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Comment le festival "Tribe of Nova" a viré à l'horreur sous l'assaut du Hamas

Comment le festival Tribe of Nova a viré au massacre sous l'assaut du Hamas
Comment le festival Tribe of Nova a viré au massacre sous l'assaut du Hamas / 19h30 / 2 min. / le 9 octobre 2023
Avec un bilan estimé à environ 250 morts et de nombreuses personnes prises en otage, le festival "Tribe of Nova" a été au centre de l'attaque du Hamas samedi matin. Des vidéos partagées sur les réseaux sociaux et les témoignages permettent de saisir l'horreur vécue par les participantes et participants à cette rave party qui se tenait à quelques kilomètres de la bande de Gaza.

Tal a 25 ans, les yeux rougis par la fatigue, la colère et la peine. Vendredi dernier, elle a quitté la banlieue chic du nord de Tel-Aviv avec son petit-ami, Yonatan, pour aller faire la fête dans le désert.

Cette fête, c'est le festival "Tribe of Nova", programmé entre vendredi et samedi à l'occasion des "Sukkot holidays", la "Fête des Cabanes", l'une des trois fêtes de pèlerinage prescrites par la Torah. Selon son site internet, le festival programmait plusieurs dizaines d'artistes sur trois scènes installées dans le désert, près du kibboutz de Reim, à quelques kilomètres de la bande de Gaza.

>> Lire aussi le suivi des événements en direct : "Pas d'eau, pas d'électricité, pas de gaz": Israël promet un siège complet de la bande de Gaza

Attaque par la terre et les airs

Mais tôt samedi matin, alors que des milliers de jeunes âgés pour la plupart d'une vingtaine d'années dansaient dans le désert, l'attaque a commencé. Sur une vidéo filmée et partagée sur TikTok, on voit arriver les parapentistes motorisés du Hamas dans le ciel au-dessus des festivaliers.

"La musique s'est arrêtée et il y a eu une sirène d'alerte à la roquette", a témoigné une femme, prénommée Ortal, à la chaîne de télévision N12. "Soudainement, sortis de nulle part, ils ont commencé à tirer." Rapidement, les personnes présentes sur place ont tenté de fuir les lieux, d'abord en voiture, ce qui a créé un important embouteillage et bloqué les routes d'accès. Les combattants du Hamas, à moto, en ont profité pour viser les occupants des véhicules.

Les terroristes sont arrivés. Ils nous ont dit que tout allait bien, qu'ils étaient des soldats. Et puis ils ont lancé une grenade et ils ont ensuite tiré à l'intérieur de l'abri

Tal, rescapée de l'assaut contre le festival "Tribe of Nova"

D'autres ont pris la fuite à pied, en courant à travers champs comme en témoigne une vidéo publiée sur X.

Certaines personnes ont préféré se cacher sur le site du festival. C'est le cas de Tal et Yonatan qui ont tenté de se mettre à l'abri. "On était 70 dans un abri anti-bombe. Nous étions vraiment serrés. Les terroristes sont arrivés. Ils nous ont dit que tout allait bien, qu'ils étaient des soldats. Et puis ils ont lancé une grenade et ils ont ensuite tiré à l'intérieur de l'abri. Mon copain est sorti pour aller voir ce qu'il se passait. Ils lui ont tiré dessus. Au même moment, une fille est tombée, son corps gisait à terre. Elle a appelé au secours, on l'a relevée. Ils ont ensuite lancé une autre grenade. Mon copain était avec la fille et ils sont tous les deux tombés à terre", témoigne-t-elle lundi dans La Matinale de la RTS.

Tal est restée au milieu des cadavres. Une fois le calme revenu, elle s'est enfuie, laissant derrière elle Yonatan.

>> Ecouter le témoignage de Tal dans La Matinale :

Des personnes viennent donner leur sang à l'hôpital de Tel Aviv. [AFP - Jack Guez]AFP - Jack Guez
Une rave party en Israël prise pour cible a fait plusieurs victimes: témoignages / La Matinale / 2 min. / le 9 octobre 2023

La réaction des autorités critiquée

Mais le calme a mis longtemps à revenir, et la réaction des forces de l'ordre est d'ailleurs critiquée par des survivants du festival, notamment Gili Yoskovich, qui témoigne lundi dans le 12h45. Les terroristes "sont restés dans la zone pendant trois heures, mais il n'y avait personne pour nous sauver. Non... Les policiers du festival, je les ai vus, mais ils étaient d'un côté. J'étais sûre que l'armée allait arriver, j'ai entendu des hélicoptères et j'ai pensé que des soldats allaient descendre avec des cordes et aller dans ce champ pour nous sauver. Mais il n'y avait personne, juste tous ces terroristes".

Gili a réussi à fuir, mais tous n'auront pas cette chance puisque de nombreux festivaliers sont exécutés sur place. "Dans la zone où a eu lieu la rave party, et (pour) la rave party elle-même, mon estimation, fondée sur le nombre de camions, chaque camion transportant 50 corps, et il y avait quatre ou cinq camions, je dirais environ 200-250 corps", a déclaré Moti Bukjin, porte-parole de Zaka, organisation spécialisée dans les premiers secours et la collecte et l'identification des corps conformément à la loi juive.

De nombreuses personnes enlevées

Au-delà des morts et des blessés, de nombreuses personnes ont également été enlevées par les assaillants. Une vidéo partagée sur les réseaux sociaux montre notamment une jeune femme, séparée de son compagnon et emmenée à moto par des combattants.

Elle s'appelle Noa, c'est la fille de Yakov, qui a découvert cette vidéo sur les réseaux sociaux. "Je suis tellement triste en ce moment. C'est ma seule fille", déplore-t-il dans le 12h45 de lundi, avant de lancer un appel à ceux qui détiennent sa fille. "Vous avez des victimes tout comme nous! C'est l'occasion de créer des liens entre les deux nations pour parvenir à une paix honnête."

>> Voir aussi le reportage du 19h30 qui revient sur les événements :

Le Hamas est parvenu hier à traverser l'une des frontières les mieux gardée au monde. Retour sur son offensive
Le Hamas est parvenu hier à traverser l'une des frontières les mieux gardée au monde. Retour sur son offensive / 19h30 / 2 min. / le 8 octobre 2023

Selon des éléments recueillis par Libération, plus de la moitié des otages civils enlevés par le Hamas seraient des participants au festival. À l'heure actuelle, plus d'une centaine de personnes seraient retenues en otage, selon le gouvernement israélien.

Le festival, lui, a mis en place un formulaire pour aider les proches à rechercher les personnes disparues, qu'elles aient été kidnappées ou blessées et transportées à l'hôpital. Tal recherche d'ailleurs Yonatan à l'hôpital de Beersheva, comme des centaines de parents et d'amis, dans l'attente désespérée de nouvelles de leurs proches.

Témoignage radio recueilli par Thibault Lefèvre

Reportage TV: Tamara Muncanovic

Texte web: Victorien Kissling

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