Le Canada a été confronté, d'est en ouest, à une saison des feux historique qui a commencé très tôt au printemps et dure depuis plus de cinq mois.
Le pays, qui de par sa situation géographique se réchauffe plus vite que le reste de la planète, fait face ces dernières années à des événements météorologiques extrêmes dont l'intensité et la fréquence sont accrues par le changement climatique.
L'équivalent de la surface de la Tunisie est déjà parti en fumée: 18 millions d'hectares ont brûlé, quand le précédent record datait de 1989 avec 7,3 millions d'hectares, selon les données du Centre interservices des feux de forêt du Canada.
Quelque 900 feux encore actifs
Certaines régions comme le Québec, moins habituées aux mégafeux que celles de l'ouest, ont été très touchées. La province francophone détient même cette année le record d'hectares brûlés avec plus de 5,2 millions, suivie par les Territoires du Nord-Ouest dans le Grand nord canadien avec plus de 4 millions.
Au total, le pays a dénombré près de 6500 feux de forêt depuis le début de l'année. Une grande partie d'entre eux ont été déclenchés par la foudre tombée dans des régions affectées par une grande sécheresse.
Fin septembre, quelque 900 feux étaient toujours actifs, principalement dans l'ouest.
Record pour les émissions carbones
Les émissions de carbone provoquées par ces feux ont atteint des niveaux inédits (473 mégatonnes), plus de trois fois supérieurs au précédent record, selon les données de l'observatoire européen Copernicus.
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A eux seuls, les feux au Canada en 2023 représentent à ce jour un tiers des émissions mondiales de carbone liées à des incendies de forêt en 2022 (1455 mégatonnes).
Plus de 200'000 déplacés
Plus de 200'000 personnes ont été déplacées en raison des feux de forêt, un record au Canada. Huit pompiers ont perdu la vie dans cette bataille.
Au Québec, l'équivalent de dix ans de coupe de bois a été consumé en quelques semaines, selon les premières estimations. Une situation qui risque de créer une crise forestière. L'industrie est engagée dans une course contre la montre pour récupérer le maximum de bois avant que les troncs calcinés mais encore utilisables ne soient dévorés par des insectes.
Dans de nombreuses provinces, les dépenses pour lutter contre les incendies se sont envolées.
La Colombie-Britannique, dans l'Ouest, a annoncé que 2023 était sa saison des feux la plus coûteuse, engendrant un déficit supplémentaire pour la province de 2,5 milliards de dollars canadiens (1,7 milliard d'euros).
vajo avec afp
Forêt boréale menacée
Plus de feuilles sur les branches, des troncs noircis et des racines carbonisées: dans une de ces forêts d'épinettes noires, les reines de la forêt boréale, seules quelques touffes de mousse ont résisté à l'assaut des flammes du mois de juin.
"Il y a peu de chances que cette forêt puisse se régénérer, les arbres sont trop jeunes pour avoir eu le temps de former des cônes qui assurent la génération suivante", estime Maxence Martin, professeur en écologie forestière à l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue.
Face à ce bilan alarmant et "si on continue sur la tendance actuelle, d'ici 2100, c'est probablement un tiers de la forêt boréale que l'on aura perdu au Québec", ajoute ce passionné, en slalomant au milieu des jeunes repousses vertes qui apparaissent sur le sol brûlé.
Pourtant cet anneau de verdure, la plus vaste étendue sauvage au monde, qui encercle l'Arctique - du Canada en passant par l'Alaska, la Sibérie et le nord de l'Europe - est vital pour l'avenir de la planète.
Les feux y sont alimentés par des conditions plus sèches et chaudes, causées par le changement climatique. Et en relâchant du gaz à effet de serre dans l'atmosphère, ces incendies contribuent en retour au réchauffement de la planète, en un cercle vicieux.
Autre particularité de cette forêt du nord: elle libère 10 à 20 fois plus de carbone par unité de zone brûlée que d'autres écosystèmes.