L'ex-chef de l'Etat français (2007-2012), arrivé en voiture vers 9h40 au tribunal judiciaire de Paris, a été mis en examen pour recel de subornation de témoin et association de malfaiteurs en vue de la préparation d'escroqueries au jugement en bande organisée, a indiqué une source judiciaire.
Cette décision ouvre la voie à un possible nouveau procès pour la figure de proue de la droite française. Elle a été prise au terme d'une trentaine d'heures d'interrogatoire au total sur trois jours et demi, mené par deux magistrats financiers chargés de cette information judiciaire ouverte en mai 2021 sur cette opération, appelée "Sauver Sarkozy" par l'un des mis en cause.
Au moins neuf protagonistes
Par cette mise en examen, les juges signifient qu'ils estiment disposer de suffisamment d'indices graves ou concordants quant à la participation de Nicolas Sarkozy aux manoeuvres élaborées par au moins neuf autres protagonistes impliqués à des degrés et moments divers, possiblement en leur donnant son aval.
Parmi les mis en cause, la reine des paparazzis Mimi Marchand, l'intermédiaire Noël Dubus - déjà condamné pour escroquerie - et le puissant chef d'entreprise David Layani. Les poursuites contre le financier Pierre Reynaud, mort en mai, sont éteintes.
Obtenir la rétractation d'accusations
La première étape de l'opération aurait d'abord consisté à obtenir la rétractation des accusations contre Nicolas Sarkozy du sulfureux intermédiaire franco-libanais Ziad Takieddine, fin 2020 en échange d'une possible rémunération. Ce revirement avait donné lieu à une retentissante interview sur BFMTV et Paris Match, point de départ de l'enquête.
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Puis, au premier semestre 2021, certains des mis en cause auraient tenté d'obtenir une preuve que le retentissant document libyen publié dans l'entre-deux-tours de la présidentielle 2012 par Mediapart et évoquant un financement à hauteur de 50 millions d'euros était un faux.
Une opération à plus de 600'000 euros
D'après la source judiciaire, Nicolas Sarkozy a par ailleurs été placé sous statut de témoin assisté pour l'infraction de participation à une association de malfaiteurs en vue de commettre l'infraction de corruption active de personnel judiciaire étranger au Liban. Certains protagonistes de cette opération sont en effet soupçonnés d'avoir tenté de corrompre des magistrats libanais pour qu'ils libèrent un fils Kadhafi détenu dans ce pays, afin que la famille du défunt dictateur libyen facilite la mise hors de cause de Nicolas Sarkozy.
Pour les enquêteurs, selon un chiffrage récemment établi, au moins 608'000 euros auraient pu être utilisés pour l'ensemble de l'opération, dont les protagonistes contestent la teneur frauduleuse.
Entendu en juin par les enquêteurs de l'Oclciff, spécialisés dans les affaires financières, l'ex-président a certes dit avoir été informé par Mimi Marchand en octobre 2020, soit un mois avant que l'information ne soit publique, d'un souhait de Ziad Takieddine de changer de version. Mais selon ses auditions dévoilées par le quotidien Libération, Nicolas Sarkozy a assuré que "l'idée même que je puisse pousser directement ou indirectement au financement des pieds nickelés est une idée folle".
De multiples affaires
Longuement interrogé sur son agenda et sa téléphonie de la fin 2020 et du début 2021, qui suggèrent des rendez-vous ou conversations à des moments-clés avec des protagonistes du dossier, Nicolas Sarkozy a évoqué quelques "coïncidences" mais nié tout contact significatif. Pour lui, "toute cette petite bande n'a que pour seule préoccupation de se faire mousser les uns par rapport aux autres" en prétendant être en contact avec lui.
Cette décision des magistrats vient alourdir l'agenda judiciaire déjà chargé de Nicolas Sarkozy, qui sera samedi matin dans son fief de Neuilly-sur-Seine pour la promotion de son dernier livre "Le temps des combats".
Outre le procès du financement libyen, prévu début 2025, il sera jugé en novembre en appel dans le dossier Bygmalion. L'affaire dite "Bismuth" pourrait, elle, faire l'objet d'un nouveau procès, pour raisons procédurales.
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afp/ther