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Une opération de communication ratée se retourne contre le géant de la mode Shein

Le groupe chinois de prêt-à-porter Shein a invité des influenceuses sur un de leurs sites de production. [Shein X - Instagram]
La marque chinoise de mode Shein voit son recours aux réseaux sociaux se retourner contre elle / Le 12h30 / 1 min. / le 30 juin 2023
Afin de redorer son image, ternie par des accusations d'exploitation des travailleurs et d'utilisation de matériaux toxiques, le groupe chinois de prêt-à-porter Shein a invité des influenceuses sur un de leurs sites de production. Cette opération de communication s'est pourtant retournée contre lui.

Le spécialiste de la mode ultra-rapide et super bon marché a fait venir les influenceuses américaines à Canton, afin de leur montrer les bons côtés de l'entreprise: de belles usines, propres et bien éclairées, avec des ouvriers heureux d'y travailler et dans lesquelles chaque vêtement est fabriqué avec soin.

Les influenceuses ont parfaitement joué le jeu. Choyées par l'entreprise, elles ont été enthousiasmées par la générosité du groupe de "fast-fashion" envers ses employés et en ont copieusement fait part sur les réseaux sociaux.

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Propagande et naïveté

Si le recours aux créateurs de contenu, désignés comme partenaires, est une stratégie marketing prisée par certaines marques, pour Shein, elle n'a fait qu'amplifier les reproches. Les experts du secteur textile parlent de propagande et les internautes, qui dénoncent la naïveté des influenceuses, vont jusqu'à parodier cette visite guidée.

Kenya Freeman, une styliste qui collabore avec Shein depuis 2019, explique avoir reçu une déferlante de commentaires négatifs dès son retour de Chine. Ce harcèlement a eu un fort impact négatif sur sa santé mentale, déplore l'influenceuse.

Quant à Dani Carbonari, après avoir initialement encensé la marque sur Instagram, l'influenceuse a supprimé son post et terminé son contrat avec Shein, admettant avoir fait "une énorme erreur".

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L'entreprise, de son côté, nie toute mise en scène et affirme être très attachée à la transparence. "Cette visite montre que nous écoutons les critiques", peut-on lire dans un communiqué. "Elle nous a permis de montrer à des influenceuses comment Shein fonctionne, afin qu'elles puissent partager leurs propres opinions avec leurs followers".

Impact environnemental "désastreux"

Suite à cette opération de communication ratée, Shein est plus que jamais dans le viseur des critiques. En parallèle, l'ONG Les Amis de la Terre a publié un rapport accablant le 22 juin dernier.

Le géant chinois propose "470'000 modèles disponibles en temps réel" sur son site, des volumes "astronomiques" et sans commune mesure avec des enseignes classiques, avec des impacts environnementaux et sociaux "désastreux", souligne le rapport.

L'association a analysé quotidiennement durant le mois de mai les "nouveautés vestimentaires commercialisées" par Shein et en a déduit que plus de 7200 nouveaux modèles étaient ajoutés en moyenne par jour et ce jusqu'à 10'800, avec une durée de vie moyenne de 65 jours sur le site. A titre de comparaison, sur la même période, H&M en proposait 25'000, note l'ONG.

Selon l'ONG Les Amis de la Terre, plus de 7200 nouveaux modèles sont ajoutés en moyenne par jour, avec une durée de vie moyenne de 65 jours sur le site de Shein. [Les Amis de la Terre]
Selon l'ONG Les Amis de la Terre, plus de 7200 nouveaux modèles sont ajoutés en moyenne par jour, avec une durée de vie moyenne de 65 jours sur le site de Shein. [Les Amis de la Terre]

La marque assurait en mai être un fabricant "à la demande", "capable de la mesurer très finement", ce qui permet de réduire de manière "drastique" les invendus et donc la production de déchets. Cette théorie tient si "le nombre de modèles ajoutés chaque jour n'est pas aussi démesuré", contre-argumente Les Amis de la Terre, qui a chiffré la production de Shein à un million de vêtements par jour, soit l'équivalent de 15'000 à 20'000 tonnes de CO2 émises.

Accusée de travail forcé, d'incitation à la surconsommation, montrée du doigt pour l'impact environnemental de ses produits et peu transparente sur sa production, la marque s'attire régulièrement les foudres des défenseurs de l'environnement et des droits humains.

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Sujet radio: Katja Schaer

Adaptation web: Emilie Délétroz avec afp

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