En principe, une femme a donc de fortes chances de succéder au président sortant Andres Manuel Lopez Obrador en 2024 à la tête du Mexique, deuxième économie d'Amérique latine tournée vers les Etats-Unis.
L'élection d'une femme à la tête de l'Etat sera une première dans l'histoire de ce pays qui enregistre des milliers de féminicides par an.
Ce duel politique féminin est "une bonne nouvelle", selon Carlos Pérez Ricart, professeur de sciences politiques du Centre de recherches et d'enseignement économique de Mexico (CIDE). "Le Mexique dispose d’une démocratie vibrante et lors des prochaines élections il y aura une véritable alternative entre deux visions du pays", explique-t-il jeudi dans l'émission Tout un monde.
Unité du parti mise à mal
Scientifique de formation, proche du président sortant, Claudia Sheinbaum est arrivée en tête d'une enquête d'opinion organisée par son parti Morena pour départager six prétendants au total. Portée par la popularité du président sortant, elle est pour l'instant la favorite des élections prévues début juin.
"Aujourd'hui c'est le peuple de Mexico qui a décidé", a-t-elle déclaré après l'annonce des résultats. "Le processus électoral commence demain au niveau national. Il n'y a pas une minute à perdre".
Avant même l'annonce des résultats, le principal rival de Claudia Sheinbaum, l'ex-ministre des Affaires étrangères Marcelo Ebrard, a demandé la répétition de l'enquête d'opinion en dénonçant des "irrégularités".
Les résultats sont définitifs, a prévenu Morena. Ces primaires ont été "un exercice démocratique, unitaire" a estimé le président du Conseil national du parti, Alfonso Durazo, en annonçant les résultats. "Il n'y a pas d'incident qui ont affecté de manière définitive le résultat final", a-t-il ajouté.
Issue d'une famille juive et de la bourgeoisie intellectuelle
Le duel au féminin entre Claudia Sheinbaum et Xochitl Galvez s'annonce comme un choc frontal entre deux parcours et deux styles.
Petite-fille de grands-parents juifs qui ont quitté la Bulgarie et la Lituanie, Claudia Sheinbaum est une physicienne d'apparence réservée. "Je suis une fille de 1968", affirme l'ancienne maire de Mexico, qui revendique l'héritage des luttes sociales sans avoir jamais été membre du PRI, l'ex-parti dominant pendant 70 ans.
Issue de la bourgeoisie intellectuelle de gauche de la capitale, elle s'est engagée à poursuivre la politique du président sortant Lopez Obrador. Claudia Sheinbaum veut continuer à défendre les plus pauvres, notamment les communautés indigènes, tout en mettant en avant les bons résultats macro-économiques de son mentor (monnaie forte, finances saines).
Le franc parler de Xochitl Galvez
Vêtue fréquemment d'un huipil (blouse traditionnelle), Xochitl Galvez est originaire de Tepatepec, une petite localité de l'Etat d'Hidalgo (centre). Issue d'un milieu modeste, "Xochitl" (fleur, en langue nahuatl) est née d'un père indigène otomi et d'une mère métisse.
Ingénieure et cheffe d'entreprises, d'un naturel spontané, Xochitl Galvez truffe ses discours d'expressions familières. "Ma règle d'or: pas de feignasse, pas d'escrocs, pas d'enfoirés", a-t-elle martelé dans un entretien lundi avec l'AFP. Elle a confirmé qu'elle lutterait "avec ses ovaires" contre la violence.
Elle a mis au défi Claudia Sheinbaum de s'affranchir de la tutelle du président: "Qu'elle lui dise (...) occupez-vous de gouverner et laissez-moi être la candidate".
Pas de retour sur les droits acquis
Politiquement, Xochitl Galvez déclare emprunter des idées aux trois partis qui la soutiennent (le libéralisme économique du PAN de droite, les idéaux de justice sociale du PRD de gauche, et l'héritage institutionnel du PRI).
"Avec moi il n'y aura pas de marche arrière dans les droits acquis, aussi bien de la communauté LGBTQ+ comme des femmes", promet-elle, interrogée sur l'avortement dépénalisé en septembre 2021. Le mariage pour tous est légal dans les 32 Etats.
Portée par la popularité du président sortant, Claudia Sheinbaum est la favorite de l'élection présidentielle, selon deux récents sondages. Combative, "Xochitl" affirme qu'elle peut rattraper son retard, après avoir réveillé une opposition en à peine deux mois de campagne interne.
Ce serait une première dans l'histoire d'un pays qui enregistre des milliers de féminicides par an, en plus de la violence extrême des cartels de drogue en certains endroits de son territoire.
miro avec afp