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"Les Israéliens sont très conscients de la nature des combats qui peuvent les attendre à Gaza"

Quelle est la stratégie militaire d'Israël face au Hamas? Interview de Damien Simonneau
Quelle est la stratégie militaire d'Israël face au Hamas? Interview de Damien Simonneau / Forum / 6 min. / le 26 octobre 2023
Annoncée presque immédiatement après l'attaque du Hamas le 7 octobre dernier, l'offensive terrestre de l'armée israélienne à Gaza ne se matérialise toujours pas. Pour Damien Simonneau, Tel Aviv est conscient de la difficulté des combats qui pourraient attendre ses troupes dans cette enclave palestinienne.

Dans la nuit de mercredi à jeudi, les forces terrestres israéliennes ont mené dans la bande de Gaza leur plus grande incursion depuis le début du conflit, avec plusieurs opérations ciblées dans le nord du territoire palestinien, avant de finalement se retirer.

Invité jeudi de l'émission Forum, Damien Simonneau, maître de conférences à l'Institut des langues et civilisations orientales (Inalco), a estimé que ces opérations étaient sans doute une tentative de "préparer le terrain" pour une offensive ultérieure de plus grande envergure.

"Il s'agit d'obtenir des données, des renseignements sur cette zone du nord face à laquelle la plupart des chars et des éléments militaires de l'armée israélienne sont installés", analyse ce spécialiste des politiques sécuritaires américaines et israéliennes.

Un Hamas prêt dans la bande de Gaza

Pour autant, Damien Simonneau reconnaît qu'il est encore difficile pour l'instant de comprendre la stratégie israélienne. Derrière les discours martiaux du Premier ministre Benjamin Netanyahu, ce sont, selon ce spécialiste, des calculs complexes qui sont encore soupesés dans les sphères de pouvoir israéliennes.

"Les Israéliens sont d'abord très conscients de la nature des combats qui peuvent les attendre dans la bande de Gaza. Si le Hamas a aussi bien planifié ses opérations du 7 octobre, on peut aussi penser qu'il s'attend bien évidemment à ce que les Israéliens viennent [...] le Hamas dispose d'un réseau de tunnels, il est réfugié notamment dans la ville de Gaza, qui est une zone urbaine extrêmement dense où il peut tendre des embuscades, poser des mines, des éléments anti-tanks", constate-t-il.

>> Lire à ce propos : Une offensive terrestre israélienne retardée face à la complexité des opérations

Damien Simoneau rappelle que l'armée israélienne est quelque part habituée à "ces combats de rue" dans des "zones très denses". Les soldats l'ont notamment expérimenté en Cisjordanie, à Naplouse en 2002 ou encore au Liban en 2006. Des combats qui se sont souvent avérés très difficiles et qui pourraient freiner les ardeurs israéliennes à Gaza. "On peut se demander si l'offensive terrestre sera aussi massive qu'annoncée par Benjamin Netanyahu", résume le chercheur.

Un jeu à trois bandes

Si la décision souveraine pour une intervention appartient bien à Benjamin Netanyahu, Damien Simoneau explique que les tractations ont lieu dans un "jeu à trois".

"Cela se joue entre le cabinet politique de Benjamin Netanyahu, l'armée, qui a dû mobiliser 300'000 réservistes et qui continue à évaluer la faisabilité de l'opération, et également les Etats-Unis", décrypte l'expert.

Le voyage de Joe Biden en Israël la semaine dernière aurait d'ailleurs eu comme but de ralentir l'offensive israélienne. "L'une des raisons de sa venue était de demander aux Israéliens du temps pour faire deux choses: aider les Américains à renforcer leur présence dans la zone pour protéger leurs bases militaires dans d'autres pays, notamment en Irak et en Syrie, qui ont été attaquées par des acteurs qui travaillent notamment pour l'Iran, et donner plus de temps à une médiation pour les otages, puisque nombre d'entre eux ont des doubles nationalités", observe Damien Simoneau.

>> Réécouter le reportage du 12h30 sur les incursions israéliennes à Gaza :

Des soldats israéliens patrouillent à la frontière avec la bande de Gaza le 26.10.2023. [EPA/Keystone - Abir Sultan]EPA/Keystone - Abir Sultan
Première opération terrestre d’Israël dans la bande de Gaza / Le 12h30 / 1 min. / le 26 octobre 2023

Une pression sur la question des otages qui vient aussi de l'intérieur, des manifestations de familles de personnes kidnappées et emmenées dans la bande de Gaza ayant notamment eu lieu devant le QG de l'armée à Tel Aviv pour exiger une solution avant toute opération.

Plus globalement, Damien Simoneau estime que la "réponse militaire" atteint peut-être ses limites à Gaza et rappelle que les différents ballets diplomatiques dans la région au cours des dernières semaines montrent que de nombreux acteurs sont à la recherche d'une solution politique.

Propos recueillis par Thibaut Schaller
Adaptation web: Tristan Hertig

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