Une mission multinationale menée par le Kenya soutiendra la lutte contre les gangs en Haïti
Alors que la violence des gangs qui contrôlent la majorité de la capitale Port-au-Prince ne cesse de s'aggraver, le Premier ministre haïtien Ariel Henry et le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres réclamaient depuis un an presque jour pour jour l'envoi d'une mission de soutien à la police.
Le Kenya a finalement annoncé fin juillet dernier qu'il était prêt à mener cette force non onusienne et à déployer 1000 hommes dans le pays caraïbéen.
Selon la résolution adoptée lundi par 13 voix pour et 2 abstentions - la Chine et Russie -, et ce après de difficiles négociations, cette "mission multinationale de soutien à la sécurité" est créée pour "une période initiale de douze mois", avec une réévaluation au bout de neuf.
Soutenir la police haïtienne
Cette force vise à "apporter un soutien opérationnel à la police haïtienne" dans sa lutte contre les gangs et pour la sécurisation des écoles, ports, hôpitaux et aéroport. L'objectif est d'améliorer suffisamment la sécurité pour organiser des élections, alors qu'aucun scrutin n'a eu lieu depuis 2016.
Dans un récent rapport, Antonio Guterres soulignait que la crise économique, politique et sécuritaire que traverse Haïti s'est encore aggravée depuis un an, avec des gangs "plus nombreux et mieux armés" que les quelque 14'000 policiers comptabilisés fin juin 2023.
Au total, près de 2800 meurtres ont été dénombrés entre octobre 2022 et juin 2023, dont près de 80 mineurs, selon ce rapport.
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Pression chinoise sur le trafic d'armes
Cette violence est alimentée par le trafic d'armes en provenance principalement des Etats-Unis. Cette situation a été largement montrée du doigt par la Chine, qui a estimé qu'une éventuelle mission n'avait pas de sens sans un arrêt du flux à destination des gangs.
Sous la pression de Pékin, qui dispose d'un droit de veto au Conseil, la résolution généralise d'ailleurs l'embargo sur les armes légères et munitions, jusqu'ici uniquement applicable aux chefs de gangs visés par le régime de sanctions mis en place en octobre 2022 et qui ne concerne à ce stade qu'un individu.
Eviter une nouvelle épidémie
La résolution ne précise pas la composition de la mission, ni le calendrier du déploiement. Celle-ci salue par ailleurs "plusieurs pays" envisageant leur participation, mais peu d'entre eux sont connus, hormis la Jamaïque, les Bahamas et Antigua-et-Barbuda.
Le projet appelle d'autre part la future mission à "prendre les mesures appropriées en matière de gestion des eaux usées" pour empêcher la propagation de maladies.
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Des Casques bleus de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah), présente de 2004 à 2017, avaient apporté le choléra sur le territoire. L'épidémie avait fait plus de 10'000 morts.
ats/mera
Berne a insisté pour une meilleure lutte contre les abus sexuels
Le Conseil fédéral a donné le 6 septembre dernier son accord de principe concernant l’autorisation d’une mission de soutien à la sécurité en Haïti. Il avait adopté des directives en vue des négociations à New York, rappelle le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) lundi soir dans un communiqué.
Lors des négociations de la résolution, la Suisse a notamment insisté pour que le respect du droit international et des droits de l’homme ainsi que la lutte contre les abus sexuels soient inscrits dans le texte et à ce qu'un mécanisme de surveillance soit mis en place au sein de la mission.
Conformément à la loi sur le Parlement, les présidents des commissions de politique extérieure du Conseil national et du Conseil des États ont été consultés sur cette question, selon les modalités convenues entre le Conseil fédéral et les commissions concernant l’implication du Parlement durant le mandat de la Suisse au Conseil de sécurité de l’ONU.