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Une députée française témoigne après avoir été droguée par un collègue sénateur

La députée française Sandrine Josso accuse le sénateur Joël Guerriau de l’avoir droguée pour abuser d’elle. [afp - Bertrand Guay]
La députée française Sandrine Josso accuse le sénateur Joël Guerriau de l’avoir droguée pour abuser d’elle / Le 12h30 / 2 min. / le 21 novembre 2023
"J'ai cru mourir." En France, le premier témoignage public de la députée Sandrine Josso a fait monter la pression lundi sur le sénateur Joël Guerriau, accusé de l'avoir droguée en vue de l'agresser sexuellement. Le président du Sénat réclame de son côté "la mise en retrait" de l'élu.

"J'ai juste eu l'instinct de survie nécessaire." Moins d'une semaine après les faits, Sandrine Josso est sortie du silence pour livrer sa vérité sur France 5.

La députée de Loire-Atlantique a raconté être allée "en confiance" et "en toute amitié" fêter la réélection de son collègue sénateur, élu dans le même département pour le compte du parti Horizons, la formation de l'ancien Premier ministre Edouard Philippe. "Un ami depuis dix ans" dont elle s'étonne de "l'insistance" à trinquer plusieurs fois au champagne - dont le goût "sucré" la surprend - tout en jouant avec le variateur d'éclairage du salon.

"Il mettait la lumière très fort, puis la baissait", technique connue pour "augmenter l'efficacité de la drogue" comme lui ont expliqué plus tard les médecins de l'hôpital où elle a fini la nuit.

L'impression "de faire une crise cardiaque"

Prise de "palpitations" et de "sueurs", elle voit alors son hôte ranger "un sachet blanc sous le plan de travail" de sa cuisine, de l'ecstasy, que les policiers retrouveront au même endroit lors d'une perquisition.

"Là, je comprends", mais "j'étais déjà sous l'effet de la drogue, mes jambes tremblaient", a-t-elle poursuivi. Pour s'extirper du piège, elle commande un taxi et s'aperçoit que son hôte la suit "dans l'ascenseur, dans la cour, jusqu'au taxi".

"J'étais paniquée, mon coeur battait... J'avais l'impression de faire une crise cardiaque", a ajouté celle qui se dit encore "en post-trauma" et "sursaute tout le temps".

Voulant faire de son cas un exemple, Sandrine Josso a estimé qu'"on peut tous subir ce que j'ai subi" et que "(son) devoir est de sensibiliser", mais aussi d'"enjoindre le gouvernement à faire quelque chose par rapport à ce fléau" de la soumission chimique.

Gérard Larcher invite Joël Guerriau à se retirer

Pour ce qui est de son agresseur présumé, "je ne m'occupe pas de lui, il fait ce qu'il a à faire", a-t-elle balayé.

D'autres ont pris position à sa place, notamment Gérard Larcher, président du Sénat, qui a "invité" Joël Guerriau "à se mettre en retrait de toutes ses activités liées à son mandat de sénateur", en particulier "ses fonctions de secrétaire au Bureau du Sénat et de vice-président de la commission des affaires étrangères".

Une demande motivée par "l'extrême gravité des faits reprochés au sénateur et le principe de dignité qui s'attache à l'exercice du mandat parlementaire", a-t-il souligné.

Cette démarche a aussitôt été appuyée par la cheffe de file des sénateurs communiste, Cécile Cukierman, pour qui "c'est la moindre des choses", à la fois "par respect pour la plaignante et par respect pour l'institution".

Joël Guerriau, membre du groupe Les Indépendants - République et Territoires, lors d'un intervention au Sénat, le 14 février 2023. [afp - Amaury Cornu / Hans Lucas.]
Joël Guerriau, membre du groupe Les Indépendants - République et Territoires, lors d'un intervention au Sénat, le 14 février 2023. [afp - Amaury Cornu / Hans Lucas.]

Placé sous contrôle judiciaire

Mis en examen vendredi pour "administration à l'insu de (Sandrine Josso) d'une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes afin de commettre un viol ou une agression sexuelle", ainsi que "détention et usage de substances classées comme stupéfiants", Joël Guerriau est depuis placé sous contrôle judiciaire avec interdiction d'entrer en contact avec la plaignante.

Bien qu'il conteste, par la voix de son avocat, toute intention malveillante et plaide "une erreur de manipulation", le sénateur, qui ne bénéficie pas de l'immunité parlementaire dans cette affaire "en flagrance", est déjà lâché de toutes parts.

Les premières sanctions politiques sont d'ailleurs déjà tombées: coup sur coup samedi, son parti politique Horizons, puis son groupe parlementaire ont décidé de le suspendre et d'ouvrir des procédures disciplinaires pouvant aboutir à son exclusion.

afp/ther

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