comme un dû. La France ne prévoit pas de tests réguliers, de mises à niveau en fonction de l'âge ou de l'état de santé, comme c'est le cas dans beaucoup de pays européens comme l'Espagne ou les Pays-Bas qui imposent des tests pour les seniors notamment.
Favorables sous réserve
L'association 40 millions d'automobilistes est quant à elle favorable à cette réforme pour permettre davantage de mobilité, mais sous réserve que cette mesure soit, dans un premier temps, lancée dans le cadre d'une expérimentation.
Le premier groupe français d'auto école ECF y est lui aussi favorable. Son directeur, Patrick Mirouse, rappelle que l'on peut déjà passer son permis à 17 ans, à condition de le garder en réserve jusqu'à ses 18 ans. "Est-ce qu'on est plus dangereux à 17 ans qu'à 18? Non. Que ce soit à 17 ans ou à 18 ans, il faut gérer, il faut accompagner ce risque pour l'éviter", explique-t-il.
Selon Patrick Mirouse, une fois l'obtention du permis de conduire, les quelques mois qui suivent représentent une "zone de sur-risque" en raison de l'acquisition d'expérience et de confiance des nouveaux conducteurs. Le groupe d'auto école ECF propose ainsi depuis quelques années des rendez-vous "post-permis" qui consistent en une journée de perfectionnement, de sensibilisation et d'échanges. "On propose de rendre ce rendez-vous obligatoire avec le passage du permis à 17 ans pour accompagner cette période de risque", indique Patrick Mirouse.
Sujet radio: Blandine Levite
Adaptation web: Lara Donnet
Et dans les autres pays?
Tout comme en Suisse, l'écrasante majorité des pays européens fixe un âge légal du permis de conduire à 18 ans.
En Islande, en Irlande, au Royaume-Uni ou en Slovaquie en revanche, l'obtention du permis de conduire est possible dès 17 ans. C'est aussi le cas en Australie dans la plupart des régions.
Aux Etats-Unis, on peut conduire seul dès l'âge de 16 ans.
Des limitations strictes
En Australie par exemple, à 17 ans, les permis de conduire sont probatoires pendant trois ans. Pendant une année, de nombreuses restrictions s'appliquent: les conducteurs ne peuvent avoir qu'un seul passager de moins de 21 ans dans leur véhicule le soir entre 22h et 5h du matin. Dans certains Etats, il leur est carrément interdit de conduire durant ces heures nocturnes.
Dans d'autres régions du pays, les jeunes conducteurs sont soumis à des limitations de vitesse plus restrictives. Par ailleurs l'Australie, interdit formellement, pendant toute la période probatoire, la manipulation du téléphone portable au volant, même à l'arrêt.