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La Commission européenne ouvre la voie à de nouvelles techniques génomiques

Des chercheurs belges ont développé un maïs génétiquement modifié résistant à la sécheresse. Un procédé décrié par certains écologistes
Des chercheurs belges ont développé un maïs génétiquement modifié résistant à la sécheresse. Un procédé décrié par certains écologistes / 19h30 / 2 min. / le 5 juillet 2023
La Commission européenne a proposé mercredi d'améliorer la durabilité agricole et alimentaire par le recours à certaines nouvelles techniques génomiques (NTG) pour les cultures, à l'exclusion du secteur bio.

Ces techniques, attendues par une majorité de syndicats agricoles et d'Etats membres, permettent de développer des variétés végétales améliorées, qui pourraient être plus résilientes au changement climatique et aux organismes nuisibles, nécessiteraient moins d'engrais et de pesticides ou offriraient des rendements plus élevés.

Elles pourraient déboucher sur des aliments moins allergisants ou cancérogènes ou encore des maïs plus résistants aux sécheresses.

Pas d'ajout d'ADN

Des chercheurs de l'Université de Gand, en Belgique, étudient d'ailleurs du maïs mis au point dans leur laboratoire et planté dans la campagne flamande.

"Nous mesurons les feuilles de maïs pour évaluer leur croissance. Ce sont des plants dont le génome a été modifié. En laboratoire, ils sont plus résistants à la sécheresse, et maintenant nous les testons en conditions réelles", explique Tom Van Hautegem, chercheur à l'Institut flamand de biotechnologie (VIB) de l'Université de Gand dans le 19h30 de la RTS.

Des chercheurs de l'Université de Gand, en Belgique, étudient du maïs mis au point dans leur laboratoire [RTS]
Des chercheurs de l'Université de Gand, en Belgique, étudient du maïs mis au point dans leur laboratoire. [RTS]

L'équipe de chercheurs utilise une nouvelle technique ne nécessitant pas l'ajout d'ADN d'un autre organisme, comme c'était le cas pour les premiers OGM.

"Maintenant c'est ciblé. On retire un gène à un endroit précis de l'ADN de la plante", décrit Hilde Nelissen, directrice du laboratoire VIB.

"C'est impossible de distinguer une mutation qui serait causée naturellement par le soleil d'une mutation obtenue via cette technologie", poursuit-elle.

Inquiétude des écologistes

Mais même si les chercheurs imitent la nature, les écologistes restent sceptiques. Selon Benoît Biteau, eurodéputé écologiste, "des solutions pour s'adapter au changement climatique existent déjà chez certains paysans, cela s'appelle des écotypes".

"On n'a pas besoin de ces solutions qui menacent ces ressources génétiques qui ont été mises au point par des générations et des générations de paysans", affirme-t-il.

Toutefois, selon Hilde Nelissen, le temps presse pour trouver des solutions à grande échelle afin d'affronter au mieux le défi du changement climatique.

"On ne peut pas juste prendre des variétés qui poussent sous un climat méditerranéen pour les faire pousser en Belgique, parce que le sol et la durée d'ensoleillement sont différents. On a besoin d'urgence d'adapter à la sécheresse des variétés locales", affirme la chercheuse.

>> Relire : Les OGM reviennent sur le devant de la scène face à la crise alimentaire mondiale

Prudence

Face aux craintes des détracteurs des OGM, l'exécutif européen affirme adopter une approche prudente en excluant la transgenèse (introduction de matériel génétique d'une espèce avec laquelle les croisements ne sont pas possibles), qui continuerait de relever de la législation de 2001 sur les OGM.

Elle autoriserait des techniques aboutissant à des organismes similaires à des plantes qui pourraient connaître une telle évolution par croisement naturel ou dans le cadre de la sélection conventionnelle.

On parle ici de mutagénèse ciblée (mutations du génome sans insertion de matériel génétique étranger, par exemple par des modifications au sein de la même espèce végétale) et de cisgénèse (insertion de matériel génétique entre des plantes naturellement compatibles).

La proposition, qui exclut le secteur bio à la demande de ce dernier, devra être débattue au Parlement et au Conseil européen, puis faire l'objet d'un accord interinstitutionnel.

Sujets TV: Isabelle Ory et Pascal Jeannerat

Adaptation web: edel avec ats

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Débat en Suisse aussi

En Suisse aussi, la résistance est déjà organisée face à ces nouvelles techniques génomiques (NGT) Un front uni de nombreuses ONG exigent que ces organismes soient considérés exactement comme les anciens OGM.

Pour ses détracteurs, les promesses de ces NGT ne se vérifient pas dans les faits et sont loin d'avoir fait leurs preuves. Leurs impacts, notamment sur la biodiversité, ne sont en outre pas connus.

Même si cet assouplissement ne s'appliquerait pas à la filière bio, Bio Suisse estime que cette décision entraînerait aussi des incertitudes juridiques et des charges financières importantes pour les exploitations biologiques.

Des arguments de poids

Mais en face, les partisans ont un argument de poids: contrairement aux anciens OGM, aucun matériel génétique étranger n’est introduit dans le génome de la plante. La question sera donc plus difficile à trancher que lors du débat sur les OGM d'il y a 15 ans.

De plus, le contexte a changé avec la crise climatique, car l'un des arguments en faveur de cette technologie est de pouvoir rapidement créer des variétés mieux armées pour s'adapter au changement climatique et éviter le recours à des pesticides.

>> Voir les précisions de Pascal Jeannerat dans le 19h30 :

Pascal Jeannerat, chef de la rubrique sciences et environnement, décrit la position de la Suisse au sujet des OGM
Pascal Jeannerat, chef de la rubrique sciences et environnement, décrit la position de la Suisse au sujet des OGM / 19h30 / 1 min. / le 5 juillet 2023