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Aucun signe d'apaisement au Soudan, où la guerre a déjà fait près de 3000 morts

Le nombre de personnes qui ont fui le conflit au Soudan a franchi la barre des trois millions. [Keystone]
Le conflit au Soudan fait toujours plus de victimes / La Matinale / 1 min. / le 18 juillet 2023
Près de 3000 personnes ont été tuées et plus de trois millions ont fui le Soudan, notamment au Tchad, selon le dernier bilan de l'ONU. Un chiffre qui va encore augmenter car la guerre opposant deux généraux rivaux depuis trois mois dans la capitale ne faiblit pas.

A Khartoum dimanche, des avions de combat de l'armée ont "ciblé des bases" appartenant aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), qui ont "répliqué avec des armes anti-aériennes". Ces frappes auraient fait cinq morts et 17 blessés, selon des sources civiles.

La même journée, des drones des FSR auraient également visé le plus grand hôpital de la capitale. Et ce au lendemain d'une attaque similaire contre le même établissement ayant fait cinq morts et 22 blessés, selon l'armée.

Enlisement du conflit au Darfour

Dimanche également, mais au Darfour cette fois, à l’ouest du pays, des témoins ont fait état de "violents affrontements avec plusieurs types d'armes", notamment dans la ville de Kas. Les habitants de cette ville ont affirmé que des paramilitaires avaient pillé des maisons, tandis que les paramilitaires ont salué leur "victoire" à Kas.

Plusieurs sources ont fait état de massacres de civils et d'assassinats à caractère ethnique au Darfour, imputés aux paramilitaires et aux milices arabes alliées.

Samedi, les FSR ont réfuté "catégoriquement" un récent rapport de l'ONG Human Rights Watch sur l'exécution sommaire d'au moins 28 membres de l'ethnie Massalit, un groupe minoritaire non arabe, et la "destruction totale de la ville de Misterei", à l'ouest du Darfour.

Imputant ces violences à un "conflit tribal de longue date", les paramilitaires ont dit "respecter le droit humanitaire international".

Au début des années 2000, le général Daglo, alors à la tête des miliciens arabes Janjawid, avait mené la politique de la terre brûlée contre des minorités ethniques au Darfour sur ordre d'Omar el-Béchir. Les atrocités de l'époque ont valu à l'ex-dictateur d'être inculpé par la Cour pénale internationale, notamment pour génocide.

Une "revanche"

Le directeur de recherche émérite au CNRS Marc Lavergne confirme au micro de l'émission Tout un monde que les origines de ce conflit remontent à une vingtaine d'année. Vingt ans durant lesquels le Darfour, "sultanat indépendant jusqu'en 1916, date à laquelle il a été raccroché au Soudan", est devenu une véritable poudrière dans cette région d'Afrique.

"Une fois raccroché au Soudan en 1916, le Darfour a été marginalisé, c'est-à-dire que le pouvoir s'est concentré sur la vallée du Nil et sur Khartoum. Les périphéries ont toutes été négligées par les pouvoirs successifs depuis l'indépendance en 1956. Or, ce sont des régions fertiles et densément peuplées. Cette situation a développé un sentiment de frustration et des rébellions ont démarré au tournant des années 2000. Le Soudan du Sud s'est notamment battu pendant près de vingt ans pour obtenir l'égalité des droits. Et on lui a accordé l'indépendance en 2011."

A partir de ce moment, le Darfour s'est senti grugé, poursuit le spécialiste, "car il avait exprimé les mêmes demandes que le Soudan du Sud mais le pouvoir central a refusé." On assiste donc aujourd'hui à une sorte de "revanche".

>> Ecouter l'interview complète de Marc Lavergne dans l'émission Tout un monde :

La crainte d'un nouveau nettoyage ethnique plane au Soudan. [Keystone - Albert Gonzalez]Keystone - Albert Gonzalez
Le Darfour est-il en proie à une épuration ethnique? Interview de Marc Lavergne / Tout un monde / 7 min. / le 18 juillet 2023

Reprise des négociations?

Jusqu’ici, à l'exception de quelques trêves rapidement rompues, aucune négociation n'a abouti pour faire cesser ces combats.

Samedi, une source gouvernementale a annoncé qu'une "délégation des forces armées" était de retour à Jeddah, en Arabie saoudite, "pour reprendre les négociations avec les rebelles des Forces de soutien rapide". Mais les FRS n'ont fait aucun commentaire sur l'éventuelle reprise des négociations.

La semaine passée, les sept pays voisins du Soudan étaient réunis au Caire. Ils ont appelé la communauté internationale à "tenir ses promesses" financières face à la situation humanitaire désastreuse dans le pays. Mais pour Marc Lavergne, cette communauté internationale n'intervient justement pas parce qu'elle est "incompétente" et "est concernée par d'autres crises ailleurs plus importantes à ses yeux".

Sujets radio: Ariane Hasler, Benjamin Luis et Eric Guevara-Frey

Adaptation web: Fabien Grenon

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Déjà sous tension, le Tchad fait face à l'arrivée massive de réfugiés

Ces dix derniers jours, plus de 20'000 Soudanaises et Soudanais sont arrivés au Tchad, s'ajoutant aux quelque 270'000 personnes déjà installées dans le pays depuis le début du conflit chez son voisin.

Ces flux aggravent une situation déjà extrêmement difficile pour les Nations unies qui tentent d'apporter l’aide humanitaire nécessaire. Il faut dire que la majorité des nouveaux arrivants fuyants les combats sont des femmes et des enfants de moins de cinq ans, dont beaucoup étaient blessés.

Les admissions d'enfants souffrant de malnutrition dans les centres de santé à la frontière tchadienne ont également augmenté, mettant à rude épreuve des ressources déjà limitées.

"Situation dramatique"

Pour Pierre Honorat, directeur national du Programme alimentaire mondial (PAM) pour le Tchad, la situation est plus que dramatique, les fonds pour y faire face étant historiquement faibles.

"Je n'ai jamais vu ça durant toutes mes années passées au PAM. Je n'ai jamais vu des crises de ce niveau-là avec si peu de financement", déplore-t-il au micro de La Matinale.

Le PAM a besoin d'urgence d'au moins 157 millions de dollars pour soutenir au cours des six prochains mois au Tchad les nouveaux arrivants, ainsi que les réfugiés, les déplacés à l'intérieur du pays et les personnes en situation d'insécurité alimentaire.

"Il faut bien se rendre compte que la demande est bien supérieure. Les crises s'enchaînent depuis quelques années", poursuit-il. Suite notamment à l'insécurité alimentaire grandissante au Tchad et les très grosses inondations de l'an dernier.

Et avec la saison des pluies qui approche, et les combats au Soudan qui ne semblent pas prêts de s'arrêter, les Nations unies estiment que le Tchad pourrait voir arriver encore plus de réfugiés dans les semaines à venir.

>> Le sujet complet de La Matinale mardi sur la situation au Tchad :

Des réfugiées soudanaise qui cherchent refuge au Tchad sont photographiées près de la frontière avec le Soudan, le 11 mai 2023. [reuters - Zohra Bensemra]reuters - Zohra Bensemra
Le Tchad fait face à la foule de gens fuient les combats au Soudan / La Matinale / 1 min. / le 18 juillet 2023