De fortes précipitations ont commencé à frapper lundi soir et mardi le département de Magnésie, à 300 km dans le nord de la Grèce, son chef-lieu la ville portuaire de Volos et les villages du Mont Pélion avant de toucher mercredi les villes de Karditsa et de Trikala, dans le nord-ouest. On déplore au moins deux morts.
"Il semble que la région montagneuse de Magnésie a été touchée par 600 à 800 mm de pluie en 24 heures", "un phénomène inédit dans les données météorologiques du pays", mesurées depuis 1955, a précisé mercredi Dimitris Ziakopoulos, un météorologue gouvernemental.
Mardi, à 20h45, l’agence météo grecque relevait, de son côté, 754 mm en vingt-quatre heures à Zagora du Pélion, indiquant que "le précédent record national de précipitations quotidiennes, 644,7 mm à Palikí, en Céphalonie, lors du cyclone méditerranéen Janus en septembre 2020", avait été battu. Si on se base sur la donnée de 754 mm, cela représente 754 litres d'eau par m².
A titre de comparaison, la moyenne annuelle des précipitations dans la capitale grecque est d'environ 400 millimètres et la moyenne pour le mois de septembre affiche 16 mm.
La plaine de Thessalie transformée en lac
Conséquence, "la plaine de Thessalie a été transformée en un immense lac", a déclaré jeudi Yannis Artopios, porte-parole des pompiers grecs, à la télévision publique Ert. La Thessalie se trouve dans le centre de la Grèce, où sont situés les départements de Magnésie, de Trikala et de Karditsa.
Yannis Artopios a fait état d'une "grande opération" menée "avec des canots de sauvetage" pour que les secours puissent arriver à Palamas, près de la ville de Karditsa où l'eau a atteint "entre 1,5 et 2 mètres", en vue d'évacuer les habitants.
Pas un record en Europe ou dans le monde
Ces précipitations exceptionnelles ne dépassent toutefois pas les records enregistrés en 24h dans le monde, indique un article CheckNews de Libération. En Europe continentale, le record date de 1940 à Saint-Laurent-de-Cerdans, en France (1 mètre). Un peu plus bas, on retrouve Bolzaneto, en Italie, en 1970 (948 mm).
Selon Météo France, l’île de la Réunion détient le record mondial avec 1845 mm de précipitations en 1966, lors du passage du cyclone Denise.
En Suisse, c'est Camedo qui détient le record avec 455 mm en 1935, selon MétéoSuisse. Pour s'approcher du cumul relevé en Grèce, il faut prendre en compte le pic enregistré sur 3 jours à Camedo également, en 1948, avec 768 mm.
Si la plupart des valeurs maximales sont affichées par des localités tessinoises (en une heure, 2 jours ou un mois notamment), il faut noter que c'est Lausanne qui apparaît pour le record de précipitations en 10 minutes (41 mm le 11 juin 2018).
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Interrogé par Libération, Davide Faranda, chercheur du CNRS au Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement, relève que comparer des lieux et des périodes différentes est "peu pertinent" scientifiquement parlant. Mais si on se concentre sur la Grèce, "on est bien sur des précipitations sans précédent sur la zone concernée et sur cette période précise."
Ces précipitations interviennent en outre après une longue période caniculaire et de nombreux incendies qui diminuent la capacité des sols à absorber l'eau et augmentent le risque de glissements de terrain.
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Athènes touché avant une accalmie prévue
Mercredi soir, la tempête baptisée "Daniel" a touché également Athènes provoquant des inondations dans les rues et plusieurs stations du métro de la capitale.
Selon le service de météorologie national (EMY), le phénomène devait reculer jeudi après-midi.
En Turquie et Bulgarie, pays frontaliers de la Grèce, les pluies diluviennes de ces derniers jours ont fait 11 morts au total.
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Un "blocage en oméga"
La coexistence d'un temps chaud et sec en Suisse, en France ou en Allemagne, alors que de fortes pluies se produisent en Espagne, en Grèce, en Turquie et en Bulgarie est due à ce que les météorologues appellent un "blocage en oméga", ou "bloc oméga".
Ce phénomène "bloque" la circulation atmosphérique à haute altitude et fige les conditions météorologiques pendant plusieurs jours ou semaines.
La zone de haute pression est entourée de part et d'autre de deux dépressions, prenant la forme de la lettre grecque Ω.
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Ces dépressions sont stationnaires et provoquent des orages à répétition sur la péninsule ibérique et la Grèce ainsi que les Balkans. Elles sont alimentées en air froid par un flux de nord persistant, avec un temps humide et frais.
Un phénomène de ce type s'est déjà produit en juin et en juillet 2021, entraînant des inondations meurtrières en Allemagne et en Belgique, mais aussi au Luxembourg et aux Pays-Bas.
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